Après son passage à la première Chambre, le Projet de loi des finances rectificative (PLFR) 2020 a atterri à la deuxième chambre pour discussion. Parmi ses dispositions, il compte une réduction des dépenses de l'ordre de 877 MDH au niveau du département de l'Education, tandis que l'enseignement supérieur devra subir une coupe de 300 MDH de son budget d'investissement. Une érosion très peu appréciée par la CDT. En effet, cette réduction n'a pas été du goût du syndicat national de l'enseignement (SNE), affilié à la Confédération démocratique du travail (CDT), qui a également pointé la persistance du ministère de l'éducation nationale à fermer la porte du dialogue sectoriel et ne pas respecter ses obligations envers le mouvement syndical. Ainsi, et lors de sa réunion du mardi 14 juillet 2020 au siège central de la Confédération démocratique du travail, le bureau national a délibéré sur divers développements sociaux et éducatifs, en particulier sur l'amendement de la loi de finances qui a été « décevante et sans empreinte sociale » malgré les circonstances exceptionnelles que vit le pays suite à la crise sanitaire du Covid-19. D'après le syndicat, le PLF rectificative 2020 a prouvé que l'éducation et la santé ne sont pas une préoccupation centrale et majeure. « La réduction du budget de l'éducation de près de 5 milliards est une indication de la persistance du gouvernement dans la même logique qu'avant la pandémie du coronavirus, qui ne semble pas avoir entraîné le changement attendu dans la mentalité de l'Etat. Réduire le budget des dépenses et des investissements signifie limiter la création d'emploi et la construction des établissements d'enseignement, ce qui va dans le sens de la disparition de l'enseignement public pour céder la place à l'enseignement privé », estime le syndicat. Joint par Hespress Fr, Abdelghani Raki, secrétaire général du SNE avance qu'il n'y a aucun dialogue avec la tutelle qui « agit comme bon lui semble sans revenir vers les professionnels du secteur ». « La centrale CDT avait discuté avec le Comité de veille économique (CVE) au sujet des secteurs sociaux, comme la santé et l'éducation, pour qu'il y ait une augmentation de leur budget. Ce qu'ils ont donc fait, en revanche, est que le budget alloué au secteur de la santé n'a pas bougé. Il n'a subi ni hausse ni baisse, alors que le discours officiel tenu pendant toute la période de confinement c'est que le secteur de la santé sera une priorité dorénavant et connaîtra une hausse de son budget pour pouvoir gérer les crises sanitaires, aux côtés du secteur de l'enseignement. Ce dernier a carrément subi une baisse de son budget », nous explique le syndicaliste. Il donne ainsi l'exemple de plusieurs pays du monde, à l'image de la France, qui a, lors de la rectification de sa loi de finances, a revu à la hausse le budget des deux secteurs clefs dans n'importe quel pays, à savoir la santé et l'éducation, soulignant que même le président français Emmanuel Macron, « qui est un fervent défenseurs des institutions financières, pouvait bien aller dans le sens d'une diminution du budget de la santé et de l'éducation, mais il a fait tout le contraire». « L'Etat Marocain, et contrairement au discours qu'il tenait à travers ses responsables sur une augmentation du budget de la santé et de l'éducation, a fait tout le contraire en diminuant le budget du secteur de l'éducation, au moment où plusieurs parents d'élèves du privé comptent se diriger vers le public. C'est très envisagé après le conflit qu'ils ont eu avec les écoles privées sur le paiement », souligne Raki. Il revient ainsi sur la déclaration « dangereuse » du ministre de l'éducation nationale, Said Amzazi, au sein de l'hémicycle, « qui a dit que le pays ne dispose pas d'assez d'établissements publics pour accueillir l'ensemble des étudiants du privé qui veulent s'y rendre». Raison de plus pour que le budget du secteur de l'éducation soit revu à la hausse, estime le syndicaliste. Tout en rappelant que le ministère de l'Education nationale maintient sa position de « méconnaissance du mouvement syndical en ignorant les demandes du travailleur éducatif, en l'absence de dialogue et en le compensant en prenant des photos et en les publiant de manière carnavalesque, enracinant les illusions et en marginalisant les revendications et les droits », le syndicat national de l'enseignement « condamne le vote de la majorité sur la loi de finances rectificative et considère que cela prouve que l'Etat et le gouvernement continuent de ne pas aborder les problèmes sociaux, et que la question de l'éducation publique en tant que préoccupation centrale est toujours hors de portée et qu'il existe une volonté de perpétuer le retard et l'incivisme du Maroc ». Le syndicat relevant de la CDT proteste également contre la persistance de la tutelle « à ne pas tenir compte du mouvement syndical et à refuser le dialogue, à ignorer les exigences matérielles, sociales et professionnelles, en prenant des décisions de manière unilatérale et qui prêtent à confusion, mais aussi à rédiger des circulaires avec un langage d'ambiguïté, afin de laisser la confusion et d'éluder la responsabilité ». In fine, le syndicat national de l'enseignement refuse et rejette le modèle de système interne annoncé par le ministère de l'éducation nationale car il considère « qu' il n'a pas fait l'objet de dialogue et de consultation avec les syndicats, et parce que les questions d'éducation nécessitent une approche holistique ». Il appelle, de même, les syndicats à continuer à se mobiliser pour une lutte sous diverses formes pour la défense de l'école publique et pour les droits matériels, sociaux et professionnels des enseignants et cadres de l'enseignement.