Mourad Fedouache, alias Charly Sbc est un photographe originaire de Sidi Yahya Gharb, commune de la province de Sidi Slimane. Ce jeune garçon de 19 ans, vendeur de citrouilles avec sa famille dans un souk de son douar, pratique la photographie de rue depuis trois ans. Avec un smartphone, Charly Sbc capture des images de son quotidien, qui ont aujourd'hui connu un grand succès après avoir été exposées dans le Musée national de la photographie de Rabat. Hespress FR est allé à la rencontre de cet artiste unique. Interview. Avant tout peux tu te présenter ? Qui es-tu et d'où viens-tu ? Je m'appelle Mourad Fedouache, je viens de Sidi Yahya El Gharb, dans un village appelé douar « Chanti » , qui est le plus ancien bidonville au Maroc. Je suis étudiant en droit en deuxième année. Tu es connu sous le nom de Charly Sbc, comment as-tu choisi ce nom? J'étais un grand fan de Charlie Chaplin, et je l'imitais depuis tout petit dans le quartier, du coup tout le monde m'appelle Charly, pour la partie Sbc, c'est un secret que je préfère ne pas dire. Tu pratiques la photographies depuis à peu près trois ans maintenant, comment as-tu commencé? C'était mon année du bac, et je me rendais deux fois par semaine au marché pour aider mes parents qui sont des vendeurs de citrouilles. J'y allais tous les mardi et jeudi, et c'est là où j'ai eu le déclic. J'observais les gens qui passent, qui achètent, qui vendent, qui négocient aussi, puis il y a ceux qui rient, ceux qui crient, ceux qui sont justes assis comme moi, je me suis dit que ces visages sont très expressifs et qu'ils méritent d'être pris en photo. À l'époque, j'avais un smartphone très modeste, et la caméra était cassée, du coup j'ai pensé à prendre mes photos avec la caméra frontale, c'était ma seule option d'ailleurs. Pourquoi tu as choisi la photographie de rue? C'est pas moi qui ai choisi la photographie de rue, c'est la photographie de rue qui m'a choisi (rires). Je passe mon temps entre études et travail au souk avec ma famille, ma première inspiration était le milieu où je vis et c'est d'ailleurs pourquoi j'ai choisi d'appeler ma première exposition » From douar Chanti to New-York ». Ce milieu où j'ai vécu, est peut-être pauvre, mais très riche en émotions. C'est un endroit où j'ai appris le vivre ensemble, le partage, la simplicité, et surtout la générosité et que peu de personnes connaissent. Ce sont des valeurs que je veux transmettre à travers ces photos, qui j'espère un jour seront exposés dans un musée américain, ce qui a toujours été mon rêve d'enfance. Racontes-nous un peu comment tu as été choisi parmi les artistes qui ont exposé leurs photos au musée national de la photographie? Yassine Alaoui Ismaili, alias « Yorias » a qui était attribuée la carte blanche de l'exposition « Sourtna » avait publié un statut sur Facebook dans lequel il demandait aux gens de taguer des photographes qu'ils connaissent, et c'est là où un ami à moi m'a marqué sur la publication. Après « Yorias » a pris contact avec moi, puis m'a demandé de lui envoyer mes photos en m'annonçant que je vais participer à l'inauguration du musée. J'étais très heureux, tout d'abord parce que je connais Yorias, je le suivais sur les réseaux sociaux et je voyais ses photos que j'admire, mais aussi parce que j'étais surpris d'apprendre que je participerais à cet événement. Quels sont tes sujets préférés à prendre en photo? Je ne dirais pas sujets, mais personnes. Je préfère prendre des photos d'enfants ou de gens vieux, parce que, pour moi, c'est des personnes qui ne savent pas fausser leurs émotions, ni leurs expressions faciales. Mais la chose la plus importante, pour n'importe quel sujet et personne, c'est l'angle, parce que c'est lui qui définit la beauté d'une image. Quel matériel utilises-tu? J'ai commencé avec un simple smartphone, puis une petite caméra que j'avais achetée à 50 dirhams dans une brocante, mais aujourd'hui Yorias m'a offert une caméra professionnelle que j'utiliserai dorénavant pour améliorer la qualité de mes photos. Quels sont tes projets pour le futur? J'ai quelques expositions à venir, et je travaille sur un livre rassemblant toutes les photos que j'ai prises à Sidi Yahya Gharb. Un projet par lequel je remercierai toutes les personnes qui ont contribué à mon travail, et qui continueront à le faire d'ailleurs. Que dirais-tu aux jeunes comme toi, qui aiment la photographie? D'être eux-même et d'avoir l'intention de dire quelque chose à travers leurs photos. La photographie de rue de nos jours est pleine de mauvaises imitations et d'images superficielles. Il faut développer sa personnalité et surtout être très présent sur le terrain à prendre des photos.