Le mouvement de colère des infirmiers et techniciens de santé n'a pas pu amadouer la tutelle. Grèves, sit-in, et marches nationales, les infirmiers ont tout essayé pour transmettre leur détresse au ministère de la Santé, mais en vain. Mais ils ne comptent pas baisser les bras et reprennent leur lutte de plus belle. Dans un précédent communiqué, le mouvement des infirmiers et techniciens de santé au Maroc (MITSM) ont annoncé la tenue d'une énième grève nationale les 9 et 10 janvier avec un sit-in devant le ministère de la Santé à Rabat, accompagné d'une marche nationale le même jour dans la capitale. Une conférence de presse est également prévue le vendredi 10 janvier à Rabat par le mouvement des infirmiers et techniciens de santé à laquelle prendront part plusieurs cadres du secteur de la santé ainsi que l'avocat Mohamed Bassou, afin de débattre au sujet du dossier revendicatif de ces quelque 30.000 ,cadres, notamment le « vide juridique » dont pâtit leur profession, mais aussi pour mieux éclairer l'opinion publique quant à leur situation. « Les infirmiers et techniciens de santé jouent un rôle primordial dans le système de santé marocain. Toutefois, la tutelle poursuit sa politique de sourde oreille face à nos doléances légitimes, qui nous permettront de mieux exercer nos fonctions et améliorer la qualité des soins et de la prise en charge des patients. Et pour ce faire on demande la mise en place d'un cadre législatif précis qui régit notre profession», a déclaré à Hespress Fr Youness Jouahri, membre du MITSM. Notre interlocuteur fait en effet référence au décret décret n°2.17.535 portant statut particulier du corps interministériel des infirmiers et des techniciens de santé, qui ne leur convient pas. Depuis un an déjà, les infirmiers et techniciens de santé du Maroc organisent chaque mois un sit-in ou une grève pour « se rappeler au bon (mauvais?) souvenir de leur tutelle ». Le dernier débrayage de cette catégorie de professionnel de santé date des 9 et 10 décembre 2019, où des sit-in régionaux ont été tenus devant les directions régionales du ministère de la Santé. Cette fois-ci, c'était le vide juridique qui fait redescendre les infirmiers et techniciens de santé dans la rue, notamment après les poursuites judiciaires engagées à l'encontre de deux sages-femmes (et d'un médecin) à Larache pour «non-assistance à personne en danger ». Selon Youness, Jouahri, « le problème ne se pose pas au niveau des arrestations et poursuites judiciaires, si elles sont légitimes et engagées dans le cadre d'une loi propre aux infirmiers, mais par rapport au vide juridique qui donne lieu à ces poursuites ». « Aujourd'hui, les infirmiers et techniciens de santé n'ont aucune loi qui régit leur fonction de manière claire. Dans quel cas doivent-ils intervenir ou pas ? Après, s'ils n'interviennent pas, ils sont poursuivis pour manquement, et s'ils interviennent, en cas d'incident, ils n'ont aucune couverture légale ! Et on peut résumer la situation au fait qu'il y a un conflit de compétences entre médecins et infirmiers », nous explique-t-il. Il poursuit dans ce sens que dans les régions enclavées du Royaume « des fois, il n'y a pas de médecin. Soit il est en astreinte soit il n'y a carrément pas de médecin, il n'y a que l'infirmier. Et par conséquent, ce dernier se trouve dans l'obligation d'aider le patient qui se présente à lui. S'il ne le fait pas, il est poursuivi pour non-assistance à personne en danger conformément au Code pénal, et s'il intervient et qu'il y a problème, il est accusé d'interférer dans les compétences du médecin». Un vide juridique qui s'ajoute à la liste des revendications des infirmiers et techniciens de santé, à savoir la création de l'Ordre national des infirmiers et techniciens de santé, la création du référentiel des emplois et compétences des métiers paramédicaux (REC), ainsi que le recrutement des lauréats des instituts supérieurs des professions infirmières et techniques de santé (ISPITS). Ces cadres de la santé réclament également à leur tutelle « l'augmentation de la prime de risque, l'instauration de formations de base et de formations continues adaptées aux besoins réels afin de revoir le rythme d'avancement de l'infirmier, l'augmentation des effectifs en embauchant les lauréats infirmiers pour soulager les effectifs en exercice, l'égalité des chances en matière de promotion professionnelle à l'instar des autres catégories (ingénieurs, pharmaciens, médecins et autres fonctions publiques) ».