L'arrestation du journaliste Omar Radi le 26 décembre 2019 pour un tweet, puis sa libération le 31 décembre pour être poursuivi en état de liberté provisoire, avait suscité une vague d'indignation et de colère parmi les activistes pour les droits de l'homme et de la liberté d'expression. Rapidement, un comité de soutien au journaliste, 33 ans, a été créé, pour défendre et soutenir non seulement Omar Radi, mais aussi l'ensemble des prisonniers politiques et d'opinion. Dans un récent communiqué du comité, ce dernier s'est réjoui dans un premier temps de la nouvelle de la liberté provisoire pour Omar Radi, et a également salué « tous celles et ceux qui ont exprimé leur solidarité avec le journaliste ». Il considère de même, que « les charges retenues contre lui ciblent sa liberté d'opinion garantie par la Constitution et les conventions internationales des droits humains ratifiées par le Maroc« . Khadija Ryadi, activiste marocaine lauréate du Prix 2013 des Nations unies et membre du comité de soutien au journaliste a indiqué à Hespress Fr avoir reçu la nouvelle de l'arrestation d'Omar Radi avec « indignation et colère ». « Omar est un journaliste connu, activiste et très actif. Il a déjà été convoqué et interrogé sur le tweet en question en avril 2019. Comme nous avons écrit sur le CP, j'étais indignée de voir à nouveau un journaliste convoqué pour une phrase qu'il a exprimée et qui entre totalement dans le domaine de la liberté d'expression. C'est la colère et l'indignation qui nous ont envahis, et c'est la goutte qui a fait déborder le vase », a-t-elle affirmé. La militante a également soulevé qu'avant Omar Radi, « toute une série de jeunes ont été arrêtés et mis en prison et jugés même à des années de prison de façon arbitraire. Et quand l'arrestation d'Omar est survenue, c'était la colère. D'où cette réaction rapide de créer ce comité de soutien au journaliste, notamment l'organisation du sit-in à Rabat devant le Parlement et la pétition internationale, parce que les gens n'ont pas accepté ce qui est arrivé à Omar Radi ». Journaliste d'investigation, Omar Radi a réalisé plusieurs enquêtes «intéressantes qui touchent à des sujets tabous et critiquent directement les institutions politiques qui sont responsables de la situation de notre pays », fait valoir la militante, notant que comme « il y a peu de journalistes d'investigation au Maroc, en arrêter un c'est trop ». « Le tweet n'est pas la raison pour laquelle Omar Radi a été arrêté. Mais on s'est habitué à ce genre de pratiques de la part des autorités. On arrêtait les gens pour leurs activités, leurs opinions, leurs articles et déclarations, mais en leur collent des choses à côté. Pour le cas d'Omar, ils n'ont rien trouvé à lui reprocher, comme la drogue, le viol, l'adultère ou autres….Mais dans le cas de Omar, comme il n'y avait rien d'autre, il ne restait que le tweet pour le mettre en prison», a-t-elle fustigé. Et de rappeler que dans son communiqué, le comité de soutien exige « que les charges retenues contre le journaliste Omar Radi soient abandonnées», tout en appelant ses membres à «poursuivre la mobilisation pour la libération des autres détenus d'opinion dans les prisons marocaines, et plus largement les détenus politiques emprisonnés suite à des procès inéquitables, en particulier les détenus du Hirak du Rif». Khadija Riadi estime en outre que Omar Radi peut parfaitement être considéré comme un détenu d'opinion. « Bien sûr que oui, s'il est arrêté pour son tweet, c'est sûr qu'il sera considéré comme un prisonnier d'opinion. (…) On le met en prison pour une idée qu'il a exprimée et qui rentre dans la liberté d'expression. Ce n'est pas un mensonge, ce n'est pas un appel à la violence et donc c'est une opinion qu'on a le droit d'exprimer et de la façon dont il l'a fait. D'ailleurs, « Human rights watch » a considéré que tout ce qui est dans le tweet est protégé par le droit à la liberté d'expression. Donc ça sera évidemment un prisonnier politique ». Ainsi, l'ex-présidente de l'association marocaine des droits de l'Homme (AMDH) a tenu à souligner qu'au Maroc « on parle énormément de prisonnier politiques. Mais en fait, un prisonnier politique est dans le même rang qu'un prisonnier d'opinion comme il est universellement reconnu, ainsi qu' au niveau des organisations internationales. C'est des gens qui sont en prison pour leurs activités, leurs opinions, leurs écrits, leurs messages ou encore pour avoir manifesté ou brandi une pancarte ». D'ailleurs, poursuit-elle, « le comité a été constitué pour Omar Radi et l'ensemble des prisonniers d'opinion et aussi pour la défense de la liberté d'expression. Parce que l'on considère qu'on est tous menacés d'être un jour derrière les barreaux pour nos opinions. Donc non seulement on demande que ceux qui sont en prison soient libérés, mais que personne ne soit emprisonné pour ses opinions ». « On s'attend toujours à ce genre d'arbitraire. On le dit d'ailleurs, tous les activistes qui militent pour les droits de l'Homme, et les journalistes qui font leur travail correctement sont en liberté provisoire », déplore-t-elle.