Le gouvernement espagnol veut ériger une frontière intelligente au niveau des enclaves de Sebta et Melilla. Mais le recours à l'intelligence artificielle est fortement critiqué par plus de 80 ONGs en Espagne, dénonçant la violation des droits fondamentaux des citoyens. Un manifeste signé par plus de 80 associations espagnoles alerte sur le danger de l'utilisation de l'intelligence artificielle au niveau des frontières de Sebta et Melilla avec le Maroc. Les signataires y dénoncent notamment la violation des droits fondamentaux et de la vie privée des voyageurs transitant par ces deux frontières. Jusqu'à présent, les voyageurs doivent uniquement présenter les documents prouvant leur identité, mais avec l'installation des caméras de reconnaissance faciale, «les visages des voyageurs seront détectés, leurs empreintes digitales seront collectées et les dates et lieux d'entrée et de sortie, ou les cas de refus, seront enregistrés», indique le média espagnol El Periodico. Cela expose les voyageurs à plusieurs dangers, insistent les signataires. Ces derniers rappellent notamment «les transferts de demandeurs d'asile d'un Etat membre de l'UE à un autre contre leur gré, en augmentation ces dernières années, et qui ont été, en partie, facilités par la collecte de données biométriques, telles que leurs empreintes digitales». Lire aussi: Plus de 6.000 personnes ont traversé Sebta et Melilla au premier jour de la réouverture De plus, «les données biométriques sont des données intrinsèques aux personnes» et leur collecte suppose une violation de la vie privée des voyageurs, indique la même source, notant que «la collecte des données biométriques de personnes ne disposant pas d'un passeport européen ne respecte pas le principe de proportionnalité». Cette technologie «manque de transparence», d'autant plus qu'aucune mention sur les types d'algorithmes qui seront utilisés n'est faite, dénonce par ailleurs le manifeste. «Les algorithmes de reconnaissance faciale renvoient souvent des faux positifs et des faux négatifs dans les visages non caucasiens, ce qui, dans ce contexte particulier, pourrait avoir de graves conséquences pour les personnes identifiées à tort comme terroristes présumés», souligne la même source. Le gouvernement espagnol a alloué un budget de 4,1 millions d'euros pour déployer «cette frontière intelligente», indique El Periodico. Le projet a été lancé fin 2019 par le ministère espagnol de l'Intérieur et devait être achevé dans un délai de 24 mois, délai qui n'a finalement pas été respecté.