* Les banques internationales touchées par la crise nont assaini quà moitié leurs actifs, et donc la sortie de crise nest pas pour sitôt et la bataille se jouera certainement sur lemploi. * Au Maroc, des fragilités structurelles persistent et risquent de compromettre la sortie de crise. Et ce nest pas fini La crise économique internationale continue de susciter les débats et les altercations. Reste quactuellement les discussions portent essentiellement sur laprès-crise et lon commence dores et déjà à parler dune éventuelle crise sociale. Cest dans ce sillage que sest inscrite la conférence organisée récemment à la Faculté déconomie et de droit par le centre Links présidée par M. Berrada. Linvité dhonneur était le gouverneur de BAM, A. Jouahri. Devant une salle archicomble, le wali de BAM avait planté le décor de la genèse de la crise en véhiculant des messages assez simples. Il a cité à cet effet les innovations financières sous le nom de subprimes qui rapportaient beaucoup sans pour autant impacter les fonds propres des institutions financières. Et qui par effet de mimétisme, se sont propagées dans le monde entier. Le gouverneur de BAM a ironisé sur ce phénomène de mimétisme en comparant les institutions financières aux moutons de Panurge. Dès lors quil y a eu un renversement de tendance, les grosses entreprises immobilières ont été confrontées à un grave problème de liquidités à cause des ménages qui consommaient au-delà des limites dévastatrices et qui se sont retrouvés, du jour au lendemain, dans lincapacité de rembourser leurs dettes. Ce problème de liquidités a été immédiatement transféré au système bancaire. Sur ce point, le gouverneur de BAM a cité les agences de notation qui accordaient aux banques américaines le triple A, à savoir le zéro défaut. «Comment ces agences auraient-elles pu noter AAA, les banques américaines ?», sest-il interrogé «La confiance nexclut pas le contrôle, la bonne gouvernance et la maîtrise des risques», a-t-il conclu. La méthodologie coordonnée du G20 et du FMI a pu aboutir à des marchés financiers de plus en plus stables. Mais cela nempêche pas de rappeler que les banques nont assaini leurs actifs quà 50%. Quel est donc le moment opportun de sortie de crise ? La reprise de la demande privée et de la consommation est certes salvatrice, mais pas avec un taux de chômage qui oscille entre 10 et 11%. Il sagit donc dune équation à multiples inconnues. La crise est loin dêtre finie. Nous en sommes à la phase la plus difficile finalement, celle de lajustement des structures et des déformations de prix relatifs. Il faudra bien que le gonflement des bulles financières successives se résorbe dans limmobilier, dans les secteurs financiers et dans les surcapacités industrielles parfois considérables. Et la bataille se jouera très probablement sur lemploi, variable ou non de lajustement des taux de profit. Cest un drame pour la jeunesse des pays développés qui risque de voir se généraliser lemploi précaire. Les fragilités structurelles pointées du doigt ! Au Maroc, le secteur bancaire et financier est resté à lécart de la crise financière. Mais sur le plan réel, notre économie a été contaminée. Les secteurs non agricoles évolueront de moitié en 2010, soit 2,5% alors quils avaient affiché un taux de croissance de 5 à 6% en 2008 et 2009. Le gouverneur rassure que les autorités suivent leur évolution, mois après mois, pour éviter le pire à savoir une véritable crise sociale. Le Comité de veille a mis en place des solutions pour les secteurs touchés par la crise, mais sagit-il là de mesures de longue durée ? Le taux de chômage culmine à 9% mais il faut avouer que nous navons pas de statistiques valables sur lemploi. Sachant quil faut prendre en considération, dans nos calculs, le nombre de chômeurs marocains qui se trouvent aujourdhui sans emploi dans les autres pays (18.000) et qui seraient contraints de regagner leur pays dorigine. Cest ce que lon appelle des fragilités structurelles. Mais il y en a une autre de taille : cest la compétitivité de notre tissu économique à lextérieur qui laisse à désirer. Nos entreprises peinent toujours à écouler leurs produits à létranger pour des raisons liées essentiellement à la qualité. Nos avoirs extérieurs ne cessent de samenuiser et nous sommes à 7 mois dimportations. Toutes ces fragilités et bien dautres nous enseignent quil serait dangereux de retomber dans le Programme dAjustement Structurel parce que tout PAS a nécessairement un coût social. Le message que nous véhicule A. Jouahri est quil faut continuer les réformes essentiellement en matière déducation auxquelles il faut ajouter la Recherche & Développement. Et si lauditoire sest interrogé sur léventualité dun emprunt national pour financer la Recherche & Développement dans notre pays, ce dernier nest nullement le principal souci du gouverneur qui relègue toujours le financement au second rang, après le bien-fondé de tout principe. Le Maroc a des potentialités sur lesquelles il peut capitaliser et damer le pion à dautres pays de la zone MENA. Et pour conclure, il est utile de rappeler que la sortie de crise en douceur est tributaire de sa capacité à résorber les fragilités structurelles.