l À linstar dautres pays, le Maroc subira, lui aussi, les contrecoups de la crise. * Mais le schéma sera inverse puisque cest le système économique qui posera des problèmes au secteur financier. * Le système bancaire est sain puisquil na pas importé de produits dérivés, mais sa prudence est une arme à double tranchant. * La reprise est attendue à la mi-2010. * Finances News Hebdo : On ne cesse de nous répéter que le Maroc ne sera pas impacté par la crise financière mondiale. Partagez-vous cet avis qui fait du Maroc une exception ? * Mohamed Berrada : Je ne pense pas quon fasse lexception. Il serait présomptueux de le dire. Je crois que le gouvernement est parfaitement conscient que, de par le processus douverture qui a lieu depuis une vingtaine dannées, notre économie subira les contrecoups de la crise internationale. Le problème nest pas den être conscient mais danticiper ses effets et dêtre réactif. Gérer, cest prévoir. Du coup, il ne suffit pas de dire que la tempête arrive; il faut réfléchir aux moyens den réduire les soubresauts, la profondeur et la gravité. Et je ne vois pas les choses bouger sur ce plan-là, et cest ce qui me perturbe. Il y a probablement des réunions ministérielles qui se tiennent sur ce sujet, mais très peu de communication ou dexplications ! Vous le savez, les opérateurs économiques ou le public ont besoin déclairage pour avancer, et cest une mission qui revient à lEtat. Il est regrettable que nous nayons pas investi dans une institution dintelligence économique centralisée avec une mission de veille stratégique susceptible danalyser les mouvements qui concernent lenvironnement international et qui permettent de conduire à laction et de saisir les opportunités. Malheureusement, nos entreprises nont pas les moyens matériels et humains pour investir seules dans ce type de projet et se trouvent souvent seules et désarmées face à ladversité imprévisible. Toute politique nécessite au préalable la collecte dinformations . et cest un peu notre faiblesse : on attend la tempête pour réagir et annoncer des plans; et il est souvent trop tard ! Comme pour un malade, la vitesse de réaction est essentielle pour sa guérison * F. N. H. : Quels sont les secteurs les plus vulnérables face à cette crise ? * M. B. : La majorité du secteur industriel aujourdhui ! Dabord, le secteur textile qui est en train tout simplement de disparaître. Faites la liste des grandes entreprises de textile du Maroc dil y a quinze ans, et allez voir où elles en sont aujourdhui. Vous constaterez que la plupart ont mis la clé sous le paillasson, y compris des entreprises dEtat, comme le complexe textile de Fès qui était un des fleurons de cette industrie au Maroc dans les années 70 avec ses 1.400 employés Beaucoup dindustriels ont fermé leurs usines, ont indemnisé leur personnel en catimini, et sont devenus importateurs de produits chinois. Ils gagnent plus dargent et courent moins de risques Nous assistons lentement à une réduction dangereuse de notre base industrielle au profit des services ! Il en est de même des autres branches : le plastique, la chaussure, la sous-traitance mécanique et électronique Les commandes venant de nos clients européens sont en train de se réduire. Lindustrie automobile européenne est en crise et elle fonctionne en flux tendus. Cette crise sest répercutée sur les sous-traitants marocains. On assiste à beaucoup dannulations de commandes mais aussi de, plus en plus, à des accidents de paiement. * F. N. H. : Pourquoi cette situation ? * M. B. : Notre industrie nest pas soutenue : regardez létat des routes des quartiers industriels et des systèmes dassainissement! Demandez ce que sont devenues les entreprises englouties sous les inondations à Tanger et le soutien quelles ont reçu de lEtat des visites officielles et des paroles ! Nos entreprises affrontent une concurrence déloyale (en loccurrence asiatique) avec des armes disproportionnées Aussi bien sur notre propre territoire quen Europe, notre partenaire traditionnel. Notre artisanat est lui-même attaqué, puisque vous trouvez nos produits traditionnels comme les babouches importés de Chine, sans aucun scrupule ! On enlève ainsi peu à peu le travail aux ouvriers marocains pour le donner à des ouvriers chinois Au nom du principe du libre-échange, alors que les Chinois refusent de consommer nos produits. Je déplore que certaines de nos valeurs aient un peu disparu, en particulier la fibre patriotique : dans dautres pays, on ne laisse pas des entreprises étrangères mettre en péril leur tissu productif : on réagit. Ici : on assiste à la scène en tant que spectateur. La libéralisation des échanges cest bien : elle a permis de faire baisser les prix au profit des consommateurs, daméliorer les performances de nos entreprises. Mais elle doit être menée dans le cadre dune vision systémique en fonction du degré davancement de tous les secteurs et de la mise à niveau du secteur industriel dans le respect par tous du principe de concurrence loyale. Et ce nest pas le cas ! Si on veut à tout prix donner la priorité au consommateur, il faut bien à un moment donné lui trouver le revenu nécessaire pour lui permettre de continuer à consommer, sil na plus de travail. * F. N. H. : Comment voyez-vous le rôle de lEtat entre interventionnisme et libre jeu du marché ? * M. B. : Je lai dit, la concurrence est le nerf de la croissance ! Elle stimule la créativité, la productivité et, à terme, crée de lemploi et contribue au développement de la communauté. Cest elle qui explique la croissance économique fulgurante qui a marqué léconomie mondiale des 20 dernières années. Mais lEtat, de son coté, doit veiller au respect des règles transparentes de la concurrence. Et je suis content, quà la tête du Conseil de la Concurrence, ait été nommée une personnalité qui connaît le terrain et qui saurait apprécier et faire respecter ces règles, y compris sur le plan international Car la concurrence nest pas seulement nationale, elle est surtout internationale, et cest elle qui pourrait faire plus mal, lorsquil sagira de se battre à armes inégales. Maintenant, si vous parlez du rôle de lEtat dans léconomie, nous avons besoin au Maroc dun débat public profond sur ce thème. Il aurait pu être alimenté par les politiques, les députés, les partis politiques ! Mais je ne vois pas de signal dans ce sens. Cest dommage. La mise en uvre dune politique libérale dans les années 70 et 80 était une nécessité pour permettre lémergence dun secteur privé et dentrepreneurs qui participeraient au développement du pays. Des réformes structurelles ont accompagné cette politique : réforme fiscale, réforme du système financier, libéralisation du commerce extérieur, privatisation, etc Cette politique était valable à une époque dans un contexte déterminé. Aujourdhui, lEtat doit reprendre le flambeau et montrer le chemin. Il doit mettre en place une politique de partenariat secteur public-secteur privé et lancer de grands programmes dinvestissements dans des secteurs productifs quil considère comme prioritaires, à coté des grands programmes dinfrastructures quil réalise. La crise internationale nous montre de toute façon que la privatisation, le protectionnisme, le libéralisme, ou la politique budgétaire ou monétaire ne sont plus le fruit didéologies particulières, mais de simples instruments de politique économique que les socialistes ou les libéraux peuvent utiliser indifféremment au gré des événements, ce qui est source de confusion et dinterrogation des électeurs devant les politiques Regardez ce qui se passe aujourdhui aux Etats-Unis : lEtat nationalise les banques, dépense à outrance largent des contribuables pour sauver des entreprises et dune manière générale le système capitaliste ! On passe en quelques mois dune politique ultralibérale à une politique interventionniste de type keynésienne ! Et même la Chine sy met : elle aide les USA à se redresser, car cest son premier client et son premier débiteur ! Bel exemple de solidarité internationale * F. N. H. : Quelles sont, selon vous, les causes de la crise actuelle ? * M. B. : Toute crise provient dexcès ! Excès de consommation et excès de crédit ! Les Américains sont un peuple de consommateurs, et pour cela ils néprouvent aucune gêne à sendetter à outrance. Cest la consommation qui a tiré la croissance économique mondiale des 20 dernières années, et cette croissance a été stimulée par lémergence de nouvelles économies comme celle de la Chine, de lInde, du Brésil ou de lArgentine. La crise actuelle a été dabord une crise financière, puis économique et de plus en plus sociale avec la montée du chômage. Elle nest pas née il y a quelques mois, mais déjà au milieu de 2007 avec les subprimes ! Les banques américaines ont accordé énormément de crédits pour lacquisition de logements moyens, en prenant comme garantie la valeur courante des actifs et non pas la capacité de remboursement des ménages. Plus elles accordaient de crédits, plus les gens achetaient, plus les prix montaient, plus elles accordaient de crédits jusquau jour du remboursement. Les premières défaillances ont montré le caractère artificiel du système, et tout a commencé à sécrouler ! On a attribué la crise à la déréglementation financière et à la multiplication des produits financiers sophistiqués qui en sont issus ; cest vrai, mais il ne faut pas oublier que ce sont ces produits qui ont généré la croissance dont on a parlé. Tout est lié. En fait, cette crise nest que laspect dun phénomène beaucoup plus global et invisible : une crise de civilisation dans laquelle le monde est en train de glisser depuis lavènement de lâge industriel. Nous sommes dans une époque où nos valeurs morales traditionnelles sont en train de seffriter au profit des valeurs matérielles liées à la production à outrance, à la consommation à outrance, à largent à outrance, et où lhomme nest pas une fin de la croissance mais un moyen pour la croissance ! On pousse lhomme à consommer plus, on le submerge de publicité, de crédit, on pollue la nature, on lexploite à outrance pour produire et consommer plus, et probablement la nature se révolte à travers certains phénomènes que lhistoire expliquera un jour * F. N. H. : Alors que faut-il faire ? * M. B. : Remettre lhomme au centre de nos préoccupations car, en définitive, son bien-être nest-il pas la finalité de toutes nos actions et de toute politique de développement ? Je dis «bien-être» et non pas «bien-avoir» ! Et au cur de tout cela, il y a léducation. Mais pas nimporte laquelle ! Il faut une éducation qui permet à lhomme de sépanouir, de développer sa personnalité, son intuition, son être, ses capacités de mieux appréhender son environnement, ainsi que des valeurs damour et de solidarité ! Et non pas laccumulation seule de connaissances scientifiques et techniques : on ne doit pas former des robots pour servir les modèles de production et de consommation, mais des êtres qui réfléchissent ! Il y a nécessairement un équilibre à définir entre lêtre et lavoir ! * F. N. H. : Ce schéma est-il le même au Maroc ? * M. B. : Soyons clairs ! Ce qui marque la mondialisation aujourdhui cest le développement des systèmes de communication : tous les Marocains regardent la télé et veulent adopter le modèle de consommation occidental. Des enquêtes auprès des jeunes lont montré et cest logique. La naissance et lélargissement dune classe moyenne est le facteur et la conséquence de la croissance économique. Mais si cette croissance nest pas assise sur une base productive, elle sera artificielle. Le crédit peut jouer le rôle de catalyseur, mais il faut quil soit relayé par la création de valeur ajoutée. Il faut rechercher une croissance de qualité et non pas de «quantité», une croissance harmonisée, construite sur une diversification équilibrée entre différents secteurs pour quelle soit régulière et moins dépendante des facteurs exogènes. Cest pourquoi, à mon sens, il faut rester prudent quant à la politique dendettement des ménages marocains et éviter les excès ! Il faut que les produits consommés soient le fruit dune valeur ajoutée marocaine et non pas étrangère, comme a tendance à le montrer le déficit inquiétant actuel de la balance commerciale. Je veux dire par là que nous devons donner priorité à la production et aux entreprises créatrices de valeurs et non pas à la consommation. Quand je parle déquilibre entre secteurs, il faut éviter daccélérer notre passage dun secteur primaire qui, nécessairement, est appelé à diminuer en terme relatif, à un secteur tertiaire de services, sans renforcer au préalable notre secteur secondaire. Nous navons pas encore atteint le niveau de développement de la Grande Bretagne, où le secteur des services, en particulier financier, qui représente 60% de léconomie, a aggravé la crise économique dans ce pays ! Nous devons préparer des emplois à une population de plus en plus nombreuse qui viendra des campagnes et qui est souvent illettrée, et cest surtout le secteur industriel qui pourra lui donner du travail, particulièrement dans la construction et les branches qui lui sont affiliées. * F. N. H. : Pensez-vous que le taux de croissance prévu pour cette année est réalisable ? * M. B. : Un taux de croissance de 4.50% en 2009 est possible. Il est dun niveau significatif par rapport au taux de croissance mondial attendu de 0,20%. Mais il faut se mobiliser pour latteindre, car il me semble que cette année sera très mouvementée sur le plan international et nous en sentirons les effets. Les prix des phosphates, qui ont sauvé notre balance commerciale en 2007 et 2008, ont commencé à baisser, comme toutes les autres matières premières. Nous aurons beaucoup de difficulté à maintenir nos exportations de produits manufacturés comme je lai expliqué au début, en raison de la récession chez nos partenaires. Le secteur touristique a déjà commencé déjà à enregistrer une baisse dans la mesure où les réservations pour le trimestre prochain ont baissé de 25 %. Mais il y a aussi des éléments positifs : les économies qui pourraient être réalisées sur les prix du pétrole et des céréales au niveau des charges de compensation pourraient être réorientées vers des programmes dinvestissement en infrastructures pour renforcer les capacités de résistance et de compétitivité exportatrice de notre tissu industriel. Il y a aussi les perspectives dune bonne récolte dont les revenus irrigueront notre économie au cours du 4ème trimestre de cette année. Enfin, si au niveau du bâtiment de luxe on a atteint une certaine saturation, il me semble quau niveau de lhabitat social la demande, avec larrivée sur le marché de 100.000 ménages chaque année, restera vive et sera le moteur principal de la croissance en 2009. Dune manière générale, la croissance économique en 2009 sera tirée principalement par la demande interne. * F. N. H. : Que doit faire lEtat pour que cette croissance se réalise ? * M. B. : Apprécier de manière réaliste et concrète la profondeur de la tempête qui va secouer notre économie par des enquêtes sur le terrain. Les études trimestrielles publiées par nos institutions ne reflètent pas toujours la réalité complexe de notre économie : je sais par exemple combien souffre actuellement le secteur informel qui fait travailler tant de monde Suivre le mouvement, anticiper la tempête qui arrive et préparer la contre-attaque ! Par un plan de relance ou de consolidation si on ne veut pas réutiliser les mêmes termes quen Occident : accélérer les programmes dinvestissements publics, autoroutes, assainissements des quartiers industriels, aides aux entreprises sinistrées, quitte à ce que les déficits publics dépassent certains seuils ! Les politiques économiques et monétaires sadaptent avec les circonstances Si on ralentit les programmes dinvestissement, on précipitera larrivée de la crise dans notre pays ! Il y a aussi pour notre pays des opportunités : des entreprises en difficulté en Europe qui pourraient être transférées au Maroc à des prix intéressants ! Car en définitive, la crise a fait baisser les prix des actifs à un niveau très bas et cest aussi le moment dinvestir pour ceux qui ont des liquidités ! Il faut imaginer un système par lequel les banques marocaines, avec le soutien de lEtat, pourraient aider les entreprises marocaines à acquérir des entreprises européennes, dont lactivité est complémentaire. Je pense que beaucoup dentreprises en Europe seraient intéressées par ce deal dans la mesure où cela améliorait leur coût et leur flexibilité, ce qui les rend plus concurrentielles au moment de la reprise. Mais lEtat doit rester aussi vigilant quant à la situation financière des entreprises marocaines exportatrices car, cest certain, elles sont appelées à souffrir des difficultés de trésorerie de leurs clients. * F. N. H. : Donc, il y aurait bien des répercussions de la crise sur le système financier marocain ? * M. B. : Répercussion sur le système financier marocain, probablement, mais pas directement ! Au moment où la crise internationale affecte dabord les institutions financières et bancaires, leffet de contagion sur notre système bancaire reste assez limité et cela grâce à la non-libéralisation totale des mouvements de capitaux Larticle 8 des statuts du FMI auquel nous avons adhéré ne concerne que la convertibilité de notre monnaie au niveau des opérations courantes de la balance des paiements. On na pas non plus de marché hypothécaire en matière de créances immobilières, ni ces produits financiers qui ont été la cause de tant de dégâts aujourdhui. Notre système bancaire est relativement sain : très peu de dépôts à létranger et pratiquement pas de créances toxiques. Cependant, il y a quelques indicateurs de dérapage : laugmentation vertigineuse des crédits à la consommation et au logement à laquelle on assiste ces dernières années, la spéculation immobilière qui en résulte, la spéculation boursière avec une envolée des cours des actions sans relation avec les fondamentaux des entreprises quelles représentent. Tout cela montre quon assiste à une déconnexion progressive des flux financiers de la sphère réelle. Combinée au ralentissement économique de certains secteurs dactivité et aux difficultés financières qui en résultent, elle pourrait se traduire par des problèmes de trésorerie et des problèmes financiers. En définitive, chez nous, cest la crise économique qui pourrait conduire à une crise financière, si on ne prend pas les mesures dadaptation nécessaires. * F. N. H. : La refonte du système financier international fera lobjet dune rencontre du G 20 en mars, à Londres. Quelle est, daprès vous, lutilité dune pareille rencontre dans le contexte actuel ? * M. B. : La crise actuelle est une crise systémique et sinscrit dans le processus de la mondialisation. Cette mondialisation a renforcé linterdépendance entre les économies et à lintérieur dune même économie, entre les différents secteurs. Je le répète, tout est lié ! Le monde est devenu solidaire : même le pays le plus capitaliste du monde est marié désormais avec le pays le plus communiste du monde ! En conséquence, aucun pays ne peut mener sa politique de manière indépendante : on a besoin de se concerter, déchanger ses informations, ses expériences et surtout de coordonner ses politiques Car une politique coordonnée crée des synergies et permet, comme un peuple uni et motivé, de mieux affronter lennemi : ici la crise qui touche tous les pays. En plus, nous sommes dans un monde dimages et de signes : la reprise sera effective quand la confiance reviendra ! Car la crise actuelle est aussi une crise de confiance ! On a vu combien la fraude, le mensonge, la spéculation effrénée ont marqué ces dernières années Conséquence des changements de valeurs dont jai parlé tout à lheure. Alors, la communauté internationale doit se réunir, montrer sa solidarité, créer un climat de coopération et de volonté pour affronter la crise et créer un climat de confiance. Cest son rôle de lancer des messages aux opérateurs et aux consommateurs ! * F. N. H. : Cette interdépendance des économies ne représente-t-elle pas un risque pour le Maroc ? * M. B. : Quand on ouvre son économie, on prend un risque, mais on peut aussi bénéficier dopportunités. Cette interdépendance signifie quon se trouve dans un train conduit par une locomotive qui peut nous tirer si on sait y faire Regardez ce qui sest passé sur le plan régional au cours des 30 dernières années avec lUnion européenne, lAsean et lAlena. Chaque développement sest effectué sur une base régionale sous leffet dune locomotive; t sur le plan global, il y a toujours une région qui joue le rôle de locomotive. Je pense dailleurs que le processus de mondialisation est appelé à renforcer les développements régionaux et, sans cette interdépendance, il n y aura pas de développement ! Cette interdépendance fait aussi que les cycles économiques sont devenus systémiques; les crises se transmettent de pays à pays et cest pourquoi nous en subirons les effets à notre mesure, en descente et en montée. Lhistoire nous enseigne quaprès la crise, il y a toujours la reprise : il faut donc savoir profiter des opportunités de la crise et choisir le bon moment pour investir. * F. N. H. : Est-ce également le bon moment dinvestir, particulièrement en Bourse ? * M. B. : Cest vrai quen matière dinvestissement en Bourse, comme dans tout autre investissement, il faut savoir quand il faut entrer et aussi quand il faut sortir. Mais le plus important est dêtre très regardant au niveau des fondamentaux des sociétés cotées. Quand on spécule, parce que certaines valeurs augmentent sans rapport avec leur rendement, on doit sattendre à des surprises. Je naime pas la spéculation même si elle peut faire partie du caractère humain. Mais je pense que sur le long terme, on est gagnant si on dresse un équilibre homogène entre les objectifs de rentabilité, de liquidité et de sécurité. Ceci dit, il faut reconnaître que la Bourse de Casablanca na pas subi le désastre des Bourses internationales car elle est relativement fermée. Et en raison des faibles opportunités de placement pour les épargnants, les perspectives pour les valeurs ayant de bons fondamentaux sont, dans la situation actuelle, intéressantes. Noublions pas que sur le long terme, la rentabilité des placements boursiers est supérieure à celle des placements en trésorerie. On na quà se rappeler des augmentations des cours en 2006 et 2007. * F. N. H. : Certains prévoient la reprise de léconomie mondiale à fin 2009, dautres pour 2010. Quen dites-vous ? * M. B. : Je pense que lannée 2009 sera extrêmement perturbée parce que, pour beaucoup de pays occidentaux, la crise est encore devant eux. La mondialisation a renforcé le climat dincertitude et personne ne peut dire ce qui va se passer dans les mois à venir Pour linstant, on continue de découvrir des trous, alimentés par des scandales en série; on continue de voir les gouvernements patauger pour trouver des issues On continue denregistrer un mouvement de récession et les milliards de dollars qui se dépensent actuellement demandent beaucoup de temps pour produire leurs effets. Ceci se reflète à travers leffet yoyo des Bourses internationales. Je pense que cette crise sannonce plus brutale que les précédentes, mais quavec les mesures de restructuration en cours, (car une crise a toujours un effet thérapeutique), avec les investissements en flexibilité qui ont eu lieu au cours des 15 dernières années, avec la réactivité et la coordination des politiques économiques en cours, la reprise pourrait être aussi brutale et imprévisible. Cest la nature du monde daujourdhui.