* Les experts en conclave à Marrakech. * Objectif : tirer les enseignements quil faut de la crise financière. * Une crise qui cautionne un nationalisme rampant. En ayant donné trop de pouvoir aux marchés financiers, cest le système financier international qui sest effondré, mettant à nu ses horribles faiblesses. Si les experts sévertuent encore à décrypter les causes de cette crise sans précédent, il nen reste pas moins quactuellement, lon continue à sinterroger sur limpact, la profondeur et la durée de ce capharnaüm financier quil sera difficile denterrer dans la trappe de lhistoire de la finance mondiale. Sans quaucune réponse viable ne puisse être trouvée. Aussi, à défaut de trouver les bonnes réponses à la problématique actuelle à laquelle est confronté le système financier, sévertue-t-on, faute de mieux, à au moins tirer les bons enseignements de cette débâcle financière. Comme le disait si bien Oscar Wilde, «lexpérience est le nom que lon donne à ses erreurs». Des erreurs que vont essayer certainement de décortiquer les différents acteurs qui se retrouveront en conclave le 29 mai prochain à Marrakech, à loccasion du Symposium international organisé par Bank Al-Maghrib sous le thème : «Le rôle des banques centrales et du FMI dans la détection et la gestion des crises financières : leçons de lexpérience récente». Outre la présence du gouverneur de BAM, Abdellatif Jouahri, cette manifestation sera relevée par la présence du Directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn, du président de la BCE, Jean-Claude Trichet, ainsi que de différents gouverneurs de banques centrales et présidents dinstitutions financières aux plans africain, arabe, européen Sil faut convenir que cette rencontre ne suffira pas à changer la face du monde financier, elle devrait servir tout au moins à interpeller les consciences collectives sur les dangers dune régulation permissive qui a eu pour corollaire la crise financière et économique que lon connaît aujourdhui. Avec son lot de faillites, de perte demplois, de suicides Force ou faiblesse ? Sil est admis que le Maroc est plutôt victime, au niveau de léconomie réelle, des dommages collatéraux provoqués par la crise, son système financier a, à maints égards, été épargné. Grâce aux mécanismes de régulation institués par Bank Al-Maghrib et qui ont permis de tenir éloigné le marché des capitaux des effets contagieux du virus de la crise. Aujourdhui, au vu des dégâts causés par cette interconnexion outrancière des différents marchés financiers, lon se surprend à se glorifier du fait que le Maroc ait été en retrait par rapport au processus de modernisation galopante de la sphère financière internationale. Un mal pour un bien ? Pour cet expert-comptable, «le fait que le Maroc ait été épargné tient aux mécanismes de régulation en place, avec notamment la protection liée à la réglementation de change, les règles prudentielles instituées par Bank Al-Maghrib, mais également labsence de produits sophistiqués comme ceux titrisés». Faut-il alors se réjouir de ce protectionnisme ? «Il est clair quen période de crise, tous ces mécanismes réglementaires sont un atout en soi; cependant, en période normale, cela constitue plutôt une faiblesse, surtout dans un contexte mondialisé», ajoute-t-il, soulignant que «le Maroc ne peut se soustraire aux développements du système financier international, dautant plus que la crise est une exception et non une règle». Mieux, conclut-il, «en labsence de produits structurés, les filiales des multinationales installées au Maroc ont ainsi tendance à rapatrier leurs excédents de trésorerie vers leur maison-mère en vue de placements plus lucratifs». Pour cet analyste, «cest maintenant que la communauté financière apprécie à sa juste valeur tous les mécanismes de régulation mis en place par Bank Al-Maghrib». «Cest cette régulation draconienne de BAM qui a permis dimmuniser en quelque sorte le système financier; il ne sert à rien douvrir les vannes sans pour autant mettre au préalable tous les instruments daccompagnement nécessaires pour prévenir contre tout événement imprévu. Et il faut surtout se demander si le marché est suffisamment mâture pour accueillir certains types de produits, alors même que lon na pas encore fini de verrouiller totalement le système pour faire face à lusage abusif des failles réglementaires», conclut-il. Mais alors, jusquoù peut-on aller dans la régulation ? Le processus de modernisation de léconomie nationale peut-il faire léconomie dun développement du marché financier en phase avec les standards internationaux ? En fait, il faut trouver le juste milieu. Reste à pouvoir, justement, le définir. Quel avenir pour le système financier international ? La politique initiée par les pouvoirs publics résistera-t-elle assez longtemps à lappel dun système financier mondialisé à outrance ? Cest à voir. En tout cas, Bank Al-Maghrib a des arguties à faire valoir dans un contexte où, justement, il est question de ne plus signer des chèques en blanc aux cols blancs. Car cest lune des premières étapes de la redéfinition en profondeur des mécanismes du système financier, laquelle cautionne, subrepticement, la résurrection des remparts du nationalisme qui se dresse, désormais, devant un capitalisme qui a perdu le nord Mais quand daucuns prônent des modèles économiques basés sur le «nationalisme», dautres se veulent plus subtils en préconisant un «nationalisme intelligent», pendant que certains brandissent tout court les «dangers du nationalisme». Il va falloir, néanmoins, trouver le bon compromis. Ou plutôt le modèle sur lequel sérigera durablement le paysage financier international. Peut-être bien que nous aurons des éléments de réponse à lissue du symposium de Marrakech.