Passionné de cyclisme, Khalid Aboubi explore et documente l'histoire des rues et des quartiers de sa ville natale, Marrakech. Il partage anecdotes et réflexions sur les réseaux sociaux, faisant part de son engouement pour le passé de la cité ocre, ainsi que pour la préservation du patrimoine local. Pour ce faire, il s'appuie à la fois sur la recherche et sur le folklore. Il connaît chaque recoin de la médina de Marrakech. Né et élevé dans le Mellah, le quartier juif historique de la cité ocre, Khalid Aboubi s'est donné pour mission d'explorer et de documenter les rues centenaires qu'il connaît si bien. C'est d'ailleurs à bord d'un moyen de transport pratique et très apprécié de nombreux riverains dans la ville que Khalid parcourt les ruelles étroites et les quartiers emblématiques de la médina. Le temps d'une virée à bicyclette, il fait part de ses réflexions sur l'histoire derrière chaque nom de rue et chaque repère. Sur les réseaux sociaux, il publie des vidéos qui permettent aux visiteurs de découvrir les sentiers cachés de la ville. Par la même occasion, il propose aux Marrakchis vivant à l'étranger une immersion nostalgique dans la cité qui leur tient tant à cœur. A travers son initiative, Khalid allie deux de ses champs de prédilection : le vélo et l'Histoire. «Depuis 2011, j'ai eu comme loisir de faire de la bicyclette. C'était inévitable, comme tout natif de Marrakech, on grandit dans une maison avec un vélo», confie-t-il à Yabiladi. Une combinaison entre deux passions La documentation des rues et des quartiers de la ville a commencé en 2012. A travers une page Facebook qu'il a créée, Khalid s'est mis à publier des photos et des vidéos de ses visites dans la cité ocre. Au début, ses vidéos étaient silencieuses, avec de brèves légendes donnant des informations sur les lieux qu'il visitait. Face à l'enthousiasme grandissant de ses abonnés, curieux d'en savoir plus sur l'Histoire derrière chaque quartier, Khalid a mieux élaboré son projet. «Dans mes premières vidéos, je ne parlais pas. Je me contentais de parcourir les quartiers en ajoutant de courtes légendes. Mais au fil du temps, j'ai commencé à raconter le passé des lieux que je travers», nous dit-il. Depuis, Khalid fait des vidéos où il raconte ainsi l'histoire de chaque rue et de chaque quartier qu'il traverse, en racontant même des événements et des anecdotes historiques. Ses réflexions reflètent à la fois sa passion pour la riche connaissance de la ville, ainsi que son dévouement à ses recherches. «Les informations que je partage sur les rues et les quartiers de Marrakech proviennent de mes propres recherches, principalement dans des livres d'Histoire», souligne-t-il. En plus des sources livresque, Khalid s'appuie sur l'héritage oral, ou la mémoire populaire, à travers «des amis, des habitants de la ville et parfois même de des abonnés». «Je veille également à enregistrer les échanges dans lesquelles des célébrités ou des personnalités de Marrakech partagent des souvenirs de leur enfance dans différents quartiers», a-t-il ajouté. «Marrakech a une histoire riche. La plupart des quartiers portent le nom de walis (saints soufis), de savants, de scientifiques ou de métiers, comme Souk Semmarine, Souk Nejjarine, ou encore de tribus, comme Derb Doukalla et Derb Demrane.» Khalid Aboubi Des rues riches d'histoires Questionné par Yabiladi sur l'histoire la plus intrigante qu'il ait découverte, le natif de Marrakech a raconté celle de la tombe d'une femme nommée Lalla Mimouna Tagnaout. «Cette sépulture se trouve au milieu de la rue, presque comme un rond-point. Elle était là bien avant la route. Quand le plant de réaménagement a été élaboré, ce repaire a été laissé intact», nous dit-il. Selon une légende locale, lorsque les autorités tentaient de déplacer le tombeau, les équipements se brisaient, les ouvriers tombaient malades ou étaient paralysés. «Bien sûr, cela reste une légende populaire», a ajouté Khalid, rappelant que cette sépulture se trouve devant Bab Dbagh, l'une des portes historiques de la médina de Marrakech. En effet, les tombes recèlent souvent des histoires fascinantes, surtout à Marrakech. Khalid évoque ainsi une autre, celle d'une femme nommée Fatima. «C'était la fille d'un homme important de la dynastie saadienne. On raconte qu'un sultan voulait l'épouser, mais qu'elle a refusé», nous raconte-t-il. Le sultan a emprisonné alors le père de la défunte, morte célibataire, après avoir consacré sa vie à enseigner le Coran aux autres femmes à Marrakech. A quelques encablures du café Koutoubia, près de la place Jamaa Lefna, se trouvent deux autres tombes à l'histoire singulière. «L'une est orientée vers la Mecque, comme le veut la tradition funéraire musulmane, mais l'autre non», dit Khalid. Il explique que l'un des hommes a été enterré sous deux dynasties différentes : les Almoravides et les Almohades, qui «ne partageaient pas la même qibla». En plus de ses connaissances sur l'Histoire des rues de la ville, Khalid montre aux touristes les itinéraires les plus faciles pour atteindre les monuments connus de la ville. Lorsqu'il se promène à vélo dans Marrakech, il porte également des t-shirts sensibilisant à la sécurité routière, au respect des cyclistes et au dépistage précoce du cancer du sein. Malgré une longue lutte contre la maladie, Khalid reste déterminé à documenter l'Histoire des rues de Marrakech. Il espère un jour compiler ses découvertes dans un livre, préservant ainsi les histoires et l'histoire qu'il a soigneusement rassemblées pour sa ville bien-aimée.