* Le plan durgence ne répond pas aux interrogations de plus en plus soulevées par un grand nombre dopérateurs économiques. * Cest dans ce sens que le CMC a proposé la mise sur pied dun pacte national pour la croissance. * Ce cadre aiderait à une mise en cohérence de tous les plans sectoriels dont la dispersion ne favorise pas lefficacité. * Pas dinquiétude pour le secteur financier si les règles prudentielles continuent à être appliquées avec rigueur par BAM. * Ces dernières années, la demande interne a été déterminante dans le cycle de croissance qua connu le Maroc. * Point de vue de Habib El Malki, président du Centre Marocain de Conjoncture. - Finances News Hebdo : Vous avez évoqué, lors de la 19ème rencontre du CMC, limportance de disposer dune vision globale et non de plans sectoriels, certes porteurs mais isolés les uns des autres. Alors, dans quelle mesure le plan durgence ne reproduirait-il pas ce même schéma ? - Habib El Mlaki : Nous considérons que le plan durgence est un point de départ. Les ajustements ne sont pas conjoncturels, ils sont, par définition, structurels eu égard à la nature de la crise. Alors que le plan durgence est fondamentalement conjoncturel et très limité. Il concerne trois secteurs : textile, sous-traitance automobile et secteur du cuir. Il est aussi limité dans la durée (six mois), avec une certaine conditionnalité. Cest un plan qui a le mérite dexister mais qui ne répond pas aux interrogations de plus en plus soulevées par un grand nombre dopérateurs économiques. Nous avons procédé à une enquête dopinion auprès de toutes les fédérations professionnelles représentatives de notre économie, suite à laquelle nous avons constaté que la perception de la crise est très profonde, de manière générale. Cest pour cela quil faut faire face à la crise autrement. Et cest dans ce sens que nous avons proposé la mise sur pied dun pacte national pour la croissance. - F. N. H. : Comment imaginez- vous ce cadre et quelles seraient ces missions ? - H. E. M. : Ce serait un cadre mobilisateur de toutes les parties concernées, de tous les acteurs aussi bien publics que privés Un cadre qui aiderait à une mise en cohérence de tous les plans sectoriels que nous considérons comme une avancée dans le domaine des politiques sectorielles du Maroc. En effet, ces plans touchent à tous les secteurs vitaux, mais la dispersion ne favorise pas leur efficacité. - F. N. H. : Une sorte de fil conducteur de tous ces plans - H. E. M. : Ce pacte sera une manière dexprimer une vision claire et cohérente et une stratégie économique. Le Maroc ne dispose pas dune telle stratégie. Autant le pays a enregistré des avancées importantes en matière de politiques sectorielles, autant il ny a pas de politique économique. Cest pour cela que la définition dun pacte national pour la croissance reste un impératif. - F. N. H. : Ce nest quen ce mois de février quun plan durgence a été mis en place pour faire face à une crise dont les prémices ont été visibles il y a des mois déjà. Pensez-vous que le gouvernement sy est pris tardivement ? - H. E. M. : Nous étions les premiers à réagir, dès lautomne de lannée passée, en attirant lattention sur les incidences de la crise mondiale sur léconomie nationale. Mais aujourdhui, nous sommes fortement confortés dans notre diagnostic dil y a cinq mois. Mieux vaut tard que jamais. Le plus important est la prise de conscience et la capacité de réagir et de préparer laprès-crise. - F. N. H. : Ne pensez-vous pas que cette crise finira par avoir un impact su notre système financier ? - H. E. M. : Pour le moment, du côté secteur financier, il ny a pas dinquiétude majeure. Car notre système financier est plutôt domestique au sens anglo-saxon du terme. Même sil a connu des ouvertures sur lAfrique ou au Maghreb, ce nest pas pour autant un système internationalisé. - F. N. H. : Mais les effets de la crise ne peuvent-ils pas latteindre du côté économique ? - H. E. M. : Pas dans limmédiat et pas si les règles prudentielles continuent à être appliquées avec beaucoup de vigilance et de rigueur par Bank Al-Maghrib. Je ne pense pas quil y aura de dérapage de ce côté. - F. N. H. : Dans cette crise, la demande interne a joué un rôle moteur, mais pensez-vous que la Loi de Finances 2009 et surtout les mesures de soutien au pouvoir dachat ont été suffisantes pour soutenir davantage ce rôle ? - H. E. M. : Je crois que tout le monde devient de plus en plus conscient que, pour se développer, le marché intérieur est appelé à jouer un rôle moteur. Et ces dernières années, la demande interne a été déterminante dans le cycle de croissance qua connu le Maroc. Cest ce que nous avons toujours défendu dailleurs, et cela est devenu lun des fondements de la doctrine économique du Centre Marocain de Conjoncture. Pour stabiliser la croissance, une croissance équilibrée et pour réduire les chocs externes, le marché intérieur joue un rôle extrêmement important. Et certaines mesures contenues dans la Loi de Finances 2009 vont dans ce sens. - F. N. H. : Est-ce que vous êtes pour un retour en force du rôle de lEtat pour rétablir quelque peu léquilibre dans les marchés qui se sont libéralisés à outrance ? - H. E. M. : Dans ce domaine, il ny a pas de position dogmatique. Dans les pays capitalistes développés, les Etats ont démissionné de leur rôle de régulateur et ont transféré une grande partie de leurs prérogatives aux marchés. Et je crois que ce quil faut incriminer ceux sont plus les Etats démissionnaires que le marché qui est devenu hégémonique.