* Un bilan désastreux causé par les pluies diluviennes. * Un projet de loi relatif à lassurance contre les risques de catastrophes naturelles bloqué au SGG depuis plusieurs années. * Le Maroc demeure dépendant des aides pour lassistance aux sinistrés. Une année agricole exceptionnelle. Cest le moins que lon attend après les fortes précipitations qui se sont «abattues» sur le territoire national ces dernières semaines. Ces averses qui, au début, ont apporté du baume au cur des responsables qui craignaient le pire dans un contexte de crise internationale, alimentent désormais les craintes et les suspicions. Et pour cause : les importants dommages matériels et les pertes en vies humaines provoquées par les fortes pluies. Les plaies des pluies torrentielles du mois doctobrene sont quà peine cicatrisées que lon parle dores et déjà de nouveaux dégâts. Sont encore fraîches dans nos mémoires les usines sinistrées. Résultat : un lourd passif avec des millions de DH évaporés et des milliers de chefs de famille au banc des sans emploi. Cette semaine encore, les dégâts provoqués dans la région du Gharb-Chrarda-Beni Hssen par le débordement de lOued Beht sélèvent, à eux seuls, à 2.252 maisons inondées et 328 partiellement endommagées. Selon le département de Chakib Benmoussa, 189 maisons se sont effondrées et des centaines de familles se sont retrouvées sans abri. Aussi, au niveau de lensemble de la région du Gharb, près de 50.000 hectares sont saturés deau. Une véritable «hécatombe» à gérer, surtout en labsence dune couverture dassurance adéquate. Pour autant, les chiffres publiés par le ministère de lIntérieur ne permettent pas une lecture objective de la réalité. Parce que, souvent, les dommages provoqués par une catastrophe naturelle, telle que les inondations, sont difficiles à évaluer et leur coût savère exorbitant. La notion de catastrophe naturelle se caractérise par lintensité anormale dun agent naturel (inondation, tremblement de terre, sécheresse ) lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages nont pu empêcher leur survenance ou nont pu être prises. Cest ce qui explique dailleurs son coût faramineux. La nécessité pour lEtat dapporter sa garantie à travers une entreprise publique, à savoir le réassureur national, simpose dès lors. Régime obligatoire vs Fonds de soutien Au Maroc, le projet de loi relatif aux catastrophes naturelles est toujours dans les tiroirs du Secrétariat Général au Gouvernement. En chantier depuis 2003, suite aux attentats terroristes de Casablanca, il avait été soumis, en décembre 2006, au SGG. Il sagit dun projet dont les risques y afférents intègrent les inondations, les tremblements de terre, les tsunamis, en plus des actes de terrorisme. Et ce sont les dernières inondations du mois doctobre qui ont constitué un déclencheur pour la relance du projet qui a nécessité une étude préalable facturée à 5 MDH. «Laccélération de la procédure nest pas pour déplaire ni aux compagnies dassurance ni aux opérateurs économiques nationaux et étrangers qui réclament, depuis plusieurs années, la réglementation de cette garantie», annonce A. Zinoun, Administrateur délégué de la SCR. Lapport de ce projet est double : le texte introduit dabord le principe de la souscription obligatoire dune assurance et, au-delà, permettra lélargissement du portefeuille clientèle pour un secteur qui évolue encore très largement en dessous du potentiel du marché. Létude générale a été faite par le réassureur national et les projets de loi ont été rédigés en collaboration avec la Direction des assurances et de la prévoyance sociale. Il a été enfin approuvé par les ministères des Finances et de lIntérieur ainsi que par la Fédération des assurances. Une fois ledit projet validé, il a été transféré au SGG. La SCR a initié un tel projet parce quelle estime que, dans un premier temps, cest le réassureur national qui devra couvrir lintégralité du risque avec la garantie de lEtat. Les compagnies dassurance prendront une part limitée des risques et le risque dans sa globalité sera réassuré par la SCR. Le reste sera réassuré à létranger. LEtat naura donc pas à intervenir. Aujourdhui, et à lheure des inondations, ce projet va-t-il enfin sortir des tiroirs ? Rien ne filtre pour le moment. «Le projet est toujours bloqué au niveau du SGG. Plusieurs réunions ont été programmées entre le directeur de la DAPS et le ministre des Finances et on sattend, comme de coutume, à ce que le projet soit présenté au Conseil du gouvernement, mais rien ne se fait», annonce M. Hilali, chef de la division réassurance au sein de la DAPS. Même son de cloche chez A. Zinoun qui, à son tour, narrive pas à trouver une explication aux raisons sous-jacentes à ce blocage. «Ce projet se veut structurant pour le développement socio-économique du pays parce quil aurait permis lindemnisation des victimes des récentes inondations», explique notre source de la DAPS. Il sagit dun projet comprenant deux volets : lassurantiel, qui concerne les détenteurs dune police dassurance. Ce compartiment stipule quune seule prime sera appliquée à lensemble des contrats dassurance sauf pour laviation et le maritime (tarification libéralisée). En cas de sinistre, lassuré serait indemnisé aussi bien pour lui-même que pour ses biens, selon les capitaux couverts au niveau de la garantie de base. Le second volet concerne les assurés non-détenteurs dune police dassurance. Ces derniers vont surtout bénéficier dun fonds de solidarité. Appelé Fonds de solidarité nationale pour la couverture des risques de catastrophes naturelles, il sera financé par lexcédent du Fonds de solidarité des assurances (FSA) dont la finalité est de faire face à de gros problèmes, notamment les faillites et les difficultés financières. A noter quen tant que président de la Fédération des compagnies dassurance et de réassurance afro-asiatiques (FAIR), le réassureur national a mis en place pour lensemble de lAfrique un pool de risques catastrophiques qui seront gérés par les Indiens. Donc, si demain le Maroc adopte ce régime obligatoire, il va céder une partie de ces risques à ce pool et au marché international de lassurance. Ceci étant, en attendant lentrée en vigueur du projet de loi, lEtat est appelé à puiser dans ses réserves. Lors des dernières inondations, un fonds de solidarité de 2 Mds de DH cofinancé par le Fonds Hassan II et lArabie saoudite a été mis à la disposition des populations sinistrées. Mais jusquà quand continuerons-nous à fonctionner de cette manière ? Les pouvoirs publics sont appelés à faire preuve daudace et à promouvoir le projet parce que, souvent, la solidarité nationale nest pas suffisante.