Farid Mezouar, co-fondateur du site financier Flm.ma, a l'habitude, depuis le début de cette année, de nous livrer sa lecture et ses anticipations des données fondamentales du marché actions. Durant l'été, il avait déclaré que les résultats semestriels seraient globalement haussiers, tout en étant volatils d'un secteur à l'autre. Il a vu juste. Nous lui donnons la parole pour commenter ce semestre et «se mouiller» sur le futur proche du marché. Finances News Hebdo : Tout d'abord, comment qualifiez-vous le cru des résultats au 1er semestre ? Farid Mezouar : Il s'agit d'un bon cru, avec une hausse des bénéfices dépassant les 3%. Hors Maroc Telecom, ce chiffre frôle même les 10%. Aussi, le chiffre d'affaires global s'est amélioré de près de 6%, traduisant une reprise de l'activité des sociétés cotées. De plus, plusieurs grandes capitalisations comme BMCE (+52%), Holcim (+41%) ou la Samir (+57%) ont affiché des hausses à deux chiffres. Mon seul regret est relatif au fait que la période d'annonce est trop étalée (presque 45 jours), ce qui rend parfois inaudible, pour le grand public, la séquence d'annonce des résultats. F.N.H. : Pourtant, le non courant a contribué à la performance de plusieurs de ces entreprises, surtout bancaires... F. M. : De manière générale, je juge que le non courant fait partie de la vie courante des entreprises. Ceci est d'autant plus vrai pour les groupes dont les activités sont de plus en plus complexes, avec une vie sociale animée. Par ailleurs, le retraitement des résultats n'est possible que s'il est opéré par une personne indépendante, établissant de la même manière pour toutes les sociétés ce qui est non courant. Aussi, la comparaison du CA et/ou de l'EBE sert justement à démêler l'évolution de l'activité de la profitabilité. Pour revenir aux banques, il est normal que certaines aient bien profité de la baisse des taux au niveau de leurs salles de marché ou que d'autres aient été pénalisées par un niveau élevé du risque. Rappelons enfin que la croissance de la masse bénéficiaire globale s'est faite malgré la contre-performance de certaines grandes capitalisations comme IAM (-13%), Managem (-29%) ou Addoha (-14%). F.N.H. : Peut-on donc dire, dès à présent, que l'année sera bonne ? F. M. : Normalement, 2014 pourrait marquer une inflexion positive pour la Bourse, car certains résultats semestriels sont déjà supérieurs et/ou proches des résultats annuels 2013 (exemple de la Samir ou JLEC). Aussi, normalement, les cimentiers (Ndlr : grand contributeur à la capacité bénéficiaire de la cote) peuvent bénéficier de la réduction de la baisse du marché de ciment (estimation de -3% contre -4,4% au premier semestre). F.N.H. : Faut-il alors s'attendre à de meilleurs rendements cette année ? F. M. : Pour le rendement, vu que les entreprises cotées n'ont pas de gros programmes d'investissement ou d'expansion, la hausse des résultats devrait se retrouver dans les dividendes et dans le retour aux investisseurs. F.N.H. : Le Masi dépasse les 10% de performance depuis le premier janvier. Est-ce justifié compte tenu des dernières données fondamentales ? F. M. : Tout à fait. La reprise des résultats des sociétés cotées, malgré un environnement global peu propice, a stimulé le marché actions. Celui-ci devrait aussi théoriquement être stimulé par la baisse du taux directeur qui préfigure d'une politique accommodante «à la marocaine». Aussi, la baisse du niveau absolu des taux devrait améliorer la prime de risque du marché actions. Enfin, sauf accident, le marché devrait accueillir la privatisation par voie de Bourse de Marsa Maroc. Une telle privatisation est positive pour le marché car les ratios de valorisation des sociétés privatisées sont souvent plus attractifs. F.N.H. : Une cible en tête pour le marché ? F. M. : Contrairement à d'autres marchés qui ont presque retrouvé leur niveau de 2008, la Bourse de Casablanca est encore à un niveau de 35% plus faible que les plus hauts de cette période. A titre d'exemple, la Bourse égyptienne affiche une performance de plus de 50% sur un an glissant et a presque recouvert son niveau initial. Ainsi, un retracement haussier du Masi à 11.500 points me parait une première cible réaliste. F.N.H. : Vous avez l'habitude de nous parler du secteur qui vous a le plus séduit sur un semestre. Qu'en est-il cette fois ? F. M. : Je retiens le secteur du ciment. En effet, malgré un marché atone sur plusieurs années et l'immixtion d'un cinquième opérateur, les marges nettes oscillent toujours entre 20% et 30%. Aussi, les sociétés continuent d'investir solidement en capacité et en productivité. De même, la fusion Lafarge/Holcim pourrait optimiser les actifs, voire ouvrir la voie à une consolidation de fait dans ce marché.