Le langage des chiffres ne semble pas avoir calmé la grogne des Casablancais exprimée sur les réseaux sociaux, à travers les pétitions lancées ou encore le projet d'une marche contre l'insécurité. Face à la psychose alimentée par des faits divers inédits, il faut surtout rassurer la population et prendre des mesures durables à même de garantir la sécurité des citoyens et apaiser leur colère. La télévision marocaine balance la sauce en plein journal de 12H45 : arrestation à Casablanca de jeunes qui se qualifient de «mcharmlines» ou se revendiquant de ce phénomène «tcharmil». Dos à la caméra, un jeune arrêté est présenté comme un «Caïd». Et comme ça tombe ce mardi 1er, on aurait pu croire au poisson d'avril si le sujet n'était pas sérieux et si nos enfants, nos parents, nos voisins ne subissaient des agressions tous les jours. Les explications de la police relatives à ce phénomène sont pour le moins peu convaincantes. Ainsi, les autorités se sont confondues dans un communiqué qui souligne que les photos présentant le butin de malfrats et exhibées fièrement sur les réseaux sociaux seraient le pur fruit de trucage. Dès lors quel serait le motif d'interpellation de ces jeunes ? Apologie du crime ? Peut-être, étant donné que beaucoup de jeunes peuvent être influencés par ces pages qui fleurissent depuis le début d'année. Aussi, les administrateurs de ces pages seraient-ils des agents qui complotent pour le compte d'on ne sait qui. Toujours est-il que truquées ou pas, ces photos, largement relayées par les médias, ont contribué à créer une psychose dans la ville «blanche». En effet, les habitants assistent de plus en plus à des faits divers spectaculaires et inédits, et parfois même très sanglants malheureusement. Entre la mise à sac d'une agence bancaire, en passant par un salon de beauté sans oublier les pauvres citoyens pris à partie individuellement, les Casablancais ont été stupéfaits qu'une horde de jeunes armés ait pu attaquer les joueurs du WAC en plein entraînement, sans être inquiétée par la police ! Tout ce lot pour le seul mois de mars, autant dire que les nerfs des Casablancais ont été mis à rude épreuve. Force est de reconnaître qu'après la série noire d'agressions perpétrées à Casablanca, la grogne des habitants de la ville était fortement palpable ... sur Internet. Et comme un malheur ne vient jamais seul, les habitants ont été fortement secoués par un fait divers très médiatisé du décès de Farida Berrada, victime d'un jet de parpaing à l'entrée de la ville. Des palliatifs ? Des jets de pierres des ponts surplombant les routes sont monnaie courante et il aura fallu ce décès tragique pour que des agents de police ou de gendarmerie selon les zones, trois exactement, soient postés sur les ponts qui surplombent routes et autoroutes, du moins dans la région du Grand Casablanca. Mais qu'en est-il sur le long terme ? Face au sentiment d'insécurité, qu'il soit réel ou exacerbé par les informations diffusées sur le net ou dans la presse au point qu'une marche contre l'insécurité soit en préparation à Casablanca, n'aurait-il pas été plus opportun de rassurer et de soutenir même cette marche pour apaiser la population ? Comment la police peut-elle recouvrer la confiance des citoyens ? On apprend aussi que plus de 500 arrestations ont eu lieu en deux jours seulement au niveau du Grand Casablanca. Information qui a aussitôt fait le tour de la toile et a suscité de vives réactions. Car en réalité, l'opinion publique est divisée sur la question. Entre ceux qui prônent un traitement répressif de la délinquance. D'ailleurs, une pétition appelant à couper la main des voleurs a même été mise en ligne (sic). Et ceux qui estiment que la criminalité demeure dans sa proportion normale et appellent à plus de modération dans l'appréhension de ce phénomène «tcharmil» auquel adhèrent des jeunes issus de quartiers défavorisés et pour qui c'est une tendance tout à fait naturelle ayant eux-mêmes évolué dans des milieux assez violents. Il ne s'agit pas là d'un parti pris, mais bien d'un débat qui divise la société casablancaise sur le rôle que jouent les disparités sociales dans l'accentuation de phénomènes pareils. La police, elle, n'a pas à se poser ces questions, mais plutôt y répondre en assurant la sécurité des uns tout en préservant les droits des autres.