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Assurance crédit: «Nous prévoyons au Maroc une augmentation des risques d'insolvabilité»
Publié dans Finances news le 17 - 03 - 2021

La double crise sanitaire et économique a mis l'économie marocaine à rude épreuve.
Dans cet entretien, Lionel Piquer, CEO Coface Maghreb, Afrique de l'Ouest et centrale, nous livre ses prévisions sur les perspectives économiques régionales, et donne le détail sur le nouveau rôle du bureau Coface Maroc dans la stratégie du Groupe.

Propos recueillis par B. Chaou


Finances News Hebdo : Par quoi se distingue l'accompagnement en faveur de vos clients au Maroc durant cette période de crise ?
Lionel Piquer : La crise sanitaire et économique que nous traversons depuis presque un an pèse sur l'économie mondiale. L'économie marocaine a été mise à rude épreuve. Le rôle de la Coface est de soutenir nos clients. Toutes nos équipes se sont mobilisées pour accompagner nos clients. Nous avons renforcé le dialogue et la proximité avec nos assurés et, surtout, fait preuve d'adaptabilité vis-à-vis d'eux en leur accordant des mesures de flexibilité.
Parmi elles, le délai des déclarations de menace de sinistre a été allongé de 60 jours et nous avons accepté, pour les situations les plus critiques, que le paiement des primes soit décalé. Pour 2021, nous restons optimistes avec une prévision de rebond du PIB à 4% au Maroc (contre +4,3% au niveau mondial), notamment grâce au développement des vaccins et au déploiement de la stratégie vaccinale au niveau mondial. Mais nous prévoyons également une augmentation des risques d'insolvabilité, conséquence des effets de la crise. En couvrant les entreprises, notamment les PME et ETI (Entreprise de taille intermédiaire), contre le risque de défaillance de leurs clients partout dans le monde, l'assurance-crédit joue un rôle économique essentiel.

F.N.H. : Le niveau de risque a augmenté suite à cette double crise sanitaire et économique. Quelles sont donc vos appréciations sur le risque actuel ? Et quelles sont vos perspectives ?
L. P. : L'Afrique a relativement été épargnée par le Sars-CoV-2 comparée aux autres continents en 2020, mais sur le plan économique, les conséquences ont été dramatiques. Avec une estimation d'un taux de croissance mondial en 2020 de -3,8%, le déclin de la croissance économique de l'Afrique subsaharienne devrait se traduire par un recul du PIB de 3,3%. L'effondrement du cours des matières premières et de la demande a été néfaste pour une grande majorité des économies africaines très dépendantes des exportations de matières premières. Les pays africains dépendants des exportations de pétrole subissent la baisse des cours du brut qui reste au niveau le plus bas. La fermeture des frontières a également eu un lourd impact sur les économies très tournées vers le secteur du tourisme. Dans la plupart des pays occidentaux, des plans de soutien à l'économie ou de relance ont été déployés par les Etats.
Malheureusement, en Afrique, peu de pays sont en mesure de mettre en place des aides similaires pour limiter les effets de la crise. Pour 2021, nous prévoyons un rebond du PIB en Afrique subsaharienne à +2,5% contre +4,3% au niveau mondial. Les secteurs suivants devraient néanmoins rester porteurs en 2021 en Afrique occidentale et centrale : les télécommunications (essentiellement distribution et service de téléphonie mobile), du fait du maintien d'une certaine distanciation physique/sociale et de l'essor continu des paiements et de la banque en ligne. L'agriculture de subsistance et d'exportation, par nécessité pour la première, et à cause de la fermeté de la demande alimentaire mondiale pour la seconde, avec, en plus, la fin des problèmes d'approvisionnement en engrais et semences, grâce à la levée progressive des restrictions de transports. La sylviculture, du fait de la demande soutenue en matière de bois de construction pour les logements individuels, notamment en provenance de la Chine, mais également des économies avancées et émergentes dont les ressources ne sont pas suffisantes et qui optent pour l'importation d'Afrique. La distribution pharmaceutique, évidemment, du fait de la lutte contre la pandémie.

F.N.H. : Quels sont les pays de la région les plus impactés, et qu'en est-il du Maroc ?
L. P. : Les effets de la crise devraient être plus limités dans des régions comme l'Afrique de l'Est, moins dépendantes des exportations de matières premières. En revanche, les effets seront plus importants dans les pays de l'Afrique centrale, plus vulnérables face à la chute des cours du pétrole. Globalement, les pays les plus dépendants des matières premières et du secteur du tourisme sont les plus impactés. Pour exemples : l'Afrique du Sud, avec un déclin du PIB de 8%, a été fortement impactée par la crise économique à cause de sa dépendance aux revenus pétroliers, d'un endettement public élevé (83% du PIB en 2020) et d'un déclin des exportations vers les économies avancées (automobile).
De même, la Tunisie connait un déclin de 9%, un endettement public élevé (89%), une baisse des exportations vers les économies européennes (textile et habillement, automobile, aéronautique), et un fort impact sur le secteur du tourisme. Vient ensuite le Congo avec un abaissement de 8% de par une forte dépendance au pétrole. Il y a aussi le Maroc, avec une chute de 7% : les exportations vers les économies européennes (automobile, aéronautique, textile et habillement) ont fortement baissé et le tourisme n'a pas été épargné. 2021 reste une année incertaine, remplie de défis multiples. La relance économique dépendra également de la maîtrise de la réussite de la campagne de vaccination à l'échelle mondiale.

F.N.H. : Comptez-vous poursuivre votre développement en Afrique ou marquer un «standby» à cause de la crise actuelle ?
L. P. : Coface entend poursuivre son développement à l'échelle panafricaine pour accompagner les entreprises résilientes à la crise dans le développement de leurs activités domestiques et à l'export. En effet, l'Afrique représente un débouché économique prometteur pour les investisseurs, avec un haut potentiel de croissance et d'innovation. Supporté par le plan stratégique «Build to Lead» du Groupe Coface, notre objectif est d'atteindre une position de leader en Afrique en accélérant la transformation culturelle et métiers de Coface.

F.N.H. : Quel sera dorénavant le rôle du bureau Coface Maroc dans le déploiement de votre stratégie régionale ?
L. P. : Coface opère dans plusieurs pays du Maghreb, de l'Afrique de l'Ouest et centrale sur les métiers de l'assurance et du service. Nous avons une équipe de 75 personnes, dont 45 basées au Maroc. 70 personnes travaillent également sur ce site, sur le Shared Services Center de nos clients internes (France, Italie, Angleterre). De par sa taille critique, le bureau du Maroc est l'interlocuteur privilégié du Groupe Coface pour la zone Afrique. Il représente un hub à partir duquel nous mobilisons nos experts et nos partenaires pour optimiser la qualité de service offerte à nos clients, et se différencier grâce à notre expertise en matière de risques et d'information. Ce hub permet de générer des synergies business et opérationnelles.


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