Le barème progressif de l'impôt sur les sociétés adopté dans le cadre de la loi de finances pour 2019 a été appliqué aux bénéfices réalisés par les sociétés au titre de l'exercice 2018, comme l'explique la note circulaire de la DGI publiée sur son site. Cette administration s'est basée sur l'article 163-II-A du code général des impôts qui prévoit une date d'effet pour l'application des nouveaux taux et qui n'a jamais été pris en considération. En effet, la note circulaire précise que : « L'impôt sur les sociétés est calculé au taux en vigueur à la date d'expiration des délais de déclaration du résultat fiscal prévus aux articles 20, 150 et 155 du CGI en application des dispositions de l'article 163-II-A du CGI ». C'est encore plus clair dans la note circulaire tome II de la DGI qui présente des exemples pratiques de calculs : « Les sociétés qui, en vertu des dispositions de la loi de finances 2018, devraient payer l'IS au titre des exercices ouverts à partir du 1er janvier 2018, selon le barème progressif comportant le taux intermédiaire de 20% sont désormais éligibles, au titre desdits exercices, à l'imposition selon le nouveau barème progressif comportant un taux intermédiaires de 17,5%.» Quel est l'intérêt de ce changement et à qui profite t-il ? De plus, dans toutes les lois de finances précédentes, depuis l'institution de l'IS et pour chaque changement de taux d'imposition prévus à l'article 19-I-A du CGI, la date d'effet précisée dans la loi de finances est rédigée ainsi «Le nouveau barème progressif (ou taux) s'applique aux bénéfices réalisés, au titre des exercices ouverts à compter du 1er janvier de l'année. A titre d'exemples on peut citer : * La loi de finances pour 2016 : « Les dispositions de l'article 19-I–A du code général des impôts, telles que modifiées et complétées sont applicables au titre des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016 » ; * La loi de finances pour 2018 : « Le nouveau barème progressif s'applique aux bénéfices réalisés au titre des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2018 ». Cependant, ce barème n'a donc jamais été utilisé puisqu'on lui a substitué celui de 2019 pour les bénéfices réalisés en 2018. Pourtant, après la position singulière adoptée par la DGI en 2019, nous assistons à un revirement dans le projet de loi de finances pour 2020. Ainsi, on revient au principe de fixation de la date d'effet initiale, applicable depuis l'institution de l'IS. Il est donc précisé dans ce projet que : « Les dispositions de l'article 19-I-A du CGI, telles que modifiées et complétées.... sont applicables au titre des exercices ouverts à compter du 1er janvier 2020 ». Alors comment expliquer le changement, volontaire ou involontaire, de logique en 2019 ? Une omission de date d'effet dans le projet de loi de finances, qui n'a été relevée ni par le Secrétariat Général du Gouvernement au moment du montage du projet, ni par nos Représentants (des deux Chambres) lors des débats et du vote au Parlement ? Ce manque de vigilance donne la possibilité à la DGI de s'approprier le pouvoir en matière fiscale. Pourquoi cette pirouette en 2020 et peut-on encore parler de légalité de l'impôt ? Par Zaya Mimoun Docteur en droit public