Ecrit par Imane Bouhrara | Avec une récolte prévue de 15 millions de tonnes de blé, la plus mauvaise ces 7 dernières années, l'Argentine va-t-elle décider de retarder les expéditions à ses clients notamment le Maroc ? Le gouvernement argentin planche sur des mesures qui devraient être annoncées prochainement. Après que la Russie a annoncé se retirer de l'accord sur les exportations de grains ukrainiens, les cours du blé et du maïs ont bondi ce lundi. Et comme une aussi mauvaise nouvelle n'arrive jamais seule, l'Argentine, 7e producteur exportateur de blé au niveau mondial, a révisé à la baisse ses prévisions de récoltes pour la campagne 2022-2023, en raison d'une sévère sécheresse qui réduit les rendements et qui devrait impacter également les volumes d'exportation. L'Argentine est le troisième fournisseur de blé au Maroc après l'Ukraine et la France (aux alentours de 8 à 10%) et sa part devait augmenter à l'instar de la France, pour compenser l'embargo sur le blé Ukrainien. Autant dire que c'est n'est pas une bonne nouvelle. En effet, la Bourse de commerce de Rosario qui tablait sur une récole de 19 millions de tonnes de blé en juillet dernier, a actualisé ses pronostics à la baisse puisqu'elle prévoit désormais une récole de 15 millions de tonnes de blé seulement, soit plus 5,5 millions de tonnes en moins que pour la récolte de 2021-2022. Le souci de l'approvisionnement intérieur pourrait pousser le gouvernement argentin à prendre des mesures soit de retardement des expéditions de blé vers ses clients dont le Maroc fait partie, soit de les annuler. Selon des médias, c'est la première option qui serait actuellement à l'étude par le gouvernement argentin qui devrait annoncer des mesures très prochainement. Selon une source de la chambre d'exportation de céréales d'Argentine (CEC), citée par Reuters, ces mesures seraient publiées « dans les prochains jours » pour permettre aux entreprises de reprogrammer les exportations de blé convenues sans faire face à l'amende normale de 15% des autorités. « Si le gouvernement veut le faire, qu'il le fasse maintenant, car nous devons faire demi-tour et parler aux clients en Indonésie, au Maroc, en Algérie, en Egypte et leur dire que notre blé a brûlé et renégocier ces contrats », a déclaré à Reuters la source de la CEC. Ces décisions attendues interviendront dans un contexte de tensions sur les prix et l'approvisionnement de blé, sur fond de sécheresse dans les principaux pays producteurs qui viennent s'ajouter à l'impact de la guerre en Ukraine. Le Maroc qui a renforcé ses importations de France mais également du Brésil, doit se préparer à faire face à une nouvelle envolée des prix à l'international du blé, denrée de base dans le pays et dont la récolte nationale a été déduite de plus des deux tiers en raison de la sécheresse. Le gouvernement doit également prendre en considération l'importance de renforcer les stocks dans un contexte empreint de beaucoup d'incertitude notamment en soutenant les opérateurs du secteur, notamment en épongeant les arriérés dus aux importateurs. Hormis la sécheresse, une révision du modèle agricole doit être opérée en urgence pour favoriser les cultures de base afin de renforcer l'indépendance du Maroc des aléas des marchés mondiaux et renforcer sa sécurité alimentaire. D'autant que, selon une note de la Banque mondiale, la guerre en Ukraine modifie la physionomie des échanges, de la production et de la consommation des produits de base, ce qui devrait maintenir les prix à des niveaux élevés jusqu'à la fin de l'année 2024, aggravant ainsi l'insécurité et l'inflation alimentaires. [Exclusif] Blé tendre importé : avec plus de 4,5 Mds de DH d'arriérés, l'approvisionnement est-il menacé ?