Un médicament utilisé jusqu'à maintenant comme traitement anticancéreux pourrait potentiellement permettre de soulager les douleurs chroniques et remplacer l'usage de certains opioïdes, selon les résultats d'une étude de l'Université canadienne de Calgary, publiés dans « The Journal of Clinical Investigation ». L'étude, menée par le professeur Christophe Altier, associé en physiologie et pharmacologie à l'Université de Calgary, et son équipe pour essayer de comprendre les mécanismes de la douleur, a été menée sur des souris et des tissus humains. « Notre étude consistait à regarder de manière globale toutes les molécules produites par les nerfs. On s'est alors rendu compte que l'une d'entre elles jouait un rôle important dans cette communication de la douleur chronique au cerveau », explique le professeur. Cette molécule, connue de prime abord dans les pathologies cancéreuses provoquant, par exemple, la croissance des tumeurs dans le cerveau ou les poumons, entraînerait cette douleur persistante, dite chronique, selon l'étude. Cette découverte a aussi permis au groupe de scientifiques de rapidement avancer dans ses recherches, puisqu'un traitement médicamenteux a déjà été développé pour contrer les effets de cette molécule dans le contexte de cancers. « Le plus complexe, après la découverte […] d'une molécule, c'est de chercher un antagoniste. Là, le traitement existe déjà, donc après de nombreuses études fondamentales, ça pourrait assez rapidement aller vers des essais cliniques », a souligné pour sa part le professeur Serge Marchand, associé en neurophysiologie à l'Université de Sherbrooke. Pour le professeur Altier, la corrélation était presque évidente : si ce médicament a un effet sur la molécule dans les pathologies cancéreuses, il peut en avoir un sur la douleur chronique que celle-ci provoque. « Nous avons décidé de l'essayer [sur un modèle animal afin de voir s'il permettait de soulager vraiment la douleur », détaille le scientifique. Les résultats sont alors inespérés. « On s'est rendu compte qu'il marchait très bien ». En effet, à très faible dose – inférieure à celle qui est utilisée pour le traitement clinique du cancer -, le médicament serait analgésique et efficace sur les douleurs dites inflammatoires, a-t-il assuré. « Pour l'instant, ce médicament marche bien face aux douleurs liées à l'inflammation. Maintenant, on aimerait aussi savoir s'il est efficace face aux autres types de douleurs, telles que [les douleurs] neuropathiques », conclut le professeur Altier.