Laensar et Haddad sont en lice pour le poste de secrétaire général du MP. Les tensions sont très vives, y compris au sein du groupe parlementaire. Après 28 ans à la tête du Mouvement populaire, Mohand Laensar a un challenger sérieux pour le prochain congrès, prévu dans quelques semaines. Lahcen Haddad, le ministre du Tourisme se présente au nom d'une idée du rajeunissement, de la mobilité transgénérationnelle. Mohand Laensar défend son bilan. Il a réussi l'opération de réunification du parti, a sauvegardé son influence et en a fait un élément important de la coalition gouvernementale. C'est une élection qui est un exercice normal en démocratie, sous toutes les latitudes. Mais chez nous, cela prend des tournures de pugilat. Les députés de l'UMP ont reçu une missive qui s'attaque à l'actuel secrétaire général. Il y est accusé de despotisme, de favoritisme, d'avoir mal négocié lors du replâtrage du gouvernement puisqu'il a quitté l'intérieur pour un mini ministère. Cette lettre provient probablement d'un département ministériel, puisque les timbres utilisés sont ceux habituellement réservés aux ministères. Laensar trouve le procédé bas et réclame à l'envoyeur de ne plus se cacher derrière l'anonymat et de se présenter à visage découvert pour défendre ses positions. Procès en cours Halima Assali, qu'on présente comme la femme de fer du parti, réclame la démission de Haddad de son poste de ministre, moyen de punir son ambition, alors qu'il n'a fait que présenter sa candidature, droit consacré par la loi sur les partis. Du coup, la préparation du congrès est émaillée d'incidents. Ainsi, le responsable de la région du grand Casablanca a quitté une réunion réservée au mode de désignation des congressistes. Il dénonce une volonté de minimiser la participation des Harakis de Casablanca au congrès. Le nombre de places de congressistes proposé lui paraît « humiliant » pour les militants de la capitale économique. Mais il tient à préciser, comme pour balayer toute accusation, qu'il n'a aucun lien avec le courant de Lahcen Haddad et qu'il est pour le maintien de Laensar. Au sein du groupe parlementaire, une altercation a eu lieu qui s'est terminée par une plainte auprès du procureur. Elle a eu lieu en pleine réunion du groupe, alors que l'ordre du jour concernait le travail législatif et non pas le congrès du parti. Pourtant, on aurait pu avoir un débat d'une autre tenue. Le Mouvement Populaire a pendant longtemps représenté l'arrière-pays contre les élites citadines. Ses barons avaient tous leurs bastions en rase campagne, étaient des notables ruraux. Mais cela n'est plus vrai aujourd'hui. Les mutations sociologiques ont renforcé sa présence dans les villes. Il gère plusieurs communes urbaines et a géré pendant 10 ans Rabat-Salé. Il s'est montré attractif vis-à-vis de cadres ambitieux qui l'ont rejoint lors de ces 20 dernières années. Son programme libéral est toujours marqué par la référence au monde rural. Il fait siennes les avancées sur l'Amazighité, alors qu'il n'en faisait pas un combat. La continuité avec Laensar ou le changement avec Haddad, le duel aurait été plus intéressant s'il était question de deux visions programmatiques différentes qui s'affrontent en toute transparence. Ce n'est pas le cas et on ne peut que le déplorer. Des mutations profondes attendent les structures partisanes si elles veulent se moderniser. La plus importante c'est la démocratie interne. Il est détestable de voir une compétition électorale se transformer en pugilat, en contestations, en anathèmes. Or, c'est le cas dans tous les partis qui ont changé de chef.