Challenge Hebdo : pourquoi le CDVM n'a-t-il pas réagi après que la bourse a chuté lundi et mardi dernier? Des enquêtes ont-elles été menées pour se pencher sur ce qui s'est réellement passé? Dounia Tâarji : le CDVM n'a pas pour mission de veiller à la hausse permanente de la bourse, aussi, nous n'avons aucune raison de réagir si elle monte ou si elle baisse. Notre rôle, c'est de nous assurer que les règles sont respectées, et ce n'est que par rapport à cela que nous intervenons. Ceci dit, nous examinons systématiquement, tous les jours, les transactions boursières pour rechercher d'éventuels comportements délictueux, et c'est ce que nous faisons pour les séances de la semaine dernière. C.H. : qu'est-ce qui, à votre avis, a pu déclencher cette mini crise? D.T. : nous nous attendions à une correction du marché depuis plusieurs semaines, car le marché était surévalué. Maintenant, il était impossible de prévoir la date de cette correction, ni son ampleur. Parmi les éléments qui pourraient expliquer qu'elle se soit produite la semaine dernière, on peut citer les suivants : - Depuis début septembre, les particuliers ont cédé leurs parts d'OPCVM, notamment actions, car ils avaient besoin de liquidités (ramadan + rentrée), et les OPCVM se sont retrouvés vendeurs sur le marché pour rembourser les épargnants. - Le climat de marasme qui pèse depuis plusieurs semaines sur le secteur immobilier, surtout l'immobilier résidentiel haut de gamme, sachant qu'une partie importante de la croissance de la bourse provient des valeurs dudit secteur immobilier. - La conjoncture internationale qui pèse sur la psychologie des épargnants : même si nos banques sont à l'abri des faillites enregistrées ailleurs dans le monde, on peut imaginer que les épargnants marocains ne se sentent pas très rassurés lorsqu'ils écoutent les informations internationales, et que cela pèse sur leurs décisions d'investissement. - La conjoncture internationale a aussi eu pour conséquence que certains intervenants étrangers ont vendu leurs titres sur notre marché parce qu'ils devaient solder leurs positions. Entre le 15 et le 17, les étrangers ont effectué 25% des ventes, ce qui n'est pas négligeable. - Pour certains émetteurs, et notamment Addoha, la baisse fait que les cours ont atteint les seuils bas autorisés dans les programmes de rachat, aussi les émetteurs ne pouvaient plus racheter leurs titres, d'où un phénomène d'accélération de la baisse. C.H. : les allégations contre CFG sont-elles prouvées (vente à découvert, incitations à la vente des clients de Dar Tawfir) ? Que risque CFG si les accusations s'avèrent exactes? D.T. : je ne peux certainement pas confirmer cela, à ce stade, nous n'avons rien relevé de tel. Pour CFG, la vente à découvert est pratiquement impossible pour les clients particuliers et pour ceux qui passent par la bourse en ligne, car quand un client a ses titres en dépôt chez CFG, les contrôles automatiques des systèmes bloquent les ordres si la position des titres n'est pas disponible. Nous allons continuer nos investigations et si nous relevons des comportements qui n'ont pas respecté les règles en vigueur, nous prendrons les mesures qui s'imposent. Quant à l'incitation à la vente, effectivement, CFG depuis plusieurs mois recommande à ses clients d'alléger leurs portefeuilles sur plusieurs valeurs surévaluées, et cela fait partie du rôle d'un intermédiaire que de donner son avis à ses clients. Il n'est nullement interdit de considérer que le marché est trop cher et qu'il faut alléger son portefeuille ! C. H. : d'autres informations circulent sur certains délits d'initié commis durant cette même période et qui ont aussi précipité la chute du marché. En avez-vous eu vent? Des enquêtes seront-elles menées? D. T. : je ne vois pas en quoi un délit d'initié pourrait avoir un impact sur l'orientation du marché, car il n'y avait à ma connaissance aucune information privilégiée sur une valeur qui aurait donné un avantage à son détenteur... Maintenant, si quelqu'un a une idée plus claire, je suis preneuse, et de toutes manières, à travers les contrôles que nous opérons, nous recherchons aussi les délits d'initié. ◆