* Le Directeur général du CDVM avoue que les sociétés de Bourse ont eu un comportement non professionnel et non déontologique, mais ont tout de même échappé à la punition à cause du vide juridique régissant ce genre de situation. * Les sociétés de Bourse ne devront plus être les actionnaires exclusifs de la société gestionnaire de la Bourse de Casablanca. Finances News Hebdo : L'affaire des fuites d'informations relatives au carnet d'ordres de la Bourse a abouti à une sanction très lourde, mais justifiée, à l'adresse du Directoire de la Bourse de Casablanca. Le Conseil de surveillance de la société gestionnaire de la Bourse n'a-t-il pas également une part de responsabilité dans cette affaire? Si oui, pourquoi n'a-t-il pas été sanctionné ? Dounia Taârji : Effectivement, certains intervenants du marché auraient du prévenir la Bourse ou le CDVM lorsqu'ils ont eu l'information. Cela relève de l'éthique la plus élémentaire. Malheureusement, ils n'ont pas eu ce réflexe, nous ne pouvons pas les punir car aucun texte n'a prévu ce «devoir d'alerte», mais il est clair que ces intervenants n'ont pas eu le comportement professionnel et déontologique qu'ils auraient dû avoir. F. N. H. : D'aucuns estiment que les sociétés de Bourse se trouvent dans une flagrante situation de conflit d'intérêts. Elles étaient à la fois juge et partie dans cette affaire des fuites d'informations. Sans compter le fait qu'elles étaient depuis toujours clientes et actionnaires de la Bourse! N'est-il pas opportun aujourd'hui de repenser la structure de l'actionnariat de la société gestionnaire de la Bourse de Casablanca ? D. T. : Vous avez parfaitement raison. Nous voyons à présent les limites du système de gouvernance mis en place, qui a fait son temps. Il faut à présent s'attaquer aux questions importantes telles que le mode de gouvernance (faut-il garder un Directoire ?), l'actionnariat (problème du conflit d'intérêts entre des sociétés de Bourse clientes et actionnaires), et le mode de contrôle. La demande de remplacement des membres du Directoire est la première étape dans une démarche de remise à plat des rôles et responsabilités respectifs, mais surtout de réflexion sur la gouvernance et l'actionnariat de la société gestionnaire. Le CDVM et le ministère de l'Economie et des Finances ont inscrit ce point parmi les sujets importants à traiter rapidement. F. N. H. : Le Conseil d'administration du 12 novembre a examiné une proposition d'amendement de la loi régissant le CDVM, visant à modifier son statut en le transformant en personne morale indépendante et dotée de prérogatives renforcées. Cela veut-il dire que le CDVM, au jour d'aujourd'hui, n'est pas indépendant et que ses prérogatives sont faibles? Pouvez-vous nous donner plus de détails sur cette réforme et ses objectifs ? D. T. : C'est une demande récurrente, pour se mettre en ligne avec ce qui se pratique au niveau mondial. Le ministre de l'Economie et des Finances l'a annoncé en juillet dernier, le chantier est lancé à présent. Concrètement, il s'agit d'avoir une autorité, personne morale publique à l'instar de Bank Al-Maghrib, présidée par son Président nommé par Dahir pour un poste à temps plein. Le Président ne serait donc ni le ministre des Finances ni aucun membre du gouvernement. Il s'agit donc bien d'une indépendance par rapport à l'exécutif qui est envisagée. Par ailleurs, les prérogatives en terme de pouvoir de sanction seraient renforcées, afin de donner plus d'efficacité à cette instance, et donc lui permettre de mieux remplir sa mission.