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Quand Macron décide de construire son mur à lui !
Publié dans Challenge le 21 - 12 - 2023

D'une autre façon, plus subtile, la France a commencé la construction de son mur contre la migration. Suscitant plusieurs indignations, cette loi est perçue comme une victoire de l'extrême droite et son discours du grand remplacement.
En octobre dernier, ça a été la grosse annonce controversée aux USA, l'humaniste Biden, et sa fraction politique qui étaient des opposants farouches au projet de construction du mur à la frontière avec le Mexique, sont revenus sur leur position. Cédant aux discours de l'extrême droite, le démocrate de 80 ans, candidat à sa réélection, a dit qu'il ne « pouvait pas interrompre » le financement engagé par le milliardaire républicain, faute d'avoir pu convaincre le Congrès d'employer ces fonds pour d'autres mesures. Dans la même période, la Maison Blanche avait annoncé la reprise de vols directs d'expulsion vers le Venezuela pour les immigrés en situation irrégulière, interrompus depuis des années.
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En France, récemment nous avons assisté à une autre victoire de l'extrême droite. La galaxie en marche a elle aussi décidé de lancer la construction de son mur, à sa manière. Au soir de sa réélection, le 24 avril 2022, le Président français, alors défenseur des migrants, déclarait : « Je sais aussi que nombres de nos compatriotes ont voté ce jour pour moi, non pour soutenir les idées que je porte, mais pour faire barrage à celle de l'extrême droite. Et je veux les remercier ici et leur dire que j'ai conscience de ce que ce vote m'oblige pour les années à venir. Je suis dépositaire de leur attachement à la République, et du respect des différences qui se sont exprimées ».
Tel un camouflet, ce rétropédalage fait tache d'huile sur les grandes valeurs humanistes portées par la France et, par ricochet, remet en cause le projet républicain universaliste depuis Robespierre. Dans le cercle de l'extrême droite c'est une victoire « idéologique ». Marine Le Pen a salué le projet de loi sur l'immigration mardi 19 décembre peu avant son adoption avec le soutien de son parti.
Le mur de la France en marche !
Le Parlement a finalement adopté, mardi soir, le projet de loi sur l'immigration, 349 députés ayant voté pour, 186 ayant voté contre, la majorité absolue se situant à 268. Dans ledit texte, les prestations sociales sont au centre : La question d'une durée minimale de résidence en France pour que les étrangers non européens en situation régulière puissent toucher des prestations sociales a failli faire capoter les tractations. Alors que la droite réclamait un délai de cinq ans pour ouvrir le droit à une large liste de prestations « non contributives », le compromis scellé mardi dernier est basé sur une distinction entre les étrangers selon qu'ils sont ou pas « en situation d'emploi ». Pour certaines prestations sociales, un délai de cinq ans est ainsi prévu pour ceux qui ne travaillent pas, et de trente mois pour les autres. Pour l'accès à l'aide personnalisée au logement (APL), qui constituait le principal point d'achoppement, une condition de durée de résidence est fixée à cinq ans pour ceux qui ne travaillent pas, et à trois mois pour ceux en situation d'emploi. Ces nouvelles restrictions ne s'appliquent pas aux étudiants étrangers, ni aux réfugiés ou aux titulaires d'une carte de résident.
Caution étudiants
La droite a obtenu l'instauration, sauf dans certains cas particuliers, d'une caution à déposer par les étrangers demandant un titre de séjour « étudiant », visant à couvrir le coût d'éventuel « frais d'éloignement ». Les Macronistes avaient pourtant combattu cette mesure qui constituait à leurs yeux « une rupture d'égalité » entre étudiants et risquait de fragiliser les étudiants internationaux. Dans le monde universitaire, les voix de contestations ne se sont pas fait attendre. Les présidents de plusieurs universités parisiennes, parmi lesquelles Paris 8 Vincennes-Saint Denis, Nantes Université, La Sorbonne, Paris Sciences et Lettres, Paris Cité, Paris 1 Panthéon–Sorbonne, rejoints par d'autres présidents d'universités à Strasbourg, Toulouse, Bordeaux, Lyon et Aix-Marseille, pour n'en citer que ceux-la, ont fait part de «leur vive inquiétude» et déplorent que «la version proposée à cette heure vienne s'attaquer aux valeurs sur lesquelles se fonde l'université française». Ces valeurs sont, rappellent-ils, «celles de l'universalisme, de l'ouverture et de l'accueil de la libre et féconde circulation des savoirs, celles de l'esprit des Lumières». Par ailleurs, poursuivent-ils, «appliquer de façon généralisée et sans possibilité d'exonération la majoration des droits d'inscription pour les étudiantes et étudiants extra-communautaires aurait un effet particulièrement délétère sur le nombre, l'origine géographique et la situation sociale des étudiants pouvant venir étudier en France. Cela reviendrait également à mettre en cause l'autonomie des universités quant à leur stratégie d'accueil et de rayonnement international».
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Dans ces mesures, jugées «indignes» de la France, et au-delà des sérieuses entorses faites au principe d'humanisme cher aux universités françaises, les auteurs du communiqué voient la mise en danger de «la stratégie d'attractivité de l'enseignement supérieur et de la recherche française», et une nuisance considérable à «l'ambition de faire de notre pays un acteur majeur de la diplomatie scientifique et culturelle internationale».
Des tensions de toute part
Le projet de loi immigration déchire depuis le début de la semaine la galaxie en marche. Après de longues et difficiles heures de tractations, l'accord sur un texte trouvé ce mardi par les députés et sénateurs en commission mixte paritaire (CMP), avec le soutien du RN, a mis le feu aux poudres dans la majorité présidentielle, l'opposition de gauche mais aussi au sein du gouvernement. Alors que le texte a été voté au Sénat puis à l'Assemblée nationale, les ministres Aurélien Rousseau (Santé), Sylvie Retailleau (Enseignement supérieur) et Patrice Vergriete (Logement) ont menacé de démissionner. Pour le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon, « le nouveau macronisme a pris le train piloté par l'extrême droite » et la loi immigration « défigure l'image de la France ». Les opposants à ce texte ont également reçu le soutien du Medef, par la voix de son patron Patrick Martin, qui a souligné que l'économie française aurait « massivement » besoin de « main-d'œuvre immigrée » dans les prochaines décennies. Parallèlement, une cinquantaine d'associations, syndicats et ONG, dont la Ligue des droits de l'Homme, dénoncent le texte « le plus régressif depuis au moins 40 ans » en France.


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