L'espace artistique casablancais Bassma Art Gallery organise jusqu'au 2 avril 2013 une exposition autour du papier. Il est peint par de redoutables plasticiens à l'aura international. A dix mille dirhams pièce pour des 50X50 cm, la galerie entend «démocratiser» les signatures de plasticiens à la renommée bien assise. L'opération ainsi imaginée se glisse dans les entrailles d'une cause noble, celle de revaloriser et réhabiliter la matière papier. Les apprentis comme les plus grands artistes ont eu à se frotter à ce matériau initiateur ou, souvent, explorateur. Le papier peint, réduit par la suite à son apport industriellement décoratif, est une école à part entière. De Picasso à Hossein Tallal, en passant par Braque, Ernest et Cherkaoui, tous ces troublants créateurs ont eu des périodes papier, qu'ils peignaient ou apposaient dessus des dessins restés magiques, leur talent en foi première. Ce que propose Bassma Art Gallery, est un titillement de la mémoire, une sorte de regard dans le rétroviseur à dépoussiérer. Le papier, matière conservable, n'est pas forcément un support d'esquisses, une vulgaire surface pour premiers jets. Il est et l'a prouvé par le passé, une terre arable, un terrain délicat, un champ d'action où tous les coups ne sont pas permis. Il faut le prendre par amour, l'amadouer, le draguer furtivement avant de pouvoir «abuser» de lui. Il s'agit d'élaboration avant l'exploitation. Le papier se caresse sans poser de conditions, la toile a besoin de préliminaires. D'autres matières ont besoin de violence : la pierre, le fer, le cuivre et autres alliages issus de ces diverses familles. Le papier est multiple, fils de bonne famille, malléable hors torture de ses aires. Pourquoi parle-je ainsi de lui ? Peut-être parce que dans notre métier, un article est appelé, professionnellement, un papier. ■