L'état d'urgence sanitaire a été décrété hier par le Conseil de gouvernement. Néanmoins, l'article 6 du décret-loi adopté, comprend une disposition en contradiction avec l'une des mesures prises quelques jours avant par le Comité de veille économique. En effet, la 2ème réunion du Comité de veille économique (CVE), tenue le 19 mars 2020, avait adopté plusieurs mesures dont celle afférente à la prorogation des délais de déclaration et de paiement des impôts, avec suspension du contrôle fiscal et des avis à tiers détenteurs (ATD), jusqu'à fin juin 2020, au profit des entreprises ayant réalisé un chiffre d'affaires inférieur à 20 millions de dirham qui représentent plus de 90% des entreprises au niveau national. Or le décret-loi adopté hier pour déclarer et mettre en application immédiate l'état d'urgence sanitaire, comprend une disposition en incohérence totale avec les mesures décidées par le CVE, le 19 mars 2020. En effet, cette disposition, contenue dans l'article 6 dudit décret-loi, prévoit la suspension, jusqu'à nouvel ordre, pendant une période de 30 jours, du 20 mars au 20 avril 2020, de tous les délais prévus par les textes de lois et les textes réglementaires, durant ladite période d'état d'urgence sanitaire. En principe, ce report concerne aussi les délais de déclaration et de paiement des impôts et par conséquent l'article 6 du décret-loi se substitue à la décision prise auparavant par le CVE. Lire aussi : Coronavirus : nouvelles mesures du Comité de Veille Economique Or c'est là une terrible contradiction, dans la mesure où le gouvernement, en décidant de suspendre le paiement des impôts, aux niveaux national et local, risque de se priver de ressources indispensables à la continuité normale des services publics. Au niveau national, les entreprises réalisant un chiffre d'affaires annuel supérieur à 20 millions de dirhams, ne dépassent guère 10.000 entités. Mais elles contribuent à plus de 90% des recettes en matière d'IS, en matière de TVA collectée, et en matière d'IR prélevé à la source (secteur public et semi public non pris en compte). L'Etat, aurait-il, lui aussi, été contaminé par la panique ? En réalité, il s'agit là d'une incohérence chronique due au déficit habituel de coordination au sein du gouvernement, déficit souvent observé en temps normal et malheureusement reconduit en temps de crise.