Dans sa déclaration introductive à la 27e session du mécanisme d'examen par les pairs du Conseil des droits de l'homme, Ramtane Lamamra a brossé un tableau qui a quelque mal à nous rappeler les réalités algériennes. « La démocratisation en Algérie n'est ni un slogan de campagne, ni un caprice d'intellectuels », s'enflamme Ramtane Lamamra dans un effort de faire passer l'organisation d'élections comme un gage de démocratie. Il est manifeste qu'en haut lieu, le pluralisme rime avec le nombre de partis. A l'aune de ce calcul, l'Algérie est effectivement une démocratie. Seulement la réalité est tout autre. Le ministre d'Etat évite de préciser à ses interlocuteurs que le parti FLN dirige l'Algérie depuis plus d'un demi-siècle et que l'écrasante majorité des formations politiques (71 partis agréés) qui viennent crédibiliser les messes électorales n'ont aucune profondeur populaire, ni programme politique ; ils sont essentiellement constitués de larbins qui viennent profiter des deniers publics à chaque scrutin. Arguments éculés, captieux,… à Genève, Ramtane Lamamra a fait montre d'un cynisme ahurissant. Aussi notre ministre se lance dans une tirade empreinte de démagogie la plus pure. Jugez-en : « La tenue régulière et dans les délais fixés d'élections libres et transparentes, la diversité de la composante du Parlement où sont représentés 36 partis et une vingtaine d'indépendants, le fonctionnement démocratique des institutions » est le meilleur signe d'une démocratie viable. Mais Ramtane Lamamra ne s'arrête pas là, il en remet une couche : Le foisonnement de l'expression libre des opinions, le développement prodigieux du mouvement associatif sont la parfaite démonstration du pluralisme en l'Algérie. De quelle Algérie parle le ministre d'Etat devant la commission des Droits de l'Homme ? Qui veut-il berner en accolant des traits d'une démocratie à la nordique à une Algérie où l'expression syndicale est étouffée, les partis d'opposition interdits de réunions. Les déclarations de Lamamra tombent trop mal puisqu'elles arrivent quelques jours après la publication des résultats de législatives particulièrement calamiteux. Bien entendu, pour lui, les refus de demandes d'agrément de partis introduites par Sid Ahmed Ghozali et Karim Tabou, par exemple, sont « de présumées entraves à l'agrément d'associations », soutient le ministre. Les atermoiements que font subir depuis des mois les autorités pour l'octroi d'agrément à la Fondation Afud de Said Sadi sont aussi infondées, si l'on en croit le ministre. Rien de toutes les critiques rapportées chaque jour par la presse. Il n'y a que la vérité que distille le ministre d'Etat qui vaille ! Les syndicats sont libres en Algérie ergote Ramtane Lamamra. Il a ajouté que les libertés syndicales sont exercées par 65 organisations et la tripartite. Toujours mieux, il proclame : Il n'existe pas de délit d'opinion en Algérie, ni de peine privative de liberté pour les professionnels de l'information. Nous sommes tentés de le croire ! Sauf que Ramtane Lamamra a du mal avec quelques réalités qui ont fait réagir les ONG de défense des droits de l'homme notamment. Il n'évoque pas bien sûr les dizaines de militants mozabites en détention préventive depuis deux ans. Les journaux suspendus, d'autres étouffés. Ni le cas de Slimane Bouhafs, encore moins toutes les manifestations de pharmaciens, d'enseignants et de postiers violemment réprimées. A qui veut Lamamra faire croire que l'Algérie est celle qu'il dépeint ? Le Mur de Berlin est tombé. Les informations circulent sur la toile à la vitesse de la lumière. Le ministre des Affaires étrangères devait le savoir !