À peine les débats houleux et infructueux sur la viande halal clôturés, qu'un autre débat très similaire est en train de s'amorcer en France sous la pression de politiques et de certains médias et réseaux sociaux déchaînés : il concerne non seulement, le port du foulard dans les universités, mais le vêtement islamique dans son ensemble et sa compatibilité avec les règles de la République laïque. Relancé tout récemment par le ministre français de l'intérieur, Bruno Retailleau, qui se dit favorable à l'interdiction du port du foulard dans les établissements publics d'enseignement supérieur, le débat a semé le trouble chez nombre d'universitaires et de politiques divisés sur cette mesure qui n'a pas été prise, jusqu'à présent, par le gouvernement, dont la majorité des membres, désapprouve la mise en application du projet qui pointe du doigt la communauté musulmane en premier lieu. Idem pour le syndicat français de l'Enseignement supérieur qui a réagi dans un communiqué : ''Oui à la laïcité mais oui aussi au respect des convictions''. Et aussi pour les Associations musulmanes de France qui fustigent ''une approche teintée d'islamophobie''. Cette question de l'interdiction du port de foulard aux universités n'est pas l'unique source de polémique en France. Un autre débat parallèle concerne le vêtement islamique dans son ensemble (foulards, pantalons, jupes longues, aâbaya et autres articles...). Et la principale source d'inquiétude pour une bonne partie des Français, réside dans cet appétit grandissant pour les couturiers parisiens représentant plusieurs grandes marques internationales, d'orienter leurs ciseaux sur la tenue islamique. Ils n'hésitent plus à lancer des collections pudiques, quitte à créer la polémique sur l'enjeu religieux et financier d'une telle démarche. Derrière cette orientation en masse vers les vêtements islamiques, il y a de l'argent à se faire et les chiffres ont de quoi encourager les maisons de couture en quête de grosses recettes. D'un enjeu économique de taille, le vêtement islamique a représenté en 2023, un marché mondial de plus de 650 milliards d'euros. De quoi susciter l'intérêt pour les stylistes à faire de Paris (capitale mondiale de la mode), un pôle d'attraction en matière de vêtements islamiques pour femmes. Ils ont à cœur d'exercer une véritable séduction sur une catégorie de femmes qui, apparence exige, veulent joindre élégance, tenue pratique et religion. La vision future pour les maisons de modes françaises, est la création d'un marché spécialisé dans la tenue islamique pour permettre aux professionnels de mode de fructifier leurs marques et de valoriser les vêtements, dits de pudeur, pour en faire un véritable créneau socioéconomique. Se servant de matériaux de qualité, les maisons de couture qui portent le cachet islamique commencent à attirer une clientèle de plus en plus large, sachant, qu'il y a quelques décennies, rares étaient les femmes musulmanes de France, y compris nos jeunes marocaines, à porter le vêtement islamique. Aujourd'hui, difficile de ne pas tomber sur une femme dans la rue vêtue du hijab, devenu un signe d'appartenance identitaire, en plus d'un symbole religieux. Et face à l'ampleur que connaît l'habit islamique au niveau mondial, nos Marocaines de France sont aujourd'hui quotidiennement hésitantes entre quel vêtement pudique porter ce matin d'élégant et de pratique à la fois? Cette mode islamique, source de débats contradictoires, a pris des dimensions inquiétantes au sein d'une bonne tranche de la communauté française, qui y voit un phénomène d'asservissement sociétal venu des pays du Moyen-Orient, et du Maghreb. Quoique convaincues de son fondement religieux, nombreuses sont les musulmanes de France qui refusent de porter le vêtement islamique y compris le voile. Elles estiment qu'il est encombrant et enferme la femme comme une prison. D'autres évitent d'adopter ce genre d'habit, de peur d'être étiquetée de sous-cultivée. La polémique en France sur cette tenue islamique s'étale jusqu'à mettre en confrontation deux camps : ceux qui tout en défendant la laïcité, appellent au boycott de ces marques qui s'inscrivent, selon eux, dans le contexte historique de l'esclavage. Et ceux qui se disent relativistes, avec cette conviction que tout se vaut. Là où le débat dérape, c'est quand cette tenue islamique est perçue comme un symbole de vertu et de pudeur pour les uns, ou comme une menace réelle aux valeurs de la communauté française, pour les autres. D'autant que ce débat qui a pris aujourd'hui des proportions alarmantes, intervient alors qu'une réforme pour un islam dépolitisé, modéré, indépendant des influences extérieures, est en cours d'examen à l'Assemblée nationale.