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«L'accord de 1968 est une poule aux œufs d'or pour le régime algérien, la France doit le dénoncer unilatéralement», affirme l'ancien ambassadeur Xavier Driencourt
Lors d'un entretien télévisé, le président Abdelmadjid Tebboune a accusé la France d'avoir perpétré un génocide durant la période coloniale et a remis en question l'importance de l'accord franco-algérien de 1968, le qualifiant de «coquille vide.» En réponse, Xavier Driencourt, ancien ambassadeur de France en Algérie de 2008 à 2012 et de 2017 à 2020, a indiqué, dans un entretien avec Valeurs Actuelles, que «si on renonce à l'accord de 1968, l'Algérie perd la poule aux œufs d'or». L'accord de 1968 a été signé pour définir les conditions de circulation, de séjour et de travail des Algériens en France, et il fait suite aux accords d'Evian de 1962. Ces derniers prévoyaient la libre circulation entre les deux nations, en partie parce qu'on pensait alors que les pieds-noirs demeureraient en Algérie. Cependant, la réalité a été tout autre, et les pieds-noirs ont été contraints de quitter le pays, créant ainsi un vide juridique sur la question migratoire. M. Driencourt souligne que, dans le contexte de l'époque, «la France avait besoin de main-d'œuvre, notamment pour ses industries, et cherchait à faciliter l'entrée des travailleurs algériens. L'accord de 1968 a ainsi établi un cadre juridique permettant aux Algériens de circuler librement entre les deux pays, d'installer temporairement en France et de revenir en Algérie.» M. Driencourt insiste sur le fait que le contexte actuel a fondamentalement changé par rapport à celui de 1968. La question de l'immigration est devenue centrale dans le débat public en France, et les perceptions de l'immigration ont évolué. Les lois sur l'immigration se sont multipliées depuis, mais la spécificité de l'accord de 1968 crée un «angle mort» dans le dispositif législatif français, car il prime sur les lois nationales, a-t-il noté. Face à ces défis, M. Driencourt propose que la France envisage de dénoncer unilatéralement l'accord de 1968 si aucune renégociation ne se profile. Il affirme que ce geste pourrait servir de moyen de pression pour inciter le gouvernement algérien à adopter une approche plus proactive concernant les visas et le retour des Obligations de quitter le territoire français (OQTF). En 2021, l'Insee (établissement français de statistique) a enregistré près de 887 100 ressortissants algériens en France, faisant des Algériens la plus importante communauté étrangère dans le pays. Leur statut migratoire est régi par l'accord de 1968, qui, depuis son adoption, a permis à cette population de bénéficier de conditions d'entrée et de séjour plus favorables par rapport à d'autres nationalités. Ce dispositif, mis en place à l'initiative de la France, visait à répondre à la demande croissante de main-d'œuvre durant les années de forte croissance économique. Dans le cadre du projet de loi sur l'immigration déposé en février 2023 par les ministres Gérald Darmanin et Olivier Dussopt, il a été précisé que les ressortissants algériens ne seraient pas concernés par ses dispositions. Cette exclusion soulève des interrogations, notamment dans le contexte où les Algériens représentent une part significative des étrangers entrant en France par regroupement familial ou visa touristique. Les règles établies par l'accord de 1968, qui font prévaloir le droit des traités internationaux sur les lois nationales, garantissent aux Algériens un accès privilégié au territoire français, leur permettant notamment d'obtenir des certificats de résidence plus facilement que les ressortissants d'autres pays. La jurisprudence administrative a confirmé que les dispositions de l'accord régissent de manière exclusive les conditions de séjour et de travail des Algériens en France. Cette situation, selon une étude de M. Driencourt, crée une anomalie dans le système juridique français, où une partie significative de la population immigrée échappe aux législations récentes sur l'immigration. Les autorités françaises pourraient faire face à des défis politiques si elles ne parviennent pas à maîtriser les flux migratoires, notamment en ce qui concerne les pays du Maghreb. Par ailleurs, le visa, élément central dans la dynamique migratoire algérienne, est perçu comme un symbole d'espoir et de droit, hérité des années de colonisation. Son obtention est cruciale pour les Algériens, qui y voient un moyen d'échapper à une situation économique difficile. En conséquence, le gouvernement algérien défend vigoureusement les dispositions de l'accord de 1968, qui continuent de façonner les relations migratoires entre la France et l'Algérie.