L'escalade de la tension entre l'Algérie et le Maroc, qui s'est déjà traduite par une rupture des relations diplomatique entre les deux pays – décidée le 24 août à l'initiative d'Alger –, a affecté l'Espagne cette année. Fin août, Alger a décidé de rompre ses relations diplomatiques avec Rabat avant de fermer, un mois plus tard, son espace aérien à tous les avions marocains. Les liaisons aériennes entre Casablanca et Alger étant déjà suspendues en raison de la pandémie de Covid-19. Mais le ministre algérien des affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a aussi affiché sa volonté de ne pas renouveler un important contrat lié au gazoduc Maghreb-Europe (GME), qui relie depuis 1996 les gisements algériens à l'Europe via le Maroc et qui arrive à expiration fin octobre. De ce fait, GME a été condamné. «Il y a une inquiétude algérienne sur les avancées diplomatiques marocaines réalisées avec les pays d'Afrique de l'Ouest et son retour en 2017 au sein de l'Union africaine», estime Mohammed Masbah, directeur de l'Institut marocain d'analyse des politiques (Mipa), interrogé par l'agence espagnole EFE, qui a consacré un article sur les dégâts de la rupture Maroc-Algérie sur l'Espagne. Selon les experts, la fermeture de GME affecte également l'Algérie elle-même, qui devient dépendante d'un tube unique avec l'Espagne. «Le gazoduc est une expression symbolique de rupture, mais avec lui l'automutilation se produit. Alger se blesse pour nuire à Rabat», estime M. Masbah. Rivalités régionales L'une des raisons qui a anticipé la rupture entre Rabat et Alger était la normalisation des relations entre le Maroc et Israël en décembre 2020 en échange de la reconnaissance américaine de la souveraineté marocaine sur le Sahara. Alger considère ce rapprochement comme une menace pour sa sécurité nationale, une inquiétude qui s'est accentuée avec la visite à Rabat le mois dernier du ministre israélien de la Défense Benny Gantz, qui a signé un mémorandum de coopération militaire avec ses homologues marocains. Ce contexte de crise se double d'une augmentation des dépenses militaires algériennes : le régime de Tebboune consacre 6% de son PIB à la Défense. Dans ce contexte, et près d'un mois après la mort de trois camionneurs algériens dans un attentat présumé au Sahara que les autorités algériennes ont attribué au Maroc, des questions se posent sur un éventuel affrontement militaire entre les deux pays. D'autres pensent que la tension entre les deux pays va perdurer, compte tenu du manque de canaux de contacts directs et de l'absence de médiateurs : «Les tentatives de médiation initiées par l'Espagne et certains pays du Golfe ont échoué, car ils n'ont pas d'outils à imposer aux deux pays se comprennent», argumente l'expert marocain. Pour M. Masbah, «la meilleure option est maintenant pour les deux de revenir au 'statu quo' précédent et de maintenir la réévaluation des relations à un niveau minimum».