Mercredi 8 septembre, pour la première fois de leur histoire, les électeurs marocains (près de 18 millions) sont appelés à élire simultanément leurs 395 représentants à la Chambre et quelque 31 000 conseillers dans les régions et les communes. «L'objectif de ce triple scrutin – législatif, régional et municipal – est simple : réduire, d'une part, le nombre de déplacements alors que la nouvelle vague épidémique de Covid-19 sature actuellement les services de réanimation des grandes villes et, d'autre part, réduire le taux d'abstention aux législatives, qui était de 57 % en 2016, en profitant de l'intérêt de la population pour les municipales» écrit La Libre Belgique. "Depuis l'alternance, en 2002, c'est-à-dire l'entrée au gouvernement de l'USFP (socialiste) et des partis du bloc national qui n'a pas amené les changements auxquels ses électeurs s'attendaient, les partis ont perdu peu à peu leur crédibilité aux yeux de ceux-ci", explique Jean-Noël Ferrié, directeur de Sciences Po Rabat à l'Université internationale de Rabat, interrogé par le quotidien. «En réalité, en dix ans de pouvoir, le PJD a dû faire beaucoup de compromis, trop pour de nombreux caciques de ce parti hyperconservateur. Surtout, la dernière modification de la loi électorale, au printemps, a beaucoup de mal à passer» rapporte la même source. Pour le quotidien belge, «le Rassemblement national des indépendants (RNI), repris en main en 2016 par Aziz Akhannouch, s'est positionné comme le véritable opposant du PJD. Même si le RNI n'est plus que la quatrième force politique du royaume, celui-ci a contraint en 2016 les islamistes à se plier aux conditions qu'il posait à sa participation à la coalition gouvernementale. Depuis, Aziz Akhannouch s'est donné les moyens de ses ambitions en couvrant, sans exception, toutes les circonscriptions électorales du pays, cette année. PAM ou RNI.» "Tous ces acteurs ont à peu près le même programme de centre droit/centre gauche avec une gestion libérale de l'économie où les orientations royales font consensus", souligne Jean-Noël Ferrié. Le "Nouveau modèle de développement" «est un projet très consensuel que les partis n'auront aucune peine à endosser» rapporte-t-on. "La présence de l'institution monarchique [est] garante du cap défini par la communauté nationale [en l'occurrence la commission nommée par ses soins, NdlR] à côté d'acteurs en compétition démocratique pour esquisser les chemins pour atteindre ce cap", admet la commission dans son rapport. "Bien sûr, les orientations royales font consensus", détaille Jean-Noël Ferrié. RNI-PJD : une guerre sans fin «Il avait promis de ne pas s'impliquer dans la campagne. Finalement, l'ancien Premier ministre et ex-patron du Parti de la justice et du développement (PJD), Abdel-illah Benkiran, s'est dédit. Celui qui fut chef de gouvernement (entre 2011 et 2017) s'est exprimé dimanche, dans la dernière ligne droite de la campagne électorale, à travers une vidéo publiée sur les réseaux sociaux. Il y mène une attaque frontale contre le ministre Aziz Akhannouch, le chef du Rassemblement national des indépendants (RNI), l'un des favoris du scrutin législatif de ce mercredi, se répandant en insinuations sur son succès soudain électoral» et son background politique, indique la même source. «Abdelillah Benkirane y avoue ainsi ne pas comprendre "comment il s'est imposé en tant que candidat à la chefferie du gouvernement", à la suite des législatives de 2016, ni "comment il est quasiment devenu l'homme le plus riche du pays"» rapporte la même source. Le contexte régionale défavorise le PJD. «En Libye, l'influence politique et l'intervention militaire de la Turquie – où le PJD local de Recep Tayyip Erdoğan monopolise le pouvoir depuis deux décennies – se sont étiolées au profit d'un axe adverse constitué par l'Egypte et les Emirats arabes unis, nouveaux partenaires déclarés d'Israël», entre autres coups de boutoir portés à la crédibilité politique des islamistes. Usure du pouvoir «Le PJD est le seul parti d'obédience islamiste à être demeuré dix ans de suite au gouvernement dans un pays arabe. Mais outre l'usure liée à l'exercice du pouvoir, plusieurs facteurs menacent son maintien aux commandes du gouvernement. Sur la scène intérieure, la mise en œuvre de la nouvelle loi électorale pourrait lui être très défavorable. Les législatives de 2021 seront les premières depuis 1960 (date du scrutin inaugural postindépendance) où la répartition des sièges à la Chambre des représentants sera calculée sur la base du nombre des électeurs inscrits et non des votants. Cette nouvelle disposition est supposée doper le taux de participation effectif mais elle risque surtout de privilégier les petits partis au détriment des gros "aspirateurs" de suffrages, dont le premier d'entre eux, le PJD. En vertu de cette nouvelle règle, si le parti islamiste réalisait le même score qu'en 2016, il n'obtiendrait, selon les estimations, que 80 à 85 sièges, contre 125 à l'époque» détaille-t-on.