L'ancien chef du renseignement français Bernard Squarcini a affirmé que le président français en exercice n'a jamais été sélectionné par le Maroc pour une éventuelle mise sous surveillance par le logiciel espion Pegasus. C'est la troisième déclaration qui dédouane le Maroc après celle d'un cadre de NSO ou encore celle du journal espagnol Okdiario. L'ancien directeur de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, devenue depuis DGSI), Bernard Squarcini, a déclaré au journal Le Point «recommander [sur l'affaire Pegasus] la plus grande prudence. On parle d'un domaine souverain des Etats, celui qui est lié à l'activité de contre-espionnage. Cette mission, clandestine par essence, engage la responsabilité des dirigeants au plus haut niveau. On ne dispose aujourd'hui que d'une enquête d'investigation journalistique sur l'entreprise NSO» a-t-il précisé. Un haut responsable du géant israélien de cybersécurité NSO a soutenu la semaine dernière que le président français Emmanuel Macron n'avait pas été ciblé par le logiciel Pegasus. L'authenticité de cette liste polémique et son lien avec le logiciel espion Pegasus ont jamais été établis. Les traces techniques prétendument laissées par Pegasus et qui y ont été trouvées sont peu concluantes. «L'enquête judiciaire technique et internationale n'a pas encore commencé. S'agit-il simplement de l'établissement d'un annuaire de personnalités sensibles ou d'infections véritablement couronnées de succès? Quel serait l'intérêt direct du royaume du Maroc à nous espionner de façon massive et générale? Pegasus est vendu par le ministère de la Défense israélien à un ou des Etats amis. Mais le logiciel est-il toujours entre les mains d'un service régalien ou est-il passé, tel un mistigri, entre les mains d'une boîte privée? Le véritable problème dans cette affaire, c'est l'absence de suivi après vente et de contrôle déontologique» a-t-il détaillé. Pour lui, «Le royaume du Maroc a constitué, au fil des ans, un appareil sécuritaire efficace et adapté aux différentes menaces. Au sein du ministère de l'Intérieur, la priorité est mise sur la lutte antiterroriste à caractère islamiste, avec l'appui de deux grands services: la DGED (Direction générale des études et de la documentation, NDLR) et la DGST». La coopération entre services français et marocains «a toujours été excellente dans le cadre de la lutte antiterroriste. Outre des échanges analytiques ou opérationnels au quotidien, la relation a porté ses fruits lors des attentats de Marrakech en 1994 et en avril 2011, ou encore concernant l'identification et la localisation des auteurs des attentats du Bataclan en France, en novembre 2015. Il y a eu une période de froid durant l'année 2014, pour des raisons politiques, mais la relation de coopération est revenue depuis à un bon niveau» a-t-il précisé. «À mon sens et à ma connaissance, le Maroc n'a aucun intérêt à faire espionner Emmanuel Macron» a-t-il relevé. «Je ne vois pas comment un service de renseignement institutionnel pourrait surveiller le roi et la famille royale de son propre pays. Toutes les décisions sont validées au plus haut niveau, et les différents filtres existants feraient remonter immédiatement le moindre début de dérive. Les directeurs sont des serviteurs du royaume et ont une obligation de fidélité et de loyauté extrême. Ce listing confus de numéros, sorte d'inventaire à la Prévert, nous incite à faire preuve de la plus grande prudence» s'est-il indigné. «Qui a intérêt à tuer économiquement NSO? À qui profitent ces attaques médiatiques aujourd'hui? Ce sont des questions légitimes» a-t-il conclu.