A une quarantaine de jours des élections législatives, la majorité des partis politiques n'a toujours pas diffusé son programme, la population semble s'en désintéresser également. Seuls deux partis ont présenté leur programme au public pour des élections programmées au 8 septembre prochain. Faut-il s'en étonner ? oui et non. Oui car la faiblesse de la participation de l'électorat dure depuis assez longtemps pour que les partis politiques, aient eu le temps d'opérer les changements et réglages à même de réconcilier leurs électeurs traditionnels avec la chose politique et sensibiliser les nouveaux inscrits sur les listes électorales. Et un programme est le premier lien entre le parti à la veille d'élections et la population. Non, car la propre foi des partis en leur capacité de mobilisation immédiate et probante sur le terrain semble bien écornée. Les discours de ténors de différents partis s'accordent sur la nécessité de bénéficier de candidats forts par villes à même de mobiliser l'électorat, et des différents moyens mis en œuvre pour les recruter. Non, également, car les partis politiques dans leur grande majorité pèchent par suivisme. Les néo-libéraux d'hier et du capitalisme à outrance malgré la crise de 2008 qui a tiré la sonnette d'alarme tant sur la nécessité de la souveraineté économique que sur les dangers du libéralisation économique à tout va, aujourd'hui avec le NMD voulu par le roi auquel ils se réfèrent désormais, et la situation sanitaire qui a mondialement révélé que le marché à tout crin était partie intégrante du problème, semblent pourtant toujours en retard d'une guerre. C'est certainement ce qu'a voulu exprimer ce politicien en sortant cette boutade « Je doute qu'ils aient un programme » ou encore cet autre qui qualifie leurs sorties sur leurs futures stratégies économiques de «politique politicienne» : Depuis que le concept de la souveraineté économique est devenu au Maroc un postulat politiquement correct, les partis qui en parlent, montrent, pour la plupart, les limites objectives de leurs discours. Les contenus de souveraineté alimentaire et/ou énergétique liés à ce concept, devraient se traduire en termes de choix de politiques publiques à même d'opérer les réformes qu'ils proclament pour la plupart au forum de la MAP. Cette nouvelle tribune de l'agence de presse officielle, où les chefs de partis politiques diffusent, depuis quelques semaines, leurs idées d'ordre général est-elle un référent pour les réponses qu'un électorat potentiel chercherait à ses questionnements politiques ? Alors même que la majorité n'a pas encore déployé le programme électoral de son parti ? Partant du postulat qu'un parlement va être élu et un gouvernement, nommé quel que soit le taux de participation, le jeu des alliances prend le pas sur celui des programmes et de la relation électeur/parti qui devraient primer. C'est ainsi que la frilosité de l'Istiqlal à s'afficher franchement et totalement comme bloc avec le PAM et le PPS ayant fait couler beaucoup d'encre il y a quelques semaines, traduisait sa volonté de jouer la carte des partis « forts » -toutes proportions gardées dans ce champ politique éclaté- car il s'agit, avant tout, de mettre toutes les chances de son côté pour faire partie du futur gouvernement. L'istiqlal, durant ces dernières années d'opposition a assaini ses instances dirigeantes et poli son image pour y revenir. Priorité est donnée aux alliances avec les partis les plus en vue. Il ménage ainsi le RNI et le courtise même. On se souvient de l'interview de Nizar Baraka à Media 24, où il prétend que le département ministériel de Moulay Hafid Alami a un bilan sans faute grâce à l'homme et non pas grâce à un programme gouvernemental. Une déclaration assez curieuse et significative pour être soulignée. Malgré ses critiques au gouvernement de manière générale sur son bilan, le parti ménage le PJD, dont l'idéologie conservatrice n'est pas étrangère à l'Istiqlal. Le PAM de Ouahbi, dont le crédo est non à une quatrième législature en dehors du gouvernement, a toujours déclaré n'avoir aucun complexe à s'allier au PJD. D'ailleurs une déclaration commune aux deux partis, publiée samedi 24 juillet, montre leurs convergences et laisse présager leur détermination à faire front commun... vraisemblablement pour contrer l'avancée du RNI. Rappelons que le parti d'Akhennouch est depuis quelques mois, visé par des déclarations plus ou moins directes des partis de l'opposition et du PJD, visant principalement son utilisation de moyens financiers conséquents et d'une campagne électorale prématurée pour mettre toutes les chances de son côté de gagner les élections législatives. Le PPS, de son côté, s'il attaque la personne d'El Otmani jugé sur son incapacité à défendre ses ministres et à réaliser une cohésion gouvernementale, encense le PJD de Benkiran. Il est très signifiant de constater que quasiment tous ceux qui ont exprimé leur intention de gouverner semblent peu croire en leur capacité à dégager une majorité confortable. Ils semblent se condamner d'office à jouer le jeu politique avec des partis à l'idéologie opposée à la leur ou au minimum à l'histoire éloignée de la leur, si leurs conditions sont respectées. Bien que le RNI par ses moyens dérange, beaucoup le ménage et n'hésiteront pas à se tourner autant vers lui que vers le PJD, donnés gagnants d'office. Il est tout aussi significatif de constater qu'un potentiel de 1,5 millions de votants sur près de 18 millions, ce qui est plutôt faible en termes de mobilisation, est un objectif que seul deux partis sont susceptibles d'atteindre. Certes les mécanismes institutionnels sont mis en place pour élargir le nombre d'électeurs sur les listes électorales. Cependant, qui pourra convaincre massivement les sceptiques de venir aux urnes ? Les partis traditionnels eux-mêmes doutent de leur capacité à mobiliser, au vu de leur peu de succès à répondre aux demandes de la population. Depuis 2012-2013, les reproches des citoyens adressés aux partis politiques sont les mêmes : manque de crédibilité, manque de courage pour mettre en œuvre les politiques publiques les concernants. Et ce, qu'il s'agisse de pouvoir d'achat, de protection sociale ou de libertés individuelles. La représentativité réelle n'est pas à l'ordre du jour des agendas partisans car le genre de campagnes électorales que mènent les partis sur le terrain comme dans les coulisses, n'est pas pour rapprocher les citoyens de la chose politique.