Le Conseil de sécurité de l'ONU doit se réunir jeudi au sujet du conflit sur les ressources en eau qui oppose Addis-Abeba, Le Caire et Khartoum. L'Ethiopie a commencé la seconde phase de remplissage d'un barrage controversé sur le Nil, a dénoncé l'Egypte, lundi 5 juillet. Une initiative qui risque de faire monter la tension à l'approche d'une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU, jeudi. Le ministre égyptien de l'irrigation, Mohamed Abdel Aty, informé par Addis-Abeba du début de la deuxième phase de remplissage, a déclaré «rejeter fermement [cette] mesure unilatérale», selon un communiqué de son ministère rendu public lundi. Le début de cette deuxième phase du remplissage du barrage «représente une violation des lois et normes internationales qui régulent les projets de construction sur des bassins partagés de rivières internationales», s'est-il indigné. Le barrage de la Renaissance, construit par l'Ethiopie en amont du Nil, est de longue date l'objet d'un conflit avec l'Egypte et le Soudan, qui craignent pour leurs ressources en eau. Le Conseil de sécurité de l'ONU doit se réunir jeudi à ce sujet à la demande de la Tunisie, membre non permanent du conseil et représentant du monde arabe, au nom de l'Egypte et du Soudan. L'Ethiopie est opposée à cette réunion mais devrait aussi y participer. Ces dernières semaines, le Soudan et l'Egypte avaient fait parvenir à l'ONU des lettres réclamant une saisine en urgence du Conseil de sécurité. Dans la sienne, le chef de la diplomatie égyptienne, Sameh Choukri, déplorait que les négociations soient dans l'impasse depuis avril et accusait l'Ethiopie d'avoir «adopté une ligne intransigeante par laquelle elle a torpillé l'action menée collectivement pour parvenir à un accord sur le barrage de la Renaissance». «Nous pouvons ouvrir la porte» En fin de semaine dernière, la France, qui préside en juillet le Conseil de sécurité, avait estimé que le pouvoir de cette instance pour trouver une solution à ce conflit était limité, alors qu'il est plutôt géré par l'Union africaine (UA). «Je ne pense pas que le Conseil de sécurité peut résoudre lui-même la question du barrage, a déclaré l'ambassadeur français à l'ONU, Nicolas de Rivière. Nous pouvons ouvrir la porte, inviter les trois pays à la table, à exprimer leurs préoccupations, les encourager à revenir aux négociations pour trouver une solution.» La construction du barrage par l'Ethiopie a débuté en 2011. En aval, l'Egypte et le Soudan réclament un accord avec Addis-Abeba sur le remplissage de son réservoir. L'Ethiopie, qui a dit avoir opéré la première phase de remplissage à l'été 2020, avait annoncé récemment qu'elle procéderait en juillet à la seconde phase, avec ou sans accord. Elle affirme que ce barrage est vital pour répondre aux besoins en énergie de ses 110 millions d'habitants. Le Soudan espère que le barrage va réguler ses crues annuelles, mais craint des effets néfastes sans accord. L'Egypte, qui dépend du Nil à 97 % pour son approvisionnement en eau, le voit comme une menace pour ses ressources. Le ministre égyptien des affaires étrangères, Sameh Choukri, avait toutefois affirmé en mai que la seconde phase de remplissage du réservoir «n'affectera[it] pas les intérêts en eau» de son pays. «Soyez assurés que nous avons suffisamment de ressources en eau dans le réservoir du Haut barrage» à Assouan, dans le sud de l'Egypte, avait-il déclaré sur une chaîne de télévision locale. Le barrage de la Renaissance, d'une contenance totale de 74 milliards de mètres cubes d'eau, est construit dans le nord-ouest de l'Ethiopie, près de la frontière avec le Soudan, sur le Nil bleu, qui rejoint le Nil blanc à Khartoum pour former le Nil. Avec une capacité de production d'électricité annoncée de près de 6 500 mégawatts, il pourrait devenir le plus grand barrage hydroélectrique d'Afrique.