Encombrante figure du PJD ; Amina Maelainine déclare toujours porter une prétention à l'universel et défendre les bonnes causes. Le 26 décembre, elle a pris la défense d'un journaliste soupçonné d'outrage à magistrat de l'ordre judiciaire dans l'exercice de ses fonctions, et de jeter le discrédit sur une décision de justice, sans pour autant critiquer son parti, qui conduit la coalition au pouvoir. Sournoiserie morale. Amina Maelainine, députée du Parti justice et développement (PJD, islamiste), et membre de la commission justice, législation et droits humains sein de la Chambre des représentants, s'est encore une fois prêtée à son passe-temps favori : les mouvements de manche et les douteuses envolées humanistes. La parlementaire s'est exprimée sur l'affaire d'un journaliste interpellé pour outrage envers un magistrat à raison de ses fonctions. Le journaliste Omar Radi, 33 ans, a été placé en détention, jeudi 26 décembre. Jugé pour un thread (une série de tweets reliés les uns aux autres) corrosif écrit en avril sur le réseau social de microblogage Twitter et qui tombent sous l'application de l'art. 263 du code pénal, il risque une peine d'un mois à un an de prison pour «outrage à magistrat», après des propos virulents envers Lahcen Tolfi, juge chargé du dossier de Nasser Zefzafi et de ses compagnons du mouvement de contestation sociale qui a agité plusieurs localités du nord en 2016-2017. Le juge avait confirmé en appel des peines allant jusqu'à vingt ans de réclusion pour quarante-deux éléments impliqués dans les protestations. Dans ses diatribes empreintes d'une arrogance savantasse publiées sur le réseau social en ligne Facebook, la députée islamiste, empêtrée dans un retentissant scandale moral qui a défrayé la chronique début 2019, a réclamé qu'il ne faut pas «domestiquer la liberté d'expression», et que dans le cas du journaliste arrêté, entendu par la police judiciaire et placé en détention, «l'esprit des lois doit prémunir sur les textes des lois» souhaitant «la libération rapide du journaliste inculpé». Aucun mot sur la violence des paroles proférées contre M. Tolfi, et qui présentent l'expression d'un violent mépris pour son autorité et pour les actes qui en émanent. Lors de la première audience d'Omar Radi devant le tribunal de première instance de Casablanca, sa remise en liberté provisoire réclamée par ses avocats a été rejetée. La prochaine audience a été fixée au 2 janvier. Un responsable judiciaire a dénoncé, vendredi 27 décembre, les propos d'Amina Maelainine et ceux de certains activistes, qui «invoquent la prééminence de la liberté d'expression au détriment de la réputation et de la dignité des juges» en dépit de «la vérité et la réalité.» Amina Maelainine s'exprime sur tous les sujets de société, sans jamais désavouer la philosophie de son parti, animé par l'absurde prétention de réglementer les mœurs et d'encadrer la liberté publique. Le responsable, cité par un portail électronique sous couvert de l'anonymat, a déclaré que le cas d'Omar Radi est «un cas d'injure et d'irrévérence grave envers la personne d'un magistrat.» Ironie de l'histoire, Amina Maelainince, qui distribue sans cesse les certificats de moralité, est la pure et ardente incarnation de l'lnquisition. Ses contradicteurs, lorsqu'ils osent la publicité d'opinions contraires à ses convictions, se voient admis à la censure. Elle en a bloqué des dizaines sur ses réseaux sociaux, surtout après le déclenchement de sa célèbre affaire. La liberté d'expression est garantie dans la constitution marocaine, mais les autorités affirment que certains utilisateurs des médias sociaux repoussent trop certaines limites, parfois à des fins personnelles. La même source a indiqué que «les paroles [de Omar Radi] ne s'inscrivent pas dans le cadre de critiques constructives et acceptables, mais relèvent plutôt des délits d'offense et d'outrage sanctionnés par la loi.» Amina Maelainine a provoqué un tollé en janvier 2019 lorsqu'elle a déclaré que des photographies parisiennes devant le cabaret le Moulin-Rouge, la montrant sans voile, les cheveux au vent, sont des clichés détournés, dénonçant une campagne «calomnieuse» contre elle. Elle a ensuite admis que les photos étaient authentiques. Au sein de son parti, ses mensonges et son impudence si effrontée a poussé les grands lieutenants de la formation islamique se désolidariser d'avec la députée, devenue compromettante. Le chef de la coalition gouvernementale et secrétaire général du PJD, Saad Dine El Otmani, a pris ses distances d'elle, déclarant que «l'engagement du parti envers son référentiel islamique est un des points cardinaux de notre parti, nous devons nous assurer que nous y sommes toujours attachés» avant d'ajouter : «nous devrions toujours proposer l'exemple, en particulier ceux qui sont à l'avant-garde de l'opinion publique.» L'analyste politique Hafid Ezzahri, qui a affirmé que le PJD, désormais surnommé le parti des «histoires roses», a traversé une grave crise interne à cause des errements d'Amina Maelainine. «Les hypocrites finiront dans les profondeurs de l'enfer. Il est clair qu'aujourd'hui, nous devons démasquer les contradictions des islamistes», a déclaré le secrétaire général du Parti socialiste unifié Nabila Mounib lors d'un événement à Tétouan, dans la foulée du scandale.