A problématique nationale rapport fleuve, a considéré le Conseil national des droits de l'Homme (CNDH) qui a présenté, mardi à Rabat, les conclusions des visites qu'il a effectuées dans 15 prisons de janvier à juin 2011. Circonstancié -il énonce 100 recommandations-, ce document dont le titre est «La crise des prisons : une responsabilité partagée» et dont le seul résumé qui fait 15 pages a été décliné en conférence de presse en présence de diplomates étrangers, pointe le surpeuplement comme source originelle de la plupart des maux dont souffre le système pénitentiaire. Dès le départ, le président du CNDH a tenu à mettre en évidence la complexité et la gravité de la crise en la qualifiant de structurelle. Dans son esprit, se focaliser sur la seule administration pénitentiaire pour l'expliquer est un non-sens. Driss El Yazami qui a rappelé les efforts entrepris par cette administration qui a construit de nouvelles prisons et qui en a rénové d'autres a déclaré que la responsabilité est partagée dans une situation dont «le coût social et financier est effarant». Pour y remédier, il a recommandé une justice plus rapide car, a-t-il déclaré, 40% des détenus sont en sureffectif. Cette surpopulation impose au système judiciaire de ne recourir à l'emprisonnement automatique des justiciables que dans les cas de nécessité absolue, d'accélérer le déroulement des procès et de renouer avec la tradition de la liberté conditionnelle. «Qu'il n'y ait eu que 2 cas en tout et pour tout de détenus ayant bénéficié de cette procédure est insupportable», a-t-il déclaré. Le président du CNDH a également estimé que le recours à la conciliation est susceptible de constituer un élément de réponse au surpeuplement carcéral. Driss El Yazami a, par ailleurs, appelé à remettre en œuvre les mécanismes de contrôle des conditions de détention. Il a ainsi affirmé que l'administration pénitentiaire a appelé à plusieurs reprises à la réunion de la commission nationale de contrôle des lieux de détention – composée des secrétaires généraux des ministères- sans que cette demande ait été satisfaite. Il a invité à raviver la pratique des visites ponctuelles que les commissions régionales de contrôle effectuent dans les prisons. Le CNDH, a-t-il expliqué, fait 3 recommandations essentielles pour trouver solution à la crise du système pénitentiaire. La première a trait à l'organisation d'une conférence nationale sur les prisons, la deuxième est de s'inscrire plus avant dans l'adhésion interdisant la torture en interdisant – et en prévenant- les sévices contre les personnes et enfin, en prévoyant un budget substantiel à la stratégie de refonte du système pénitentiaire. Précisant les propos de son président, le secrétaire général du CNDH a déclaré que le travail du conseil a permis de constater que 17.000 détenus ont fait le tiers des peines prononcées contre eux par les juridictions et que sur ce nombre, 7.000 d'entre-eux ont été condamnés à des peines de moins de 6 mois. «Il est impensable qu'en défaut de paiement d'un chèque de 5.000 DH ils fassent de la préventive, il y a d'autres moyens de les amener à honorer leurs engagements», s'est-il exclamé. Le travail de la justice, a-t-il laissé entendre, est de ne prononcer l'emprisonnement que quand les conditions sont réunies. Et d'ajouter : «La finalité des sentences judiciaires est certes la sanction, mais également la correction des comportements et la réintégration après la peine». L'un et l'autre responsables du CNDH ont également appelé à sévir contre les fonctionnaires de l'administration pénitentiaire convaincus de faits de mauvais traitements à l'encontre de leurs prisonniers ou de corruption. Proposition qui a fait préciser au délégué de l'administration pénitentiaire qui assistait à la conférence de presse que 250 gardiens de prison ont été sanctionnés pour des faits similaires et que son administration s'engage à veiller plus attentivement au contrôle des conditions de détention dans les prisons. «Je souscris entièrement aux conclusions du rapport du CNDH et m'engage à mettre en œuvre ses recommandations», a-t-il déclaré.