Vois allez peut-être vous dire que si je parle encore de télé, c'est que je dois manquer drôlement d'inspiration, et vous n'aurez pas tout-à-fait tort. Ni tout-à-fait raison non plus. C'est vrai que la télé est plus qu'un lieu commun, mais, la question est en fait beaucoup plus complexe. Pour être honnête, la télé, pardon, NOTRE télé, à force de m'embêter, de m'assommer, de m'em….der, bref, de m'agresser, a fini par me complexer. Oui, notre télé m'a rendu malade, de me rendre dingue. Prenez-le comme vous voulez, dénoncez-moi si ça vous dit, mais je suis un taré de télé. Je ne suis pas le seul. Nous sommes même des millions à être des tarés pour cause de téléphagie excessive. Un téléphage, c'est quelqu'un qui passe son temps à bouffer de la télé et qui la vomit aussitôt après en lui tapant dessus. Oui, je suis un téléboulimique chronique, mais à la différence de tous les autres, moi, j'essaye de me soigner. Comment ? En en parlant tout le temps, à tort et à travers, et surtout de ses innombrables travers. Ailleurs, quand on n'a rien à dire, on parle de pluie et de beau temps. Ici, comme on a rarement de la pluie et presque toujours du beau temps, alors, on parle de télé. D'ailleurs, parler de télé, de NOTRE télé, c'est donné au premier venu comme au dernier parvenu. Quoique, les parvenus, ils en parlent autrement ou, plus exactement, ils n'en parlent pas du tout. Pour eux, elle n'existe pas. Ils jurent tous tout le temps leurs grands dieux de ne jamais la voir, et je veux bien les croire. Par contre, ils sont tout le temps en train de papoter, les yeux encore remplis d'admiration, sur les programmes de la veille des autres télés, LES TELES DES AUTRES ! Moi, je ne suis pas un parvenu - (entre nous, j'aimerais bien être un parvenu, mais, je ne suis jamais arrivé à y parvenir)- pourtant, je ne cache jamais que, moi aussi, je les regarde, «les télés des autres». Je les regarde souvent, en tout cas, à chaque fois qu'il n'y a rien à voir chez les nôtres, autrement dit, presque toujours. On dit parfois qu'il y a chez les parvenus, et donc, un peu chez moi, une espèce de snobisme à crier sur tous les toits qu'on ne regarde presque jamais nos télés. Oui, peut-être, et ça ne date pas d'aujourd'hui. Mais, franchement, je préfère être accusé de snobisme que d'être atteint de strabisme. Parce que, voyez-vous, à force de regarder nos télés, on finit inévitablement par loucher. Et comme vous savez, quand on louche, on voit double. C'est justement ça, notre drame : nous regardons nos télés 2 fois. On dit qu'un homme averti en vaut deux et moi je dirais qu'un téléspectateur qui louche devient doublement crétin. Parce que, mes pauvres amis, si on continue comme ça, on va finir tous par devenir des imbéciles complets. Totaux. A moins que les choses changent d'ici là. D'ici quand ? Je n'en sais rien. Tout ce que je sais, c'est qu'on dit que ça va bientôt changer puisque les fameux cahiers des charges, nouvelle mouture, après avoir été, semble-t-il, allégés de tous les griefs des témoins à charges, ont été livrés, lus, approuvés et bientôt validés par nos gentils sages de la pas si Haute Autorité. Et, tout ça, je le parie, ça va être dans un esprit tout ce qu'il y a de plus unanimiste et de plus consensuel. Je me suis même laissé dire que le but ultime de tout ce tralala, c'est de nous mettre, enfin, sur le droit chemin d'une télé qui, à défaut d'être performante, sera d'abord et avant tout vertueuse, et, donc, forcément assommante. Mon Dieu, faites que, comme toujours, et encore une fois, je me trompe sur tout. Dites Amen. En attendant, bon week-end les avertis, et bon spectacle les autres.