Le procureur près le tribunal antiterroriste de Salé a implicitement requis la peine de mort contre les accusés dans le procès de l'attentat contre le café Argana. La partie civile s' y oppose. Les avocats de la partie civile au procès d'Argana n'ont pas caché leur appréhension que le tribunal antiterroriste qui examine l'affaire ne suive les réquisitions du procureur qui a demandé l'application des peines maximales à l'encontre des neuf inculpés. A l'issue d'un réquisitoire dans lequel il a retracé les pérégrinations des mis en cause dans les pays du Sahel et du Proche-Orient et établi la solidité des présomptions qui pèsent sur eux, Khalid Kerdoudi a ménagé ses effets avant de s'adresser à la Cour en ces termes : «Messieurs de la Cour, constatez avec moi la véracité de la preuve et la sincérité de l'aveu dans cette affaire. En vertu de ce qui précède, je vous demande l'application des peines maximales prévues par la loi». Dans l'esprit de l'assistance qui s'est pressée sur les bancs du prétoire, ces peines maximales ne pouvaient être que la mort dans un cas au moins : celui d'Adil Al Atmani, le poseur des bombes. A l'énoncé de la réquisition du procureur demandant implicitement sa tête, l'inculpé n'a pas bronché, au contraire de quelques uns de ses codétenus qui ont clamé leur innocence et crié à l'injustice. Ils n'ont pas été les seuls ce jour-là à être rebutés par l'éventualité d'une condamnation à mort dans ce procès. Me Abderrahim Jamaii, un des avocats de la partie civile, a réitéré dans sa plaidoirie ce qu'avaient dit ses collègues sur l'opposition de leurs clients à une condamnation à la peine capitale. Et, on a ainsi découvert que les victimes marocaines et leurs proches étaient eux aussi résolument contre. En sorte que beaucoup se demandent si le procureur ne s'est pas débarrassé de la patate chaude en laissant la Cour seule juge de la nature de la sanction. Car, a-t-on commenté, dans un contexte où même les parents des victimes s'y sont opposés, il sera difficile de condamner à la peine capitale comme le stipule la loi marocaine pour les actes terroristes. Mais, d'un autre côté, cette peine n'étant plus exécutée depuis une décennie, la tentation serait grande de condamner en pensant que c'est la réclusion à perpétuité qui est en vérité prononcée dans un contexte où l'abolition de la peine de mort est demandée avec insistance par la société civile. Pour les autres accusés, les condamnations varient suivant leur niveau de complicité avec Al Atmani. Néanmoins une chose est sûre : l'enquête de police et leurs aveux en instruction ayant établi leur appartenance à la Salafiya Jihadia, mouvement terroriste assimilé en droit à une bande criminelle, la facture sera de toute façon lourde. On a parlé de réclusion à temps. Mais quoi qu'il en soit de ces considérants, ce sont les juges qui trancheront, en principe, jeudi prochain. On saura alors si l'abolition de la peine de mort est sur la voie.