Jean-Pierre Raffarin se défausse sur «les entourages» qui n'ont d'autres obsessions que de jeter l'huile sur le feu et allumer les animosités là où il ne devrait y avoir qu'harmonie et cohérence. Il y a quelque chose d'assez particulier chez Jean-Pierre Raffarin, l'ancien Premier ministre de Jacques Chirac, c'est qu'il dégage, malgré lui, cette étrange opposition sournoise à Nicolas Sarkozy même quand il s'échine à lui tresser les plus scintillants lauriers. Et quand la presse lui fait remarquer ce trait de caractère, Jean-Pierre Raffarin se défausse sur «les entourages» qui n'ont d'autres obsessions que de jeter l'huile sur le feu et allumer les animosités là où il ne devrait y avoir qu'harmonie et cohérence. Et si Jean-Pierre Raffarin était parvenu à créer cette impression, c'est qu'il a réussi à installer avec le président de la République un rapport ambigu, fait d'excès de gratitude en marée basse et de montée d'adrénaline en marée haute. Quand Nicolas Sarkozy le traite avec des égards, (voyages, réceptions, missions et consultations) Jean-Pierre Raffarin, très sensible, est tout sucre, tout miel avec sa gouvernance. Mais il suffit qu'il n'accorde pas d'importance à ses conseils ou qu'il le snobe sur un sujet important pour que Jean-Pierre Raffarin, hier encore soldat discipliné de la majorité, se transforme en fougueux critique, souvent plus féroce que l'opposition socialiste. L'affaire qui avait configuré leurs rapports fut la présidence du Sénat, lorsque Nicolas Sarkozy avait préféré soutenir Gérard Larcher plutôt que de lui donner ce juteux fauteuil de la République, Jean-Pierre Raffarin avait fait son deuil. Désormais, les jeux sont faits. Il ne pourra plus occuper cette fonction de conseiller de prince qu'il désire tant. Après avoir servi Jacques Chirac, il ne rêvait que d'une chose, mettre son talent et son savoir-faire au service de Nicolas Sarkozy. Qui l'en a empêché ? Certainement pas la volonté lucide de Nicolas Sarkozy mais les conseils malveillants, jaloux et morbides des entourages. Jean-Pierre Raffarin cuvait en silence son amertume. Il lui arrivait de temps à autre d'adresser des piques vengeresses en direction de François Fillon dont il méprise l'inaction et le manque d'inspiration. Il se défoulait comme il pouvait. Comme s'il se restreignait à épargner sa cible principale pour exercer ses talents de tirs sur un leurre. Jusqu'à ce que, par un effet involontaire, crise d'autorité et défaite électorale obligent, un club des anciens Premiers ministres se forme virtuellement. Il est composé de l'ennemi intime Dominique de Villepin, du challenger de toujours Alain Juppé, du parrain déçu Edouard Balladur et de l'offreur de services permanent Jean-Pierre Raffarin. Ce club a su tisser un des plus violents réquisitoires contre la gouvernance de Nicolas Sarkozy, montrant que le champion d'hier, est directement défié au sein de sa propre famille. Jean-Pierre Raffarin, qui aurait aimé que l'ouverture politique pratiquée par Nicolas Sarkozy le touche aussi, n'est pas tendre avec le président. Même quand il se propose de défendre son action, il trouve toujours le moyen de laisser sa marque. Une griffe qui en dit long sur son impatience que sur son adhésion : «Nicolas Sarkozy a, en quelque sorte, désacralisé la fonction présidentielle». Nicolas Sarkozy doit se dire, la rage au cœur, qu'avoir de tels soutiens n'est pas de nature à augmenter vos chances de gagner.