François Fillon a été chargé par l'Elysée de reprendre les choses en main, de leur donner une tournure plus politique qui rassure davantage que celle qu'Eric Besson avait tenté de leur insuffler. Il semble que la poire ait été coupée en deux. D'un côté, l'Elysée n'a pas répondu favorablement aux pressions au sein de la majorité présidentielle de reporter le bilan du débat sur l'identité nationale lancé par Eric Besson ministre de l'Immigration aux lendemains des élections régionales pour couper court aux accusations d'avoir dégoupillé une telle controverse à des fins seulement électoralistes. De l'autre, l'organisation d'un séminaire gouvernemental sur la question signe la reprise en main du sujet par le Premier ministre François Fillon lui-même. Eric Besson a beau argumenter devant les micros que, pour un ministre, le séminaire gouvernemental est l'ultime consécration, beaucoup plus prestigieux que le colloque d'étape qu'il devait organiser selon un calendrier établi à l'avance, l'impression qu'il a été furtivement écarté de la gestion politique et médiatique de ce sujet sensible à la vie dure. Sous prétexte de vouloir repenser le pacte républicain et le rapport à la nation dans un contexte de crises qui encourage les raccourcis et dissémine les préjugés, Eric Besson est ouvertement accusé d'avoir libéré la parole raciste et xénophobe. Sa frénésie à jouer au bulldozer sur un sujet qui exige la délicatesse des orfèvres a concentré sur sa personne un feu de critiques sans commune mesure. C'est ainsi que François Fillon, intronisé depuis peu comme le chef visible de la majorité pour ces élections régionales, hérite du débat sur l'identité nationale. Il réunit ses ministres ce lundi. Objectif : recadrer la parole gouvernementale sur ce débat. A l'évidence, il n'est aucunement question pour le Premier ministre d'annoncer l'abandon en rase campagne d'une telle initiative, ni même d'adresser la moindre critique publique à son ministre de l'Immigration Eric Besson. Ce serait de toute façon impossible à imaginer. Dans le premier cas, il contredirait publiquement Nicolas Sarkozy, dans le second, il désavouerait son ministre de l'Immigration. D'ailleurs, à observer la liberté d'action dont il a fait preuve jusqu'à présent et sa réelle marge de manœuvre, la conclusion est vite établie que François Fillon a été chargé par l'Elysée de reprendre les choses en main, de leur donner une tournure plus politique qui rassure davantage que celle qu'Eric Besson qui, dans son élan passionné de nouveau converti, avait tenté de leur insuffler. Il paraît aujourd'hui acquis que l'entrée en scène de François Fillon sur un sujet qui a longtemps été monopolisé par le duo Sarkozy-Besson est une incessante demande des pontes de la majorité présidentielle qu'un tel débat avait mis mal à l'aise. La crainte d'aboutir à un double échec, celui de ne pas réaliser de belles performances aux régionales et celui de booster le Front National de Jean et Marine Le Pen, ont été derrière cette volonté de confier au Premier ministre la gestion politique et médiatique d'un tel débat. François Fillon semble avoir une mission relativement confortable et qui sied à merveille à son tempérament d'institutionnel au verbe rond, allergique aux ruptures inutiles, celle de sauver les meubles et de rassurer les inquiets de sa famille politique, que de telles remises en cause lancées à l'improviste, ont poussé à l'angoisse.