Moussaoui n'avait pas la tâche aisée. Les attaques contre les représentations de sa religion ne venaient pas uniquement que de quelques poches de l'extrême droite connues pour leur légendaire xénophobie. Le président français Nicolas Sarkozy reçoit aujourd'hui à l'Elysée le président du Conseil français du culte musulman, Mohamed Moussaoui. Une réunion qui sera certainement consacrée aux sujets préoccupant la société française notamment le débat sur l'identité nationale et la question du port de la burqa. Par les temps qui courent, le rendez-vous n'était pas prêt de passer inaperçu. Et les deux hommes, Nicolas Sarkozy et Mohamed Moussaoui, n'allaient pas passer le plus clair de leur temps à pérorer sur le froid glacial qui paralyse les circulations et le redoux qui redonne vie et espoir. Les deux hommes se rencontrent ce mercredi à un moment où Nicolas Sarkozy est soumis à une pression de plus en plus forte de battre en rase campagne et de suspendre ce débat sur l'identité nationale qui tourne ouvertement à la libération de la parole raciste et xénophobe. Mohamed Moussaoui a déjà eu l'occasion de dire que «la façon dont se déroule le débat sur l'identité nationale nous inquiète». L'entretien intervient aussi à un moment crucial où il faut prendre une grande décision politique, celle de savoir s'il faut recourir à une loi pour interdire le voile intégral ou la burqa déclarée indésirable dans la République par Nicolas Sarkozy lui-même lors du fameux discours de Versailles. Mohamed Moussaoui, le Franco-Marocain qui dirige le CFCM, n'a pas eu un début de mandat des plus faciles. Depuis son installation à la tête de ce grand corps chargé de garantir une représentation de musulmans de France auprès des institutions républicaines, il a été soumis lui aussi à de nombreuses bourrasques. Là où il fallait un chef avec du charisme et du bagout, Mohamed Moussaoui s'est révélé trop calme, trop indécis, trop absent pour que sa parole porte au-delà du milieu associatif et technicien de la chose religieuse et réponde aux exigences médiatiques du moment. Il faut dire que Mohamed Moussaoui n'avait pas la tâche aisée. Les attaques contre les représentations de sa religion et les images véhiculées de ses concitoyens de confession musulmane, ne venaient pas uniquement que de quelques poches de l'extrême droite connues pour leur légendaire xénophobie. Elles étaient régulièrement diligentées par quelques influents cercles du gouvernement, à l'égard desquels, Mohamed Moussaoui, circonspect dans son verbe, retenu dans son expression, ne pouvait montrer que compréhension. En recevant Mohamed Moussaoui, Nicolas Sarkozy ne cherche pas uniquement à être œcuménique même si la conjoncture s'y prête. Les signes d'une fébrile montée de l'islamophobie sont bien perceptibles. La rencontre de l'Elysée est destinée à adresser des messages qui peuvent rassurer une communauté inquiète par des stigmatisations multiples et publiquement assumées. L'autre versant de cette rencontre touche à l'éventuelle loi sur la burqa. La famille politique de Nicolas Sarkozy est déchirée entre l'envie de faire voter une loi qui adresse un message fort avec le risque que la seconde religion de France soit stigmatisée dans son ensemble. Et c'est la position que défend avec plus au moins de clarté Mohamed Moussaoui. Dans l'attente des préconisations de la mission parlementaire chargée de réfléchir sur le sujet, le traitement de la burqa continue de diviser et de faire polémique. Nicolas Sarkozy est confronté à un choix lourd de conséquences, si lourd que le soutien de Mohamed Moussaoui n'en sera que le bienvenu.