Profitant de la trêve estivale, Jean-Marie Le Pen s'est rappelé aux bons souvenirs des Français avec des déclarations fracassantes. Revoilà donc Jean-Marie Le Pen. Le vieux lion de l'extrême droite française semblait ces derniers temps, édenté et marchait, depuis l'avènement de Nicolas Sarkozy, comme un cheval fourbu, dégarni de son aura et de ses bijoux de famille. On le disait plus préoccupé à régler sa succession immobilière et politique qu'à penser conquérir d'autres territoires et à gagner d'autres combats. Profitant de la trêve estivale, Jean-Marie Le Pen s'est rappelé aux bons souvenirs des Français avec des déclarations fracassantes. L'homme de «la chambre à gaz, simple détail de l'histoire», de la xénophobie affichée, élevé au rang de religion, de l'immigré, bouc émissaire de tous les maux de la société française, n'a jamais réellement rendu les armes. Il n'est jamais entré dans un confessionnal politique pour reconnaître ses erreurs ou éventuellement demander pardon à tous ceux, nombreux, qui auraient pu être sentis offensés par ses diatribes et ses harangues délirantes. Jean-Marie Le Pen avait donné l'impression de s'éclipser de l'arène politique et laissé sa fille Marine prendre son envol pour lui succéder à la tête du Front National. L'opération, que doit régler un congrès prévu en 2010, ne s'annonce pas comme un long fleuve tranquille. Le vieux Jean-Marie devra être obligé de découvrir ses crocs s'il veut assurer sa succession dynastique. L'âge du capitaine aidant, l'icône Le Pen avait cessé de briller. On le décrivait au crépuscule d'une vie sans grandes gloires que celle que procure le plaisir éphémère des provocations et des calembours. Et voilà qu'en plein été, Jean-Marie Le Pen ressort une de ces plus vieilles antiennes sur les dangers que représente l'étranger: «90% des faits divers ont à leur origine soit un immigré soit une personne d'origine immigrée». Jean-Marie Le Pen profite de cette occasion pour pilonner la politique de Nicolas Sarkozy. : «Nicolas Sarkozy est un menteur et il ne se donne pas les moyens de faire la politique qui serait celle de la sécurité qui passe d'abord par le contrôle de l'immigration, immigration qui n'a cessé d'augmenter dans notre pays et qui crée la situation principalement d'insécurité». Cette remise en cause du leadership de Nicolas Sarkozy, Jean-Marie Le Pen a déjà eu l'occasion de l'exprimer à l'occasion des événements dramatiques qui avaient secoué début août Royan en Charente Maritime et Sevran en Seine Saint-Denis. Et ce en affirmant que «le pays n'est pas dirigé». Une lourde accusation. «Ces drames sont la démonstration de la déliquescence d'un pays qui, en vérité, n'est pas dirigé malgré les démonstrations perpétuelles de son président». Il est vrai que ces critiques, si violentes soient-elles, sont loin d'égaler la haine tenace et l'effervescente rancune qu'il nourrissait à l'encontre de Jacques Chirac. L'ancien président de la République qui avait longtemps refuser d'adopter la proportionnelle, le seul mode de scrutin susceptible de procurer quelques élus au FN, incarnait par ses faits et gestes tout ce que détestaient les chefs de l'extrême droite. Le président du Front National a profité de cette occasion aussi pour régler son compte à son frère ennemi de l'extrême droite, Philippe de Villers qui vient d'annoncer son ralliement à l'écurie présidentielle de Nicolas Sarkozy, qualifié de «Outing» par Jean-Marie Le Pen. Et de se réjouir que «l'opposition nationale n'est plus représentée que par le Front National. Et en acceptant Philippe de Villiers dans son camp, Nicolas Sarkozy est accusé par le chef de l'extrême droite de continuer sa politique de bricolage, de rafistolage d'une fausse majorité, d'une majorité de gouvernement qui n'a pas de base réelle dans le pays». Le choix de hausser le ton à l'encontre de Nicolas Sarkozy de la part du chef du Front National est à trouver dans les tentatives du président de la République de mobiliser l'ensemble des franges de la droite à la veille des élections régionales de 2010. Dans la stratégie de Nicolas Sarkozy, il n'est pas d'une grande utilité de tenter de séduire le Front National, accusé à tort ou à raison d'être une branche morte. Jean-Marie Le Pen s'est chargé de rappeler à Nicolas Sarkozy, sinon la vigueur et la vivacité de sa formation , du moins sa capacité de mordre et de nuire.