Cette polémique, qui met la France de Nicolas Sarkozy au cœur du débat, a très peu de chances de s'éteindre de sitôt. Que pourrait donc faire Nicolas Sarkozy, pour ne pas être un jour d'actualité, dans le tourbillon d'une polémique? C'est à croire que l'homme s'est volontairement vissé dans l'œil du cyclone. Pour lui, la déflagration des dominos avait débuté avec l'affaire Mitterrand-Polanski, portée aux nues par Jean Sarkozy au destin présidentiel de l'Epad inachevé. Passant par les multiples douleurs de la majorité, cela se poursuit aujourd'hui par la grande polémique «facebookienne» déclenchée par le président lui même de savoir si vraiment il était réellement le 9 novembre au pied du Mur de Berlin comme il l'affirme où s'il s'était livré à une contorsion de la réalité pour mieux se tisser une légende. Le plus récent chapitre de la mésaventure quotidienne de Nicolas Sarkozy touche un épisode qui émeut le monde littéraire et politique français. Il s'agit de l'affaire déclenchée par la gagnante du prix Goncourt 2009, la jeune Franco-sénégalaise Marie Ndiaye pour son livre «Trois femmes puissantes». L'objet du scandale ne tourne pas autour du livre de Marie Ndiaye dont la critique était unanime pour saluer le talent et la créativité. La lauréate du Goncourt 2009 s'est retrouvée dans la polémique à cause d'une interview qu'elle avait accordée le 18 août dernier aux «Inrockuptibles» dans laquelle elle explique avoir décidé de s'exiler hors de France et de s'installer à Berlin «en grande partie à cause de Sarkozy». Et Marie Ndiaye de peindre une réalité peu glorieuse citant des personnalités gouvernementales par leurs noms : «Je trouve détestable cette atmosphère de flicage, de vulgarité... Besson, Hortefeux, tous ces gens-là, je les trouve monstrueux». A la lecture de ses propos, le député Eric Raoult, considéré comme proche de Nicolas Sarkozy, prend sa plume la plus acide et écrit au ministre de la Culture Fréderic Mitterrand pour invoquer une forme de «droit de réserve» qui devrait être imposé aux lauréats d'un prix aussi prestigieux que le Goncourt. Une telle proposition a fortement ému la galaxie littéraire qui veut garder jalousement sa liberté de parole et son indépendance d'esprit. Eric Raoult a dû subir critiques et sarcasmes. Ses adversaires l'accusent de confondre «Prix Goncourt» et «Miss France». La polémique a fait boule de neige au point où chacun s'est senti obligé de donner son point de vue. Le Buzz était inévitable. Et lorsque Marie Ndiaye avait remarqué le silence gêné de Fréderic Mitterrand, sans doute échaudé par sa prise de position rapide sur Polanski et sa propre polémique sur son livre «Mauvaise vie», elle l'interpelle et l'invite à se prononcer sur ce «droit de réserve» invoqué par Eric Raoult. Et de lui rappeler ce qu'il avait dit récemment : «Au moment de l'affaire Polanski, Frédéric Mitterrand avait dit qu'en tant que ministre de la Culture, il était là pour soutenir les artistes et ne pas les abandonner». Après une grande hésitation qui en dit long sur l'embarras politique dans lequel il se trouvait, Fréderic Mitterrand a répondu en ayant recours à la plus belle langue de bois dont il sait tresser avec lyrisme de mémorables échantillons : «Je n'ai pas à arbitrer entre une personne privée qui dit ce qu'elle veut dire et un parlementaire qui dit ce qu'il a sur le cœur (…) Ça me regarde en tant que citoyen, cela ne me concerne pas en tant que ministre». Cette polémique, qui met la France de Nicolas Sarkozy au cœur du débat, a très peu de chances de s'éteindre de sitôt. Non seulement parce que Marie Ndiaye «persiste et signe» son approche dans une nouvelle interview aux «Inrockuptibles». Cette affaire intervient dans un contexte politique extrêmement électrique où le débat sur l'identité nationale voulue par le président de la République colore toutes les postures.