Ahmed Zaïdi, chef du groupe parlementaire de l'USFP, livre le diagnostic de la crise qui a entraîné l'échec du huitième congrès du parti. ALM : Pourriez-vous identifier les causes réelles de l'échec du huitième congrès de l'USFP ? Ahmed Zaïdi : Il est vrai que le huitième congrès de l'USFP a été un échec. Mais à toute chose malheur est bon. Il faut souligner que c'est pour la première fois que le parti est sorti de cette épreuve sans encaisser le moindre départ, ni le moindre licenciement, et moins encore de scission. Il faut ajouter que c'est également la première fois qu'on n'a pas eu affaire à un simulacre de congrès, où les résultats sont préétablis bien avant l'élection des instances dirigeantes. Ce n'est plus le cas comme par le passé, où le congrès ne se tenait que s'il y a accord préalable sur les résultats. Cette fois, c'est le congrès lui-même qui a décidé. C'est aussi la première fois que l'on assiste à un désaccord sur la ligne du parti, son orientation politique et sa future gestion organisationnelle … J'en veux pour exemple le débat passionnant, et passionné, qui s'est déclenché lors de ce congrès sur le mode électoral des instances dirigeantes du parti. On a vu se confronter deux points de vue, l'un qui était favorable au scrutin de liste, alors que l'autre a opté pour le statu quo et le maintien du scrutin nominal classique. Mais il y a un autre son de cloche qui attribue l'échec de ce congrès à de profondes divergences sur la participation de l'USFP au gouvernement … Ce n'est là qu'un prétexte que certains utilisent pour masquer d'autres raisons inavouées. Je dis bien prétexte car tout le monde sait que la participation de l'USFP au gouvernement a été décidée par le Conseil national, lequel a délégué au bureau politique les pleines attributions pour négocier sa participation à l'actuel exécutif. Le problème n'est pas tant cette participation, qui n'est qu'un faux alibi, que le score réalisé par l'USFP lors du scrutin du 7 septembre 2007. Le congrès a présenté un rapport dans lequel il a bien identifié les erreurs commises et déterminé les responsabilités de tout un chacun. Le problème venait de certaines personnes qui attendaient de voir leurs noms figurer sur la liste des ministrables lors de la constitution du gouvernement. La crise s'est aggravée au moment où ces personnes se sont rendu compte qu'ils ne figuraient pas sur cette liste. Résultat ? On s'attendait à un débat d'idées, on a eu droit à un conflit sur fond de leadership. Je peux dire, sans risque de me tromper, que la crise dans laquelle se débat actuellement l'USFP est due à cette guerre de leadership. Maintenant, pour répondre à ceux qui veulent remettre aujourd'hui en question la participation gouvernementale de l'USFP, je leur pose la question suivante : Pourquoi ont-ils voté pour cette participation au moment où la question était soumise à l'approbation du Conseil national ? Que s'est-il passé depuis cette date ? En cas d'échec du deuxième tour du 8ème congrès, l'USFP s'acheminera-t-il vers un troisième ? Ce qui s'est passé lors du premier tour a suscité une secousse forte et redoutable au sein du parti. Il faut y voir un signal d'alarme. Le conflit qui existe, faut-il le répéter encore une fois, est de nature personnelle. Et la trêve estivale que nous a imposée ce conflit permettra aux ittihadis de bien réfléchir sur l'avenir de leur parti et ne pas laisser l'occasion leur filer entre les doigts pour dire « Non » à une poignée de personnes très peu soucieuses de l'avenir, de l'histoire et du patrimoine militant du parti. Je pense que la balle est dans le camp des ittihadis eux-mêmes, qui sont invités à s'opposer à ceux qui arborent des slogans populistes claironnant «le retrait du gouvernement», à ceux aussi qui veulent dresser des échafauds dans le cadre de faux procès, et à ceux encore qui veulent réinventer la théorie éculée du complot au mépris de l'histoire et surtout de l'avenir. Que doit faire l'USFP pour surmonter la crise actuelle ? L'USFP se livre actuellement à une cure d'auto-critique bienfaitrice. Ceux qui étaient partisans du scrutin de liste, et j'en fais partie, doivent reconnaître aujourd'hui que ce mode électoral n'est pas sacré. Et ceux qui ont été à l'origine de l'avortement du congrès seront appelés à reconnaître que le temps des machinations et des menaces est révolu. En ce qui concerne la question du mode électoral, y a-t-il une chance de trouver une formule de compromis ? L'idéal est de trouver aujourd'hui une troisième voie, mais surtout pas de compromis qui est contraire aux règles de la démocratie. C'est ce qu'on est en train de chercher. L'admission récemment du Polisario en qualité de membre observateur au sein de l'Internationale Socialiste fait poser des questions sur le rôle même de l'USFP dans cette instance. Qu'en pensez-vous ? Je dois préciser que le Polisario n'a pas été admis au sein des instances décisives de l'Internationale Socialiste. Mais cette décision doit nous amener à redoubler d'efforts pour que cet acte n'ait pas, à long terme, des répercussions négatives sur l'évolution du dossier. Nous venons de faire part au groupe socialiste qui s'active au sein du Parlement européen de nos inquiétudes quant à l'activisme de certaines ONG socialistes européennes soutenant le Polisario, mais nos amis en ont minimisé l'impact en nous assurant que cela ne remet pas en question le principe de notre intégrité territoriale. Nous allons continuer à sensibiliser nos amis socialistes européens, que nous avons d'ailleurs invités à visiter le Maroc à la fin 2008 pour mieux cerner la question.