François Hollande, à quelques petits mois de tirer sa révérence, n'exhale toujours pas cette odeur cadavérique des grands retraités de la politique, responsables du désastre de leur famille. Pour un homme en sursis qui avait annoncé son départ du poste de premier secrétaire du Parti socialiste, François Hollande est un homme très actif et très sollicité. Rien que pendant la semaine écoulée, il fit son apparition sur trois niveaux politiques d'une très grande visibilité. Il accompagna lundi Nicolas Sarkozy au Liban où il ne put s'empêcher de pointer «la naïveté» du président de la république dans son approche des conflits du Moyen-Orient. Il croisa le fer jeudi avec le Premier ministre François Fillon lorsque celui-ci participa à sa première grande émission de télévision sur France 2 pour célébrer le premier anniversaire de sa nomination à Matignon. Il livra enfin samedi son discours devant les délégués du PS réunis à la Villette, dernière phase préparatoire qui doit adopter la réforme des statuts intitulée «Vivre ensemble» avant le fameux congrès de Reims qui doit lui trouver un successeur. L'homme, dont le nom a longtemps été synonyme de débâcles électorales depuis la chute fracassante de Lionel Jospin et à l'exception notoire des dernières municipales, aurait pu finir sa carrière dans l'anonymat, poursuivi par l'éternelle malédiction des perdants. N'a-t-il pas été le compagnon de Ségolène Royal, candidate malheureuse à la présidentielle et dont l'échec était dû en grande partie aux mauvaises grâces livrées par le leadership du PS que dirige François Hollande ? N'a-t-il pas été ce chef d'une gauche mal en point qui n'a pas su résister au triomphe de la droite reconduite au pouvoir malgré un bilan politique et économique des plus contestables ? Et pourtant, François Hollande, à quelques petits mois de tirer sa révérence, n'exhale toujours pas cette odeur cadavérique des grands retraités de la politique, responsables du désastre de leur famille. Bien au contraire, l'homme semble avoir retrouvé un second souffle en élaborant un discours plus mordant et une présence plus élaborée. A François Fillon à qui il portait la contradiction, François Hollande annonce la couleur pour le parti socialiste de demain : «le défi est d'être capable de montrer que sur le pouvoir d'achat, sur la justice fiscale et sociale, sur le dialogue, nous sommes une alternative, en tout cas que nous sommes meilleurs que vous». La renaissance de François Hollande est le fruit de plusieurs facteurs. Le premier est la mauvaise gouvernance de Nicolas Sarkozy qui a vite montré ses limites. Couacs gouvernementaux à répétition, cohabitation froide et conflictuelle entre le président et son Premier ministre… Autant de situations politiques inquiétantes qui ont vite remis en selle un discours de critique et d'opposition sur lequel les socialistes, menés par François Hollande, ont surfé avec beaucoup d'opportunisme. Nicolas Sarkozy, l'homme qui se pavanait au début de son mandat en se flattant «de savoir exploiter les ressources humaines du PS» est paradoxalement celui dont la politique a permis aux socialistes de se redresser et de ne pas sombrer. Le second facteur qui a permis à François Hollande de vivre une seconde jeunesse est la multiplication excessive des candidats à sa succession. Après le syndrome «Ségolène Royal», il faut dire que les leaders socialistes ont vite fait ce calcul assez simple pour pouvoir prétendre à un destin national, le contrôle total de la machine du parti est indispensable. Cette absence de chef naturel pour lui succéder, cette multiplication des appétits et des profils fait de François Hollande une pièce incontournable dans ce dispositif de sélection. A l'égard de Ségolène Royal, le toujours premier secrétaire du Parti socialiste s'inscrit toujours dans une relation de défi : «celle qui a été notre candidate doit être respectée» (mais que) ça ne veut pas dire pour autant qu'il faille offrir le PS à celui ou celle, en 2008, qui le demande». A l'égard des autres , François Hollande laisse volontairement planer le mystère : «Je ne suis pas avec les uns ou les autres. Je suis sur ma ligne politique» et de préciser dans une langue de bois bien marbrée que «le choix de la personne découle de la majorité qui sera formée. Aucun nom ne me fait peur parmi ceux qui pensent la même chose». Une chose est sûre. François Hollande n'animera pas de motion en tant que premier signataire avec cet argument «Je ne passerai pas de chef de parti à chef de courant».