Des regards plus malicieux accompagnés de sourires plus coquins, le nouveau Hollande tranche littéralement avec la description qu'en faisait déjà la satire politique de l'époque. Dans une logique politique classique, l'homme qui a été aux commandes au moment où son parti a spectaculairement perdu la présidentielle de 2007 et a organisé le congrès de Reims qui a vu les divisions déchirantes paralyser sa famille politique, cet homme là, une fois parti, devrait avoir beaucoup de difficultés à revenir. Ayant fait son temps et cuvé ses défaites. Et pourtant , cet homme là et c'est de François Hollande qu'il s'agit, ancien premier secrétaire du PS, n'est pas prêt de rendre son tablier. Il semble non seulement avoir retrouvé une nouvelle fringale mais se pose comme une personnalité incontournable pour les équations à venir. Alors que le Parti socialiste bataille dur pour tenter désespérément de faire mordre la poussière à Nicolas Sarkozy lors des prochaines élections européennes, voilà que François Hollande, le député maire de Tulles en Corrèze, se pique d'annoncer son ambition présidentielle pour…2012. Et ce, avec des mots qui ne laissent place à aucun doute sur la détermination du personnage: «Je suis dans la préparation, personnellement et collectivement (…) il faut se mettre dans la situation de pouvoir exercer le mandat que l'on sollicite. Cela ne veut pas dire qu'on y parvient, cela veut dire qu'on s'y prépare». Cette petite phrase, lancée presque au hasard, a fait un grincement de dents d'enfer au Parti socialiste. Il ne manquait plus que François Hollande pour rajouter sa musique aux ego qui s'entrechoquent déjà pour la prise de contrôle du label socialiste. Entre son ancienne campagne Ségolène Royal qui refuse de descendre de sa calèche d'éternelle candidate à la présidentielle et l'actuelle première secrétaire du PS, Martine Aubry, qui peine à imposer son autorité sur son équipe, sans parler de Dominique Strauss-Kahn qui polit patiemment à Washington son statut de recours et les nombreux «jeunes» du PS comme Benoit Hamon et Vincent Peillon qui s'y voient déjà, l'autoroute socialiste de la présidentielle est déjà très embouteillée. François Hollande ne semble pas avoir improvisé une telle annonce. Il y a de la préparation dans l'air. L'homme est méconnaissable. Des cheveux teints en noir, des lunettes mises au goût du jour sur un visage plus aminci. Des regards plus malicieux accompagnés de sourires plus coquins, le nouveau Hollande tranche littéralement avec la description qu'en faisait déjà la satire politique de l'époque et qui n'était pas loin de la réalité : un énorme morceau de fromage gélatineux qui dirigeait le PS qui alliait servitude et disponibilité. Avec toutefois un talent reconnu par tous, celui de savoir tresser des formules assassines qui font mouche avec un évident sens de l'ironie et de la dérision. François Hollande a longtemps campé le personnage qui sert modestement la soupe aux autres. Il a longtemps évolué dans l'ombre dominatrice de Lionel Jospin, ancien Premier ministre et surtout ancien candidat malheureux à la présidentielle sorti devant Jacques Chirac par un Jean-Marie Le Pen triomphal. Ensuite, il a été écrasé par l'ombre castratrice de Ségolène Royal qui, le laissant à la maison avec le PS et leurs quatre enfants, est partie affronter Nicolas Sarkozy avec le succès qu'on connaît. Aujourd'hui, il y a comme un air de revanche et de session de rattrapage. Le langage est toujours aussi consensuel mais la posture est individuelle : «Celui ou celle qui se serait mis de côté n'aurait rien gagné. On gagne ensemble, hélas, on perd aussi ensemble». François Hollande tente de capter le sujet qui fait actuellement polémique au sein du PS, le rapport au centriste François Bayrou. Le député maire de Tulles parle du patron du MoDem de cette manière : «François Bayrou est aujourd'hui une personne, à peine un parti, pas un projet, pas un programme». Ou alors «François Bayrou est dans l'opposition à Nicolas Sarkozy. Il a été de droite. Il est aujourd'hui au centre, mais il n'est pas devenu de gauche». On lui prête l'intention de «plumer la volaille socialiste». Faisant sans doute revivre ses anciens souvenirs, François Hollande n'a aucune crainte de ce côté. «Elle est dodue la volaille socialiste».