L'Afghanistan est pour Nicolas Sarkozy le terrain d'opérations sur lequel il compte concrétiser son spectaculaire rapprochement avec l'Administration Bush, alors que, sur l'Irak, il continue d'observer un silence assourdissant. C'est devenu aujourd' hui le secret de polichinelle le mieux gardé en France. Paris s'apprête à augmenter le volume de sa présence militaire en Afghanistan de 1000 hommes. C'est ce qu'a écrit avec certitude le quotidien britannique «The Times» à la veille de l'importante visite d'Etat que le couple présidentiel Nicolas Sarkozy et Carla Bruni compte effectuer en Grande-Bretagne. Même si déjà à Bruxelles, au début du mois, à l'issue d'une réunion avec ses homologues de l'Otan, le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner s'interrogeait à haute voix sur les destinations qui doivent accueillir les soldats français : «Le choix n'est pas encore opéré entre l'est et Kandahar», l'Elysée a refusé de commenter les révélations du «Times», se contentant de dire que Nicolas Sarkozy fera une annonce sur le sujet lors du prochain sommet de l'Otan prévu à Bucarest du 2 au 4 avril. L'Afghanistan est pour Nicolas Sarkozy le terrain d'opérations sur lequel il compte concrétiser son spectaculaire rapprochement avec l'Administration Bush. Alors que sur l'Irak, il continue d'observer un assourdissant silence, l'Afghanistan suscite toute son attention. Ce n'est ni un hasard, ni une figure de style si lors de sa récente réception à l'Elysée, le candidat républicain à l'élection présidentielle, John McCain a tenu à rendre hommage à la participation française à l'effort de guerre en Afghanistan et aux soldats français engagés sur le front des opérations : «Nous leur sommes très reconnaissants pour leur engagement et leur sacrifice». Et de suggérer que la France puisse renforcer sa présence militaire en Afghanistan déjà forte de quelque 1900 hommes déployés dans le cadre de la Force internationale d'assistance à la sécurité ( Isaf) sous commandement de l'OTAN : «Bien sûr, nous aimerions une participation plus importante (mais) je ne viens pas en Europe pour critiquer nos alliés». Le président Nicolas Sarkozy a déjà justifié le nouvel engagement militaire français dans cette région. Lors de sa visite en Afghanistan du 22 décembre dernier, il avait clairement inscrit cette stratégie dans la guerre internationale contre le terrorisme. Nicolas Sarkozy avait affirmé qu' «il se joue ici une guerre, une guerre contre le terrorisme, contre le fanatisme, que nous ne pouvons, que nous ne devons pas perdre». Pour parvenir à ses fins, Nicolas Sarkozy doit d'abord convaincre son opposition domestique qui voit dans sa précipitation à flirter avec les structures de commandement militaires de l'Otan une forme de trahison de ce qui constituait la spécificité française. Sa volonté d'envoyer d'avantage de militaires français en Afghanistan suscite sinon une franche opposition, du moins des moues dubitatives. Comme celle qu'affiche en ce moment Jack Lang qui n'est pourtant pas connu pour nourrir un rejet épidermique à l'égard de Nicolas Sarkozy : «Je m'interroge beaucoup. L'Otan a en partie échoué en Afghanistan. Ben Laden s'est enfui, a quitté le territoire afghan (…) Alors, je m'interroge: 1.000 soldats français en plus des forces spéciales qui sont déjà envoyées dans le sud ici ou là au péril de leur vie, alors même que les Allemands sont en retrait, que les Turcs (...) sont eux aussi en retrait?. Est-ce que nous risquons pas, sauf avec les Anglais, de nous trouver dans une situation qui n'est pas facile?». L'opposition a longtemps reproché à Nicolas Sarkozy de s'aligner aveuglement sur l'aventurisme militaire de George Bush. Elle en avait même fait un argument électoral destiné à ameuter une opinion française rétive à la réintégration de la France des structures de l'Otan. Nicolas Sarkozy doit aussi composer avec le scepticisme et l'hésitation qui caractérisent les esprits en Europe. Même sous le feu des critiques nourries de l'Administration Bush et une accusation directe de ne pas tout faire pour lutter contre le retour des Talibans en Afghanistan, des pays comme l'Allemagne, l'Italie ou l'Espagne trainent les pieds. Washington ne cesse de dramatiser les enjeux pour convaincre ses alliés européens de sortir de leur léthargie comme l'a fait récemment le vice-président américain Dick Cheney en tournée d'adieux : «L'Isaf a provoqué un énorme changement dans ce pays et l'Amérique demandera à ses alliés de l'Otan de s'engager encore davantage pour son avenir. Tous les pays libres ont intérêt à un Afghanistan sûr et démocratique». Seul Nicolas Sarkozy semble disposé à répondre à cet appel. Réponse officielle à Bucarest le 2 avril.