Abdelaziz Bouteflika doit faire un effort pour comprendre, mieux que quiconque, «les intérêts fondamentaux du Maroc». Nous sommes prêts à l'encourager sérieusement, sans excitation particulière, sans faux enthousiasme et sans calculs étroits. Mohamed Abdelaziz, le chef des mercenaires du Polisario, a fini par s'apercevoir qu'il n'était pas le seul à partager la fidélité de l'Algérie. Il se rend, tardivement, compte que l'Histoire a ses cocus. C'est dommage, pour lui, Labiche ne fait pas partie de ses lectures. Il se fend d'un communiqué hilarant à l'adresse, il faut le faire, du Premier ministre belge, Guy Verhofstadt, l'actuel président tournant de l'Union européenne, pour dénoncer « la tentative de pillage des richesses sahraouies » et s'énerve au sujet de la signature entre le Maroc et la société Totalfina-Elf, le 19 octobre dernier, pour la prospection du pétrole au large des provinces du Sud marocain. Or, cette grosse colère qui est censée faire trembler les multinationales, tétaniser le Maroc, geler les accords européens et fixer les frontières économiques algériennes à Bab El Oued, n'a pas eu l'effet heureux escompté. Abdelaziz Bouteflika n'a pas fait grand cas, ni un casus belli, c'est-à-dire, en bon latin de Tindouf, un motif qui met un État dans la nécessité de recourir aux armes, de la déclaration de son obligé. Le président algérien a bel et bien signé, en grande pompe, il faut le dire, l'accord d'association entre, justement, son pays et l'Union européenne. L'égaré de Tindouf a dû la trouver saumâtre. Boutef, comme on aime l'appeler, quand une vieille tendresse « oujdie » nous submerge, a choisi l'Algérie, le Maghreb, la Méditerranée, au détriment du syndrome mortel du Cachemire (l'exemple est de Boutef) dont Mohamed Abdelaziz est le stigmate le plus répulsif. Quand il déclare aux Européens que les Algériens veulent être « des partenaires fiables, loyaux, sincères et très sérieux » nous n'avons aucune raison, en tant que partie prenante fiable, loyale, sincère et très sérieuse de la Méditerranée et de l'ensemble européen, de ne pas le croire, même si ce n'est qu'à moitié. Par contre, le maton des dunes a quelques raisons de s'inquiéter. Si le Maghreb doit se refaire en passant par Bruxelles et si les Maghrébins ne veulent pas être « les enfants pauvres de l'alliance européenne » ( c'est toujours Boutef qui le dit), à la bonne heure. Mais Abdelaziz Bouteflika doit encore faire un effort pour comprendre, mieux que quiconque, « les intérêts fondamentaux du Maroc » (c'est toujours lui qui parle, on dirait, presque, que la période des soldes a commencé). Nous sommes prêts à l'encourager sérieusement, sans excitation particulière, sans faux enthousiasme et sans calculs étroits. Cependant, il y a un rabe. À partir du moment où l'Algérie emprisonne sur son sol, depuis 25 ans, dans des camps hideux, devant la face honteuse du monde, des citoyens Marocains contre la légalité internationale, contre les droits humains les plus élémentaires et contre toutes les conventions qui lient des pays souverains et civilisés, la discussion risque de tourner court. Que les militaires algériens lèvent, simplement, leur siège armé sur les camps et les Marocains rentreront par milliers chez eux. Nous ferons cadeau à l'Algérie du prix du transport. Et ce n'est pas le mercenaire en chef, battu, cocu et content, du Polisario qui pourra les arrêter. L'avenir est aussi simple que ça, Monsieur le Président.