Le raid mené, le 6 septembre, par l'aviation israélienne contre des objectifs situés dans le nord-est de la Syrie provoque bien des interrogations largement relayées par la presse internationale. Le mystérieux raid mené contre le territoire syrien par l'aviation israélienne, le 6 septembre 2007, alimente les titres de la presse internationale en dépit du mutisme le plus total observé sur cette opération par Israël, dont la censure militaire bloque la publication de toute information. Les journaux israéliens en sont réduits à commenter les supputations contradictoires auxquelles se sont successivement livrés CNN, le New York Times et le Washington Post. De simple raid tout d'abord contre un convoi de livraison d'armes iraniennes au Hezbollah libanais, l'opération a acquis le statut d'une attaque aérienne et terrestre menée par Tsahal, l'armée israélienne, contre un site nucléaire installé dans le nord-est de la Syrie par des techniciens nord-coréens spécialisés dans l'extraction, à partir d'une mine de phosphate, de l'uranium. Planifiée dès le printemps dernier par les services secrets israéliens, l'opération aurait été déclenchée après l'arrivée, dans le port syrien de Tartous, d'un navire nord-coréen transportant une cargaison « sensible ». Mené avec l'approbation tacite de Washington, qui aurait, depuis plusieurs mois, transmis à Israël, des informations sur la volonté de Damas de se doter d'un programme nucléaire à des fins militaires, le raid aurait été décidé en fonction de l'opportunité offerte par les fêtes de Rosh Hashanah. La nouvelle année juive, cette solennité religieuse durant laquelle les quotidiens israéliens sont absents pendant plusieurs jours des kiosques et les membres du gouvernement éloignés, en théorie du moins, de leurs bureaux. De fait, cette coïncidence a largement contribué à favoriser ce que la presse israélienne qualifie, en termes plutôt vifs, de « black out » des milieux officiels et officieux sur une opération à laquelle le chef des renseignements militaires, le général Amos Yadlin, aurait fait une allusion. Il a affirmé qu'Israël «avait restauré sa capacité de dissuasion sur le plan régional, notamment en ce qui concerne la Syrie et l'Iran». Ces spéculations ont largement été favorisées par les réactions syriennes dont la modération dissimulait mal l'épais voile de fumée entourant ce dossier connu au Pentagone sous le nom de «Dossier Boustan». Israël et la Syrie auraient, pour des raisons radicalement opposées et même contradictoires, choisi d'observer sur cet incident bilatéral le mutisme le plus total. Contrairement aux Américains pour lesquels la dénonciation de la coopération dans le domaine nucléaire entre Damas et la Corée du Nord fait partie de la lutte contre «l'axe du Mal». Ce serait la raison pour laquelle plusieurs chaînes de télévision et journaux américains auraient bénéficié d'étranges confidences de l'Administration Bush. Dans Maariv, Jacky Khoury, par le biais d'une « lettre ouverte » adressée à Robert Gates, reproche même au secrétaire américain à la Défense d'avoir laissé des membres du Pentagone ébruiter les informations relatives à la coopération israélo-américaine dans la préparation du raid. Selon Jacky Khoury, c'est une « provocation inutile » qui vise à humilier le président Bachar el Assad qui pourrait sortir de sa retenue. Une retenue qui est aussi la conséquence de son isolement sur la scène internationale et du manque de soutien des différents pays arabes et arabo-musulmans modérés, dont le silence dans ce dossier est remarqué par plusieurs observateurs. L'acquisition par la Syrie de l'arme nucléaire aurait considérablement affaibli la position turque d'où la prudence observée par le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan. Quant à l'Arabie Saoudite et l'Egypte, elles auraient vu d'un mauvais œil la Syrie acquérir un avantage militaro-stratégique renforçant considérablement sa position au sein du monde arabe et bouleversant la donne géopolitique de la région en offrant à Damas et à ses alliés , le Hezbollah libanais et le Hamas palestinien, la garantie d'un «parapluie atomique». Une crainte partagée par la Jordanie qui ne cache pas son intention de se doter du nucléaire civil, sur la base d'accords techniques avec les Etats-Unis et l'Agence viennoise de l'énergie atomique. Ces accords seraient remis en question par un «feu nucléaire» au Proche-Orient. Ce grave raid aérien israélien survient au plus mauvais moment, alors que les espoirs suscités par les négociations entre Ehoud Olmert et Mahmoud Abbas ainsi que par la tenue, en novembre, d'une conférence internationale de paix semblent s'estomper. L'Autorité palestinienne et les ministres des Affaires étrangères égyptien, jordanien et saoudien menacent désormais ouvertement de boycotter cette réunion. Ils mettent en avant le refus israélien exprimé par Ehoud Olmert, le 16 septembre, de parvenir, avant novembre, à la signature d'un accord-cadre pour un règlement définitif du conflit israélo-arabe. Le chef du gouvernement israélien voudrait se contenter d'une simple « déclaration d'intention » publiée conjointement par Israël et l'Autorité palestinienne. Une démarche en-deça des attentes formulées par la Ligue arabe lors de son sommet de Ryad, les 28 et 29 mars derniers.