Après avoir planché durant deux mois sur les conditions d'une réconciliation nationale, la Côte d'Ivoire semble prendre le chemin de la stabilité politique. Entamé le 9 octobre, le Forum pour la réconciliation nationale d'Abidjan a finalement présenté ses recommandations au président Laurent Gbagbo, jeudi dernier. Si l'issue a longtemps semblé incertaine, les quatre principaux acteurs de la vie politique ivoirienne - dont l'ancien Premier ministre et leader exilé de l'opposition, Alassane Ouattara - ont finalement tous accepté de prendre part au débat civique. Une initiative heureuse si l'on se réfère à l'actualité de la Côte d'Ivoire ces dix dernières années… Après le « règne » du président Félix Houphouët-Boigny, mort en décembre 1993, les caisses de l'Etat généreusement vidées, et la crise économico-financière des années 90, la situation était en effet plutôt morose. Le multipartisme instauré en 1990 aurait - peut-être - pu arranger les choses si le débat politique n'avait pas tourné au monologue. Pire, cette lourdeur politique a réveillé les oppositions ethniques et régionales, entre les Malinké et Dioula du Nord, les groupes Akan du Sud-Est, et les anciens petits États du Sud-Ouest. S'ensuivent des élections contestées. Henri Konan Bédié, proclamé chef de l'État en 1993, est reconduit en 1995 lors d'un scrutin boycotté par les principaux partis d'opposition. Le Front populaire ivoirien (FPI) de Laurent Gbabo, le Rassemblement des républicains de Djény Kobéna, et l'Union des forces démocratiques (UDF), dénoncent alors le code électoral qui interdit à ceux dont les parents ne sont pas nés Ivoiriens d'être candidats à la présidence. Premier visé : le candidat Alassane Ouattara, à la tête de l'exécutif de 1990 à 1994 et originaire d'une région du Burkina Faso, intégrée jusqu'en 1960 à la Côte-d'Ivoire. Mais avec le Forum, le pays semble cette fois-ci chercher le consensus. La première des dix résolutions prises concerne en effet « l'acceptation par tous des résultats des différentes élections générales et la reconnaissance de la légitimité des pouvoirs publics ivoiriens » qui en sont issus. Quant à la Constitution, si elle reste en l'état, elle sera désormais soumise à un « comité de juristes » qui harmonisera certaines de ses dispositions. Toujours axé sur la stabilité, le Forum a demandé aux autorités de « délivrer à M. Ouattara un certificat de nationalité «ivoirienne», et a condamné le coup d'Etat du 24 décembre 1999 contre le président Bédié. Les participants ont enfin sollicité la justice pour accélérer la procédure dans l'affaire du charnier de Yopougon, où 57 morts avaient été découverts juste après l'élection du président Gbagbo en octobre 2000. Si recommandations il y a, les Ivoiriens – visiblement satisfaits - attendent à présent que leurs dirigeants passent à l'acte. Pour enfin sortir le pays du chaos…