L'annulation par la Cour constitutionnelle du premier tour de l'élection présidentielle en Turquie n'a pas empêché le parti islamiste au pouvoir AKP de vouloir aller jusqu'au bout. L'annonce de la tenue d'élections législatives anticipées en Turquie a été accueillie avec soulagement par l'ensemble de la classe politique. Le recours au peuple répond aux souhaits de l'opposition qui avait mobilisé la semaine dernière un million de personnes dans les rues d'Istanbul contre l'élection d'un président issu de la mouvance islamiste. Mercredi, la commission constitutionnelle du Parlement a proposé que les législatives se tiennent le 22 juillet. En revanche, le Parti de la justice et du développement (AKP) au pouvoir en Turquie avait proposé la tenue d'élections législatives le 24 juin. La décision de la commission devra être entérinée par le Parlement, ce qui devrait être une formalité étant donné que tous les partis qui y sont représentés sont en faveur de ces élections anticipées. En attentant ce scrutin, le chef du gouvernement Recep Tayyip Erdogan et son parti AKP ne semblent toujours pas prêts à rendre les armes. Largement majoritaire au Parlement, ce Parti, issu de la mouvance islamiste, a adopté un nouveau calendrier pour l'élection présidentielle fixant à ce dimanche 6 mai un nouveau tour du scrutin. La manœuvre n'a presque aucune chance de se solder d'un succès. Les partis de l'opposition vont certainement poursuivre son boycott. Abdullah Gül, numéro deux de l'AKP et seul candidat en lice, avait manqué d'être élu de dix voix. M. Gül, ministre des Affaires étrangères, a indiqué qu'il n'insisterait pas pour maintenir sa candidature s'il échouait à nouveau à être élu. L'AKP souhaite aussi faire voter une réforme constitutionnelle. Ce parti a proposé en outre d'organiser des élections parlementaires tous les quatre ans et non tous les cinq ans comme c'est le cas actuellement. Certains élus AKP ont même proposé de soumettre dorénavant au suffrage universel la désignation du chef de l'État. Les élections législatives anticipées étaient réclamées par l'opposition, les milieux d'affaires et la plupart des médias pour sortir le pays de la crise, qui avait atteint son paroxysme au soir du premier tour de la présidentielle avec la publication d'un communiqué de l'armée. L'état-major accusait alors le gouvernement de M. Erdogan de remettre en cause les principes fondateurs de la République, dont notamment la laïcité. L'AKP contrôle déjà deux des trois plus importantes charges du pays, avec le poste de Premier ministre et la présidence de l'Assemblée nationale. Le président de la République, dont les pouvoirs sont surtout honorifiques, dispose néanmoins d'un droit de veto sur les lois et de nommer des hauts fonctionnaires.