En Israël, de nombreuses voix se font entendre pour presser le gouvernement de faire preuve d'audace en acceptant de négocier sur la base de l'initiative de paix arabe telle qu'elle a été formulée lors du sommet de Ryad. Du 2 au 9 avril, les Israéliens de confession juive ont célébré Pessah, la Pâque juive, une « fête nationale, religieuse et agricole », rappelant la sortie d'Egypte, la libération des Hébreux de l'esclavage ainsi que l'approche des moissons et des vendanges. Comme chaque année, des dizaines de milliers d'Israéliens ont pris à cette occasion des vacances. Le Premier ministre lui-même a pris quelques jours de vacances, en compagnie de son épouse et de quelques amis. Ce bref moment de détente n'a pu faire oublier à Ehoud Olmert les graves échéances qui l'attendent. La première est de trouver un remplaçant à son ministre des Finances, Abraham Hirschzohn, soupçonné d'avoir détourné d'un syndicat et d'une ONG qu'il dirigeait, avant son entrée au gouvernement, près de 2 millions de dollars. La deuxième échéance, de loin la plus grave, est la publication, sans doute au cours de la seconde moitié d'avril, de la version intérimaire – la définitive ne sera connue qu'en août 2007- du Rapport de la Commission créée fin septembre 2006 pour enquêter sur les dysfonctionnements de l'échelon politique et militaire lors de la guerre du Liban. De nombreux journalistes avancent déjà que la version intérimaire serait très critique à l'égard d'Ehoud Olmert ce qui amènera le gouvernement à démissionner. C'est ce qui explique sans doute le très net durcissement du ton de la presse israélienne envers le gouvernement et l'armée. A tel point que les milieux politiques cherchent une issue à la crise politique. Les députés de la coalition gouvernementale, pourtant hétéroclite, de Ehoud Olmert envisagent deux solutions. La première serait un infléchissement de la coalition vers la gauche, avec un ralliement du Meretz, pacifique, de Yossi Beïlin, qui accepterait de gouverner avec l'Avoda d'Amir Peretz, affirmant ainsi sa « stature de Premier ministre», avec le Shass, le parti ultra-ortodoxe et social séfarade, Gil, le parti des retraités, et l'appui d'anciens Travaillistes ayant rallié Kadima et désireux de revenir dans la « vieille maison », avec, en outre, l'appui tacite des partis arabes forts de leurs 10 députés. Mais l'actuelle ministre des Affaires étrangères, Tsippi Livni, dispose de l'appui, non négligeable, de sa collègue américaine, Condoleeza Rice. Elle pourrait succéder à Ehoud Olmert en s'appuyant sur les partis composant aujourd'hui la coalition, y compris Israël Beïtenou d'Avigdor Lieberman. Et, peut-être, sous certaines conditions, les Travaillistes dont le nouveau chef, après les primaires du 28 mai, sera soit l'ancien Premier ministre Ehoud Barak, soit l'ancien chef du Shin Beth et amiral de réserve Ami Ayalon. Chroniqueur vedette du quotidien libéral Haaretz, Zeev Schiff estime qu'Israël a «besoin d'une direction irréprochable capable de mener une politique de sagesse et de courage» afin de répondre à l'offre historique faite par le sommet arabe de Ryad les 28 et 29 mars dernier. Ehoud Olmert a compris qu'une spectaculaire avancée diplomatique pourrait lui permettre de survivre politiquement à la crise en préparation, d'où ses ouvertures remarquées en direction du roi Abdallah d'Arabie-Saoudite qu'il a promis de surprendre, s'il le rencontrait, par « ses propos et propositions ». Cramponné au pouvoir, Ehoud Olmert serait bien avisé de méditer sur le sens de Pessah, « fête de la libération nationale d'un peuple » . Cette libération historique du peuple juif sera incomplète tant qu'il ne sera pas affranchi de ce qu'un chroniqueur nomme « son Egypte intérieure », à savoir l'occupation des territoires, et tant qu'il n'aura pas reconnu à un autre peuple, le peuple palestinien, le droit d'avoir, comme lui, un Etat pour y satisfaire ses légitimes aspirations nationales. C'est ce qui a pu faire écrire, dans le site Internet de Haaretz, à Bradley Burstron : « Avec l'arrivée de la paix, lors d'un prochain Pessah, les fidèles ne diront plus « l'an prochain à Jérusalem reconstruite !» mais « l'an prochain à Jérusalem partagée !», preuve qu'un Etat palestinien aura été créé avec Jérusalem Est et ses quartiers arabes et arménien pour capitale.