En qualifiant de «contre-productifs» les procès intentés contre les conseillers impliqués dans l'affaire de l'achat des voix, le premier vice-président de la deuxième Chambre, Mohamed Fadili, aura commis une «grave erreur», affirme le militant associatif Mohamed Mjid. ALM : Dans un récent entretien accordé à «ALM», le premier vice-président de la deuxième Chambre, Mohamed Fadili, a «regretté» le procès intenté contre les conseillers impliqués dans l'achat de voix. Quelle lecture faites-vous de cette position ? Mohamed Mjid : J'ai été surpris par la position de Mohamed Fadili à propos de la condamnation d'un certain Chraïbi de Tadla pour corruption. Personnellement, j'avais fait un article au sujet justement de ces députés de la première Chambre qui ont démissionné pour rejoindre la deuxième Chambre dont l'inutilité est confirmée. Si ces députés ont démissionné, c'est parce qu'ils voulaient s'assurer, pendant neuf ans, un salaire confortable, l'immunité parlementaire, les privilèges, la possibilité de se livrer impunément à tout genre de trafics. Je dis « Non », la population dit « Non », le citoyen dit « Non » à cette mascarade protégée par les partis politiques. Pourquoi ? Parce que tous ces candidats ont été accrédités par les partis politiques. Et ce n'est un secret pour personne, certains partis vendent les accréditations (Tazkia). Est-ce qu'on va tout donner à ces gars-là le statut de représentants du peuple ? Non, cent fois non. Ces gens-là achètent les voix, c'est là un investissement malsain. Ils courent vers les maroquins pour mieux exploiter le Marocain. Le fait qu'on ait corrompu, acheté des voix, ou magouillé dans les élections, ne permet à personne de continuer ce système. C'est une haute trahison. Et comme je l'ai déjà écrit, la place de ces gens-là n'est pas à côté de Mostapha Oukacha mais à Oukacha ! Que signifie pour vous le fait que les conseillers poursuivis soient présentés comme des « boucs émissaires » ? J'aime beaucoup ce monsieur Fadili, mais je me permets de lui dire qu'il est à côté de la plaque. Boucs émissaires ou pas, il faut commencer l'assainissement, accompagner SM le Roi Mohammed VI qui s'engage courageusement sur cette voie. A monsieur Fadili, je dois dire : «Faites la même chose, ou retirez-vous de la politique». M. Fadili reconnaît lui-même que c'est une erreur, que c'est une faute grave, que cela jette le discrédit sur la politique, sur les partis… Cette démocratie que l'on veut construire doit s'installer sur de nouvelles bases, c'est-à-dire le droit et le devoir, plutôt le devoir avant le droit. Pensez-vous que l'intervention de la justice est la meilleure solution pour barrer la route devant l'achat des voix ? Le Parquet commence enfin à faire son travail. C'est à lui d'intervenir, de signaler, de dénoncer et d'accompagner l'opinion publique maintenant. Quelle leçon peut-on tirer des procès intentés contre les conseillers controversés? Les partis politiques sont-ils en mesure de tirer les conclusions qui s'imposent ? Les ténors qui parlent aujourd'hui de moralisation peuvent rendre un meilleur service à la Nation en s'éloignant de la politique et laisser le champ libre et une autoroute pour attirer les jeunes vers la politique. Ce sont les ténors des partis qui cautionnent, qui choisissent leurs représentants dont ils veulent faire les représentants de la Nation. C'est donc à un procès des pratiques des partis politiques eux-mêmes que l'on assiste aujourd'hui ? A travers «X» et «Y», c'est en effet un procès des partis politiques et un appel en même temps à l'assainissement, à la véritable moralisation et à la défense de l'intérêt général. Il ne s'agit pas de venir ronronner à la télévision : «Nous sommes les meilleurs», alors que, pour l'ensemble des citoyens, ils sont les pires. L'intervention de la justice est-elle un gage pour des élections 2007 saines ? Il y a énormément de citoyens qui souhaitent que les élections de 2007 soient retardées. Il faut d'abord assainir la situation et voir émerger une nouvelle classe politique à la suite de débats instructifs. Nous avons toujours les mêmes têtes avec les mêmes discours, les mêmes objectifs.